Au bout du conte – comédie avec Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri
Un père de famille dont l’heure de la mort approche, dixit une voyante en laquelle il n’accorde aucun crédit. Sauf que quand même… Une mère de famille comédienne en mal de reconnaissance qui a un besoin urgent de reprendre des leçons de conduite pour se libérer un peu de la chape de plomb qui lui pèse depuis des lustres. Un jeune homme qui croit dur comme fer en son talent de musicien. Le tout sur le mode du conte avec la jeune fille qui croit au grand amour, aux signes du destin et tout le tralala.
Il y a deux types de films dans la carrière des Bacri/Jaoui : ceux dont ils ont confié le scénario à un grand de la mise en scène et les autres que Jaoui a jugés préférables de suivre jusqu’au bout. Les premiers dont le propos savoureux et la subtilité dialectique et situationnelle sont étayés par une technique filmique toujours en alerte (Un air de famille de Klapisch, Smoking/No smoking et On connaît la chanson de Resnais). Les seconds, objets foutraques, jolis téléfilms que sauvent les mêmes qualités d’écriture. Au bout du conte s’inscrit totalement dans cette dichotomie.
L’idée de départ, la croyance sous toutes ses formes, sert de fil conducteur à cette histoire où s’entremêlent destins et parcours habilement imbriqués par une solidité scénaristique évidente. Les personnages, gros point fort de l’écriture du couple, prennent vie dans ce vaste aréopage familial, distillant les informations avec un très juste dosage. A l’image de la scène que la cinéaste parvient toujours à fort bien circonscrire pour en extraire toute la substance émotionnelle (qu’elle soit drôle ou tragique, ou même tragi-comique), le personnage est toujours cerné avec beaucoup d’acuité. Ainsi certains moments du film s’avèrent de véritables pépites de drôlerie laissant toutefois évader ça et là quelques pointes de noirceur plus appuyées que d’ordinaire.
Mais lorsque l’on regarde l’ensemble, force est de déplorer un manque de tenue dans l’assemblage du puzzle. Des longueurs regrettables, des enchaînements hasardeux, des bavardages inutiles viennent priver le spectateur de la légèreté dont le scénario regorge pourtant. Malgré ces sempiternelles références culturelles dont Jaoui ne peut s’empêcher d’étayer son propos, comme par peur qu’on oublie le brillant auteur qu’elle est, et le fil conducteur emprunté à la morphologie du conte, le résultat demeure un peu bancal. Il est rattrapé plus ou moins par les comédiens.
Si Bacri n’en finit pas de nous ressasser toujours le même infatigable bougon, Jaoui parvient avec plus de finesse à nous mener vers une forme d’empathie pour son personnage vieillissant (qui a fait merveille dans le joli Du vent dans mes mollets l’an passé). Mais ce sont surtout les autres rôles qui épatent à coup sûr. Agathe Bonitzer crève l’écran, Arthur Dupont est splendide et Benjamin Biolay campe un arachnéen manipulateur avec une présence sidérante. Nina Meurisse est juste délicieuse en Clémence, l’amoureuse transie du beau Sandro. Elle n’est d’ailleurs pas la seule transfuge des planches. Didier Sandre et l’immense Dominique Valadié complètent cette distribution de choix. Ils sont l’âme de ce film qu’on aurait, à coup sûr, adoré adorer…
Franck Bortelle
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Au bout du conte
D’Agnès Jaoui
Avec Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri et Agathe Bonitzer
Durée: 112 min.
Sortie le 6 mars 2013
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