Au Théâtre des Champs-Élysées, Giselle ou la danse malgré la guerre
Le Ballet national d’Ukraine est régulièrement invité au théâtre des Champs-Élysées pour assurer le ballet classique des fêtes de fin d’année mais cette année, sa venue revêt, bien évidemment, un sens particulier.
Initialement, la compagnie devait interpréter Casse-Noisette, ballet de Noël par excellence, trop rarement dansé en France mais finalement retiré de l’affiche, en raison de sa partition composée par un Russe. La pertinence de cette décision laisse quelque peu perplexe dans la mesure où la musique de Tchaïkovski possède une dimension universelle et où, on peut aisément imaginer que, vivant à notre époque, le compositeur n’aurait pas été dans les petits papiers du tyran du Kremlin. Point de Casse-Noisette ni de Reine des neiges programmé par la suite mais annulé en raison des conditions difficiles de répétition, ce sera donc Giselle, ballet romantique par excellence.
Chorégraphié initialement en 1841 par Jules Perrot et Jean Coralli sur un argument de Théophile Gautier, Giselle est repris par Marius Petipa en 1887 qui crée sa version pour le théâtre du Mariinski. C’est cette version que nous découvrons. La première partie semble un peu minimaliste dans sa mise en scène et sa chorégraphie, resserrée sur l’essentiel, le drame qui se joue entre Giselle, Albrecht et Hilarion. Les danses des amies ont de charmantes intonations slaves mais la scène de la folie mériterait plus d’engagement et nous laisse sur notre faim.
La deuxième partie est d’un autre niveau avec un très bel acte blanc, parfaitement maitrisé par les danseuses du corps de ballet. L’étoile Kateryna Alaieva, à la danse précise moelleuse, interprète une Giselle tout en émotion et en retenu tandis qu’Oleksii Potomkin, compose un Albrecht élégant et désespéré, sur le chemin de la rédemption. Le trio qu’ils forment avec Iryna Borysova la reine des Willis, est particulièrement convaincant. L’ensemble est de grande qualité et on regrettera que l’orchestre Prométhée ait donné à la partition d’Adolphe Adam, quintessence du romantisme français, des accents de fanfare. Malgré leur actualité dramatique, les artistes du Ballet national d’Ukraine nous ont offert une parenthèse de grâce. The show must go on. Merci à eux.
Stéphanie Nègre
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