We need to talk about Kevin – film de Lynne Ramsay
Eva est une femme passionnée et comblée. Sans raison rationnelle, par amour, elle accepte de faire un enfant à son compagnon. Commence alors une longue descente aux enfers, une relation-miroir et perverse qui la mettra face à ses contradictions.
Sans volonté de livrer une quelconque explication logique aux massacres adolescents, le livre comme le film apportent un contre pied rare, celui de la mère. Et ici, c’est elle qui s’exprime. La relation complexe qui lie Eva à son enfant n’est jamais une relation animale. De la chair à la chair en découle la rancœur et les questions, pour lui, du pourquoi de son existence qui sont les mêmes finalement que chez sa mère. Très vite, à la naissance presque, le rapport de force est instauré. Comme une hydre qui ne voudrait avoir qu’une tête, il est évident que seul un des deux peut survivre de cette relation. Trop semblables pour se respecter, trop fiers pour passer la main.
Mais là où l’impressionnant roman de Lionel Shriver proposait un retour sur toute la vie du personnage principal, ses sentiments les plus profonds puis les dialogues avec son fils en prison, le film se concentre sur la montée de la violence jusqu’à lakmé. Le choix d’une absence de voix off est d’autant plus incompréhensible qu’il soustrait au film la principale qualité de l’œuvre originelle l’honnêteté de l’analyse. Préférant se concentrer sur un rapport de force silencieux et implacable, une violence par palier au quotidien, la réalisatrice joue des effets visuels et sensoriels pour exprimer la complexité du drame. Un choix audacieux qui lui sera fatal. Le film est alors comme désincarné, aussi beau que creux.
Comme une introduction et une mise en image osée d’un des romans les plus complexes et les plus réalistes sur le malaise maternel, We need to talk about Kevin est aussi ce qu’il n’aurait pas du être : un énième récit de massacre en milieu scolaire, un fait divers anecdotique. Plus fort que la déconstruction artificielle du récit et les effets de style arty, la véritable force de We need to talk about Kevin se cache là où ne s’y attend pas : dans le visage et le physique sec, dur et désespéré de Tilda Swinton. Décevant bien qu’impressionnant.
14/20
Lucile Bellan (Twitter)
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- 5 nominations : Palme d’Or, Grand Prix, Prix du Jury, Prix du Jury Oecuménique et Prix de la Jeunesse
Festival International du Film de Toronto 2011
- 1 nomination : Prix de la Critique Internationale – Présentations spéciales
We need to talk about Kevin
Film de Lynne Ramsay
Avec Tilda Swinton, John C. Reilly et Ezra Miller
Sortie le 28 septembre 2011
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