Festival du film asiatique de Deauville – le 10 mars 2012
I carried you home
6ème film de compétition que je découvre, I carried you home est aussi le 4ème film à aborder le deuil. Il manque la pluie à Deauville pour compléter cette ambiance plombante et ce thème commun (ou presque) lourd. En effet, le film revient sur le déplacement du corps d’une mère fraîchement décédé par ses deux filles en ambulance à travers le pays (la Thaïlande) vers sa maison et sa famille. C’est l’occasion donc de revenir et de déterrer les rancœurs mais aussi l’amour entre les deux consanguines fâchées. Malgré sa construction élaborée, ce road movie décalé pêche à vouloir créer à tout prix la tristesse et l’empathie chez le spectateur en surexploitant les larmes de ses comédiennes. Est ce efficace ? Non.
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C’est le temps d’une grande pause. Aussi étonnant que cela puisse paraître, tenir le rythme de 4 films par jour est fatiguant, piétiner dans une file d’attente géante (et manquer de mourir écrasée sous un déambulateur) entre ces films l’est plus encore. Des repas décalés ou absents accentuent plus la sensation d’épuisement et une sieste (trop courte) est de rigueur avant de reprendre le marathon.
Headshot
Je ne cache pas mon amour inconditionnel du cinéma du réalisateur thaïlandais Pen-Ek Ratanaruang. Cinéaste des corps, du décor, il aborde ici l’histoire d’un homme brisée et désœuvré dont la notion de justice et même d’humanité est malmenée par des manigances intéressées. Reprenant son acteur fétiche du film Nymph, le réalisateur livre une nouvelle fois une œuvre puissante, complexe dans sa construction (visuelle et narrative) et malgré tout poétique.
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11 fleurs
Le cinéma chinois cache parfois de délicieuses surprises de cinéma. Ce n’est pas le cas de 11 fleurs, qui raconte à travers le regard d’un enfant de 11 ans les derniers mois de la Révolution Culturelle. Le regard enfantin est en fait naïf, voire niais, la Révolution Culturelle est à peine traitée et le choix même est fait de n’évoquer de ces anecdotes insignifiantes que des altercations triviales entre les adultes mais rien, ou si peu, de politique. On questionne alors une éventuelle frilosité de l’équipe à traiter ce sujet encore épineux mais le résultat reste alors le même, ennuyeux et vain.
Le film qui suit est attendu comme le messie par une poignée de mes collègues excités par l’odeur du sens et des effluves de testostérone. Il nous permet même de retrouver l’ambiance d’une « séance de minuit » digne de ce nom, le programme est jouissif et les scènes de combat les plus impressionnantes (et elles le sont souvent) sont chaudement applaudies par une salle conquise malgré l’heure tardive.
The Raid
Ce film indonésien est un huit clos audacieux et raconte la rencontre de dizaines de malfrats et d’une équipe de policiers dans un immeuble squatté par le pire des rebuts de la criminalité locale. Si le The Raid ne brille pas par son scénario et ses dialogues à la limite du crétin, il crée l’événement autour de scènes de free fight sauvages, de mises à mort inédites et de face à faces savoureux. On pourrait trouver répétitives ces 100 minutes de combats à mains nues (ou à machette ou encore à fusils mitrailleurs) si le tout n’était pas chorégraphié avec un talent certain et porté par une caméra sobre mais immersive ainsi qu’un montage propice à mettre en valeur les performances physiques les plus folles. Une curiosité hard boiled comme on en voit rarement.
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Voici terminé ce dernier jour complet du festival. Plus que 2 films à voir sur ma liste, un trousseau de chambre d’hôtel à rendre à l’accueil demain matin. Difficile de croire que c’est presque terminé alors que j’imagine n’avoir fait pour l’instant qu’un tour de chauffe. Je veux en voir plus, découvrir les curiosités de Kiyoshi Kurosawa, revoir Nymph de Ratanaruang, changer peut-être d’avis sur le cinéma iranien. Maintenant que j’ai le pied à l’étrier, il faut me souvenir de ces bonnes résolutions, de cette énergie, de ces émotions qui me rappellent pourquoi je mets encore les pieds dans les salles obscures. Mais trêve d’au revoir, il reste encore quelques heures de voyage à effectuer…
Lucile Bellan
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