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The Playlist : Spotify, la plateforme qui a révolutionné l’industrie musicale

Clara Douet 22 mars 2023
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Imaginer un monde sans Spotify, Deezer, YouTube, Napsters, Tidal, SoundCloud… il existait encore il y a à peine 20 ans. Si ces plateformes sont omniprésentes sur le marché de la musique de nos jours, leur conception a été un véritable tournant pour le secteur.

Comment les millions d’albums qui bercent notre monde se sont retrouvés répertoriés dans la sphère digitale ? Comment passer d’un monde où la musique n’était que physique, à une industrie presque entièrement digitalisée aujourd’hui? La série The Playlist, fraîchement sortie sur la plateforme Netflix fin octobre, retrace de manière fictive l’histoire de la création de Spotify, précurseur de la numérisation du secteur musical. 

The Playlist : Netflix revient sur la création du géant de la musique, Spotify

Implantée en Suède, les protagonistes phares de la structure qui a révolutionné l’industrie au début des années 2000, racontent un à un leur histoire des faits. Nous commençons alors la saison avec le fondateur de la plateforme dans l’épisode 1, puis “l’industrie musicale” personnifiée par le PDG de Sony à Stockholm dans le 2, suivi de l’avocate en 3, du codeur dans le 4, de l’investisseur en 5, et nous cloturons l’histoire avec l’artiste dans le 6ème épisode final. Chaque épisode pose un décor, une opinion, un point de vue sur la manière dont chacun a apporté sa pierre à l’édifice de ce géant de la musique. Par ce choix, le réalisateur permet en additionnant les diverses subjectivités de chaque protagoniste, de donner une réalité générale objective. Ainsi, chaque histoire racontée à travers les yeux d’un personnage, nous donne une analyse globale sur la création et sur l’ancrage de ces nouveaux processus d’aborder la musique dès les années 2000.

Pour nombre de lecteurs de cet article, nous sommes nés avec Spotify, et toutes les plateformes qui en ont découlé par la suite. Musique instantanée, répertoire infini, gratuité des contenus… nous avons grandi avec la discothèque entière du monde au bout des doigts, et sans limite. Accessibilité et rapidité, tels étaient les maîtres-mots qui ont porté le projet des fondateurs de Spotify tout du long de leurs réflexions: la série retrace les difficultés rencontrées par tous les membres de l’équipe car à cette époque, il y avait tout un monde à révolutionner, ou plus précisément, un secteur à faire évoluer avec son temps, en passant indéniablement par la digitalisation des techniques de production.  A commencer par la diffusion de cet art et ses différentes formes de consommation; en effet, le réalisateur plante le décor avant Spotify, avec Pirate Bay, les réels pionniers de cette digitalisation musicale, basé sur le téléchargement gratuit (mais surtout illégal) des musiques. Nous nous rappelons encore tous de quelqu’un de notre entourage qui téléchargeaient illégalement des dizaines de fichiers, de la musique en passant par les films, à une époque où cette pratique était (presque) considérée comme normale.

L’avènement d’un secteur industrialisé et numérisé 

Rapidement, les industries comprennent que cette ère de téléchargement illégale en masse n’était pas durable, d’un point de économique et surtout culturel. Dès lors, une suite de condamnations déferle sur Pirate Bay à partir de 2009, qui va jusqu’à être interdit d’utilisation dans certains pays. A cette époque Spotify profitait de cette porte ouverte sur un tout nouveau monde et poussait le projet un peu plus loin: réunir en un seul espace la totalité des œuvres musicales du monde instantanément et gratuitement, où chaque acteur du secteur y voyait une part de rémunération. Le constat est simple: l’industrie se numérise, le marché du disque s’effondre, les méthodes de consommation des publics se transforment, le globe se mondialise, et Spotify devient rapidement l’une des plus influentes plateformes de streaming au monde, légale, tout genre et pays confondus. 

Résultat d’une étude de marché fine dirigée par une équipe de « génies » comme ne cesse de le répéter l’un des co-fondateurs de l’entreprise dans la série, Spotify était non seulement novateur sur son domaine, mais aussi un tout nouveau processus de création-production-diffusion pour la musique qui s’est créé avec eux. L’avènement de la technologie au sein de l’industrie n’est pas né dans les années 2000, mais il n’a cessé de s’accroître au rythme des nouveautés autour de nos sociétés.

Paradoxalement, Spotify est depuis quelques temps dans une controverse qui vient déstabiliser tout son système économique et prouver une fois de plus que l’industrie ne cesse de se transformer: nombre d’acteurs du secteur musical critiquent le manque de considération des artistes dans la chaîne de rémunération de la plateforme, provoquant de fortes contestations auprès d’artistes colossaux comme Taylor Swift qui en 2017 avait retiré tous ses titres de l’application:  « Je ne veux pas que mon travail contribue à une expérimentation qui d’après moi ne dédommage pas suffisamment les auteurs, les producteurs et les artistes. Je ne suis pas d’accord pour cautionner l’idée que la musique n’a pas de valeur et doit être gratuite » (T. Swift, Interview Yahoo Music, 2017). 

Une nouvelle ère du stream?

Dans la même problématique, d’autres plateformes ont par la suite du revoir leur système économique, comme Apple Music, en voyant l’émergence de nouvelles plateformes de streaming arriver comme Napster et Tidal, avec des business plans plus favorables à la valorisation des artistes et l’utilisation de technologies d’écoute à la pointe de l’innovation. Nous pouvons voir plus récemment des alternatives émerger de façon encore plus créative sur le marché: en juin 2022 apparait Marine Snow, une plateforme de streaming créée par Tony Lashley, l’ancien responsable marketing des opérations chez Blonded (le site internet de Frank Ocean).

Interface mobile de la plateforme Marine Snow

Là où un artiste gagne 0,004$ par stream sur Spotify (qui doit obligatoirement être plus long que 30 secondes sinon il n’est pas compté), l’inventeur de Marine Snow propose un autre système d’écoute. Il explique que « la valeur d’une chanson ne devrait pas être basée sur le nombre de lectures qu’elle obtient »; en d’autres termes, cette plateforme paierait les artistes en ne se basant pas sur les streams, mais sur un cycle de 90 jours de titres exclusifs, soit l’équivalent de 500 000 streams Spotify. L’objectif de ce système est que  l’artiste reçoive à la fin un salaire fixe peu importe le nombre de streams, en plus de développer une communauté de fans plus forte que sur d’autres plateformes. En effet, Marine Snow s’inspire des principes de « quête » que nous retrouvons dans le monde des jeux vidéos, où les membres sont amenés à rechercher des « capsules » qui contiennent des morceaux aléatoires, auxquelles ils accèdent en collectant des « éclats de pierres précieuses » gagnés en écoutant de la musique et en lisant des résumés de titres. Les membres peuvent aussi gagner d’autres récompenses en collaborant entre utilisateurs sur le long terme.

Marine Show prouve une fois encore l’évolution fulgurante du secteur musical qui associe ici la créativité et la rentabilité, offrant une toute nouvelle expérience du stream et trouve des solutions alternatives aux problèmes soulevés par les artistes sur des plateformes dites plus « classiques » comme Spotify. Cependant, le concept même de ce type de plateforme peut effrayer un utilisateur qui souhaite simplement écouter un titre et ne serait donc pas du goût de tout le monde: ici Marine Snow demande un certain “engagement” de l’utilisateur, régi par des règles, des bonus, et des astuces que l’on retrouve comme dans un jeu vidéo. Les créateurs de la plateforme expliquent ce choix en soulignant la nécessité de remettre au coeur du processus le lien social entre les fans et les artistes, car au delà des chiffres et des algorithmes se trouvent des artistes qui partagent leurs oeuvres et des humains qui les écoutent.

Clara Douet

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