“Les Sœurs Papilles” : deux bulles de champagne pour chanter en chœur la féminité festive
Au Lucernaire, dans la petite salle du Paradis située tout en haut, deux magiciennes nous offrent un petit bijou de spectacle musical en concoctant devant nos yeux des saynètes coquines et amusantes, où la séduction et le corps des femmes est subtilement mis à l’honneur. Un féminisme pétillant et festif, conçu et interprété par Anne-Laure Bonet et Cléo Sénia sur des chansons signées Jean-Marie Sénia.
Elles sont deux, presque jumelles tant elles se ressemblent, et ont en commun un sacré talent, un corps parfait, et une vivacité dans la séduction qui ne peut laisser indifférent. Avec leur look de garçonnes des années 1920, leur bas résilles et leur corset surmonté de plumes, Anne-Laure Bonet et Cléo Sénia ont tout des films muets du début du 20° siècle ou la Loulou de Pabst, belle, insouciante et perverse Louise Brooks, impose avec provocation sa vision définitive de l’amour libre. À deux, le jeu prend davantage d’ampleur et de fantaisie puisqu’à l’instar du sel et du poivre, des Sœurs Jumelles, chanson du film Les Parapluies de Cherbourg de Jacques Demy, les Sœurs Papilles se font les messagères de la sensualité, de l’impertinence et de l’érotisme, reprenant les combats des féministes d’autrefois, comme les Dolly Sisters matinées du style cabaret des revues des Folies Bergère ou des Ziegfeld Follies.
“Il a mon corps…tiens ? Mais jamais n’aura mon cœur, s’il m’aime très fort/ Il n’aura que ma fleur/ Il se gliss’ra dans mes beaux draps/ F’ra des prouesses de Gigolo” entonnent-elles en cœur, au fil de chansons délicieusement écrites par Jean-Marie Sénia et accompagnées au piano par Mathieu Balanant ou Florent Sénia. Chansons grivoises, libertines et libertaires à la gloire de la femme et de l’amour, chansons poétiques et ludiques qui s’amusent avec le poivre, le gingembre et l’effeuillage de l’artichaut jusqu’à son cœur, mais aussi qui revendiquent la tolérance et le respect, tout étant sujet à savourer la vie. Des courtes séquences de cinéma muet, voyages en paquebot ou conte oriental chez un sultan, nous plongent dans l’exotisme d’un rêve éveillé dont les héroïnes butinent les délices. Sous les lumières de Franck Thévenon, les deux jeunes femmes redoublent de délicatesse et de grâce, en évitant toute vulgarité. Un vrai régal !
Hélène Kuttner
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