A 90 degrés – Les déchargeurs
À 90 degrés est la lettre d’adieu de Marthe, femme alcoolique, à Christophe, son compagnon et père de ses enfants. C’est le récit de son inexorable descente aux enfers, de ses luttes vaines contre l’addiction, de ses remissions, des cures, des rechutes et de leurs espoirs déçus, à elle et à sa famille, broyées par l’irrésistible désir du ” s’abimer dans l’alcool jusqu’à la mort “.
Il y a du malheur brut dans ce spectacle, mais il y a aussi et surtout l’espoir, jamais tronqué, jamais menteur, de vivre pour espérer le mieux, la vie d’avant ou celle d’après lumineuse et libérée.
NOTE D’INTENTION
On a tous, dans le périmètre de notre vie, une personne qui a basculé. On dit : péter un plomb, une durite, un boulard : c’est la machine qui s’enraye ou déraille. La dépression de l’âme est infinie. A l’intérieur, la dépendance est rageuse, à l’extérieur, c’est une mine antipersonnel qui ampute tout : les proches, la famille, le quotidien, le rapport au temps, la joie… Marthe est un de ces êtres emportés, trop fragiles, que la vie brise. Parfois ils s’en sortent. Parfois non. Pourquoi ? Personne ne le sait. La maladie de Marthe est un arbre aux mille racines et aux mille cimes. Un arbre fleuri de mystère. J’ai eu tout contre moi, une personne embarquée dans cet indicible mal à vivre, droguée d’alcool. J’ai voulu lui donner une voix, une parole qui creuse sa difficulté à vivre, l’impossibilité d’échapper à sa souffrance. J’ai ouvert ses entrailles pour y révéler la lutte incessante contre la maladie et le désespoir, l’espoir et la chute, les dommages collatéraux.
J’ai voulu partager la souffrance intime de Marthe, avec pudeur, et accompagner ce personnage femme dans ses errances. Pour cela j’ai choisi d’écrire ce texte en spirale pour amener le spectateur au cœur de la folie, créer dans le texte un mouvement qui ouvrirait sur un sentiment universel, dessinant en filigrane, le portrait d’une société faiseuse d’êtres troués, buveurs infinis des malheurs du monde.
Ce monologue décrit ce qui résonne comme un tabou sociétal : celui de la dépression des femmes, des mères alcooliques qui se détruisent en toute conscience, qu’on ignore et qu’on tait car une mère ne doit-elle pas être qu’amour ?
Elizabeth Mazev est cette Marthe là, folle d’amour et de haine, happée par le manque et la difficulté à vivre, qui semble être passée à côté de sa vie et qui regarde en arrière avec une lucidité redoutable. Par son talent et sa sensibilité, elle dessine le portrait d’une dépression, dans un long cri d’amour, d’un seul souffle.
Frédérique Keddari-Devisme
[Source texte : Communiqué de presse]
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