Rencontre avec les galeristes Alex Vaysse et Hélène Geber de la Galerie Sono
Alex Vaysse, ancien architecte, accompagné d’Hélène Geber, deux passionnés, ont ouvert la galerie Sono, il y a tout juste un an, dans le 1er arrondissement de Paris. Depuis, les deux galeristes donnent à voir des expositions axées sur les thèmes du vivant, de la nature, de l’écologie. Dans un lieu où l’on se sent bien dès les premières secondes, insensible au brouhaha parisien, Alex et Hélène nous ont parlé de leurs aspirations.
Pouvez-vous présenter votre parcours ?
Je m’appelle Alex Vaysse. Après des études d’architecture, j’ai travaillé en tant qu’architecte à New-York pendant dix ans. Il y a trois ans, je suis venu m’installer en France. On a monté ce projet avec Hélène. L’idée était de créer une galerie qui parle de notre rapport avec la nature et notre environnement.
Je m’appelle Hélène Geber. À la suite d’une licence en droit privé, je me suis dirigée vers une licence professionnelle en droit du patrimoine. C’est à ce moment-là que s’est révélé mon intérêt pour l’art. Même si j’ai toujours été amatrice, je me suis rendu compte que je ne trouverai ma place que dans un univers comme celui-ci. Après ma licence, je suis venue vivre à Paris et j’ai intégré l’IESA spécialisation Art Contemporain. J’ai alors travaillé à la galerie en alternance et on a commencé, avec Alex, à modeler notre ligne artistique. Le vivant et l’environnement sont des sujets qui nous touchent particulièrement et nous défendons l’idée de les mettre en valeur à travers l’art.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’être galeriste ?
Hélène : J’ai toujours rêvé de faire un métier qui me plaise, qui me fasse vibrer tous les jours. C’est une réelle passion qui s’est transformée en profession. D’aussi longtemps que je me souvienne, j’ai toujours rêvé d’être galeriste ; c’est presque comme un rêve de petite fille.
Alex : Avec un père passionné d’art, j’ai toujours été entouré de belles choses. Par mon métier d’architecte, je me suis intéressé à la conception de l’espace et en arrivant en France, j’ai voulu combiner les deux. Je trouve que ce sont deux univers qui sont en synergie. Il y a une vraie interaction entre le monde de l’art et l’architecture. J’ai été élevé avec cette idée que l’art créer des liens entre les gens. Je souhaitais alors ouvrir un lieu où l’on peut discuter de sujets importants tout en travaillant avec des artistes. Je pense que l’art à un gros rôle à jouer.
Dans cette envie d’échanger avec l’autre, réalisez-vous des conférences, des rencontres avec les artistes ?
Nous développons des temps forts pendant nos moments d’expositions avec des tables rondes. Dans le cadre d’une exposition qui aura lieu à la rentrée, Eden avec des œuvres de l’artiste peintre Mauro Bordin, nous allons organiser deux événements. Notamment animer un débat sur des thématiques liées à l’environnement, à la place de l’humain dans celui-ci tout comme à la pratique de l’artiste. Nous voulons que la galerie prenne une place dans le quartier, devenant un lieu où les gens ont envie d’échanger. Nous voulons être acteur de tout cela et créer du lien avec d’autres acteurs du marché de l’art, comme nous l’avons fait avec Sustainable art Market, une agence d’Annecy avec qui nous avions monté trois expositions en collaboration. Nous allons également participer à la résidence Maritima créée par la curatrice Elena Posokhova en tant que membres du jury pour sélectionner les artistes. Cet événement aura lieu au bord de la Méditerranée et traitera de l’impact climatique sur les territoires maritimes. Ce sont des discussions qui sont importantes puisque ce sont des zones fragiles qui font partie des premières zones touchées.
En 2021, vous étiez présent à la foire Art Paris dans le secteur Promesses dédié aux jeunes galeries de moins de six ans d’existence. Cette expérience vous a-t-elle permis d’avoir cet échange avec les différents acteurs culturels ?
Oui ! Pour nous, c’était une expérience vraiment enrichissante. La thématique de cette édition était tournée vers l’art et l’environnement ce qui nous a apporté un public qui se sentait concerné par ces sujets. Cet événement nous a permis de faire notre entrée en grande pompe dans le monde de l’art alors que personne ne nous attendait et personne ne nous connaissait. Nous avions une proposition très différente de ce qu’on a l’habitude de voir en foire. Notre stand était vraiment un lieu d’échange. L’art est sensible, le travail de Vincent Laval l’est d’autant plus, et nous avons ressenti que les gens étaient touchés. C’était un bonheur de discuter avec les visiteurs et de voir, pour nous comme pour l’artiste, que les pièces vont perdurer dans des collections de gens qui sont touchés par ce qu’ils reçoivent. Les gens n’étaient pas frileux et étaient positivement étonnés de voir ce genre de pièces à Art Paris.
Et quels liens entretenez-vous avec les artistes que vous exposez ?
Nous fonctionnons beaucoup à l’énergie que l’on peut s’échanger. Nous découvrons un travail intéressant sur un écran et échangeons avec la personne afin de la rencontrer, de voir les pièces et de ressentir tout ça. Pour tous les artistes avec qui nous avons travaillé jusqu’à maintenant, il y a toujours eu cette dimension affective, sensible, vraiment une relation qui se crée. Dans le cadre de l’exposition « Fragments » de l’année dernière, nous avions réuni neuf artistes et tenions vraiment à ce qu’ils se rencontrent avant l’exposition, le temps d’un dîner à la galerie. À force de discuter avec eux, nous nous sommes rendu compte qu’ils sont seuls dans leurs ateliers et qu’il est assez rare qu’ils se rencontrent.
Est-ce que vous pouvez nous présenter votre exposition du moment ?
Mémoire Écorcée est une exposition personnelle de Lélia Demoisy. Cette artiste a l’habitude de travailler avec des matières naturelles, notamment les arbres avec lesquels elle crée des formes hybrides entre animal et végétal. Sa pratique est centrée sur la sculpture, généralement monumentale, bien qu’elle développe son travail à travers différentes pratiques. Lors d’une résidence en Patagonie en 2019, elle a abordé la technique de la sérigraphie avec une série intitulée Usnea barbata qui reprend des lichens qui existent dans cette région du monde. Lélia a également travaillé avec des feuilles d’arbres dans la série Inertie Végétale sur lesquelles elle a réalisé une impression à anthotype. Elle utilise aussi la photographie pour rendre compte de l’évolution de ses installations en peupliers sculptés avec Témoignage de la belle mort. Différents pans de son travail qui s’associent à merveille dans cette exposition. Nous y découvrons alors une forme d’animalité qui ressort dans son travail, on a l’impression que les pièces vont prendre vie sous nos yeux. Lélia Demoisy a également réalisé des sérigraphies avec « Adventices » où apparaisse des formes réalisées aux tampons qu’elle est venue déposer sur le papier. L’artiste érige ses mauvaises herbes comme un papier peint et revêt ici une dimension plus décorative, assez différente de ce qu’elle a l’habitude de produire. Lélia Demoisy est une artiste qui touche-à-tout et c’est ce que nous vous proposons de découvrir au fil de cette exposition qui se termine le 30 juillet prochain.
Nous exposons également le travail de Fabrice Cazenave. Des panneaux et du tissu ont été récupérés et donnés à l’artiste qui s’en est servi pour créer une fresque et des dessins aux fusains, à l’eau de javel et au plâtre. Vous pourrez découvrir son travail dans deux espaces accolés à la galerie.
D’autres projets en cours ou à venir dont vous souhaiteriez nous parler ?
L’exposition Eden en co-commissariat avec Pauline Lisowski présentera le travail philosophique, symbolique et absurde de l’artiste peintre italien Mauro Bordin. Un monde post-apocalyptique présenté de façon joyeuse et décalée. Rendez-vous à partir du 2 septembre à la Galerie Sono pour découvrir cette exposition.
Rendez-vous également le 16 septembre pour une table ronde sur les œuvres et le travail de Mauro Bordin avec l’historien de l’art et commissaire d’exposition Paul Ardenne et en présence de l’artiste.
Plus d’informations sur la galerie & son Instagram.
Propos recueillis par Marie Coindeau-Mattei
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