Lise Stoufflet : “L’artiste est une personne sensible, qui absorbe les énergies de son époque”
A la frontière entre le réel et l’imaginaire, l’univers artistique de Lise Stoufflet est un mélange de surnaturel, de mystérieux et d’onirique. Rencontre avec une artiste à l’imagination débordante et dont l’œuvre fascine.
Pouvez-vous nous parler de vos débuts dans le monde artistique et de votre parcours ?
Ayant grandi dans une famille qui évolue dans les milieux scientifiques et médicaux, j’ai d’abord fait un cursus classique jusqu’à l’obtention d’un bac S. C’est seulement en terminale que j’ai découvert qu’il existait des filières artistiques et qu’il était possible de se diriger dans cette voie. J’ai décidé de faire une école préparatoire dans ce domaine avec la naïveté de quelqu’un qui ne connaissait rien à l’art contemporain, mais qui adorait dessiner, peindre, bricoler et inventer depuis toujours. Après deux ans de prépa, je suis rentrée à l’École des Beaux-Arts de Paris où j’ai étudié pendant 5 ans, jusqu’à l’obtention de mon diplôme en 2014. A l’issue de ma formation, j’ai eu plusieurs expériences d’ateliers précaires avant de monter une association avec une dizaine d’anciens étudiants des Beaux-Arts de Paris pour développer le projet d’Atelier Le Houloc, depuis installé à Aubervilliers.
Depuis 2014, je continue ma pratique artistique à plein temps.
Comment décririez-vous votre univers artistique ?
C’est toujours délicat pour moi de décrire verbalement un univers construit sur un langage qui passe par l’image. La peinture, c’est pour moi une exploration du monde, des sensations et des idées qui le composent.
J’aime voir mes peintures comme des sortes de rêveries. Plus on peut y projeter des choses, plus ça m’intéresse. L’émotion recherchée varie d’une peinture à l’autre mais j’aime qu’elle procure une sorte de trouble.
Comment se passe votre processus créatif ? Quel est le rôle de la couleur dans vos peintures ?
Mon processus créatif est finalement assez instable. La partie la plus compliquée est la recherche d’idées. Parfois elles surgissent, parfois il faut chercher, regarder, se nourrir. Ces idées, je les élabore d’abord en dessins, dans des carnets, puis souvent, je les transpose à l’encre de chine, étape lors de laquelle je travaille la composition de manière plus poussée. Enfin, je passe à la peinture et à la couleur. La couleur a un rôle très important, c’est la dernière balance de l’atmosphère qui se dégagera de la toile. Chaque peinture est un petit monde autonome, qui fait écho à notre monde, notre société, les événements qui surgissent dans une vie ou dans l’actualité.
Où puisez-vous votre inspiration ? Avez-vous des courants artistiques ou artistes qui ont influencés vos œuvres ?
J’ai toujours eu une attirance pour les limites du réel : des histoires de fantômes aux univers parallèles. On retrouve dans mon travail cette volonté d’échapper au monde tel qu’on pense le connaitre. Mais j’ai aussi des champs d’intérêt plus terre à terre, comme les relations humaines, les relations à la nature et toutes les grandes problématiques actuelles de nos sociétés et de leurs évolutions. L’actualité m’inspire plus qu’on ne peut l’imaginer au premier abord.
Vous avez exposé en février dernier à la galerie La peau de l’ours en Belgique pour “Échappée” et exposez actuellement dans deux lieux : au MAC Lyon ainsi qu’à la galerie Marguerite Milin. Pouvez-vous évoquer en quelques lignes ces deux projets ?
L’exposition à la galerie La Peau de L’Ours à Bruxelles est une exposition dont le commissariat a été fait par Elodie Bernard, qui a sélectionné des pièces déjà existantes pour élaborer son propos autour du terme “Échappée”.
En parallèle, la superbe exposition du MAC Lyon “Comme un Parfum d’aventure” a été prolongée jusqu’à juin. J’ai été invitée par Marilou Laneuville et Matthieu Lelièvre à créer une pièce spécialement pour l’exposition. J’ai donc réalisé une toile autour de laquelle on peut tourner et qui représente le chemin d’un personnage qui tente de sortir d’une pièce fermée. Cette œuvre s’inscrit dans la partie de l’exposition qui parle de l’impossibilité de déplacement – de forte résonance donc avec la période actuelle.
Je participe aussi à l’exposition “Ils ont dit oui” à la galerie Marguerite Milin à Paris. Je suis ravie d’avoir été invitée par Marc Molk à présenter une petite peinture aux côtés d’une sélection d’artistes dont j’aime beaucoup le travail.
Selon vous, quelle est la responsabilité de l’artiste ou de l’art face à son environnement, son époque, à la société ?
Selon moi, l’artiste est une personne sensible, qui absorbe les énergies de son époque. Il a le temps et donc le devoir, de s’informer, de réfléchir et d’analyser les événements du monde. Qu’il le veuille ou non, il est un vecteur de ces analyses et ce qu’il crée doit pouvoir être vu au regard de son époque. Je ne crois pas vraiment à une analyse trop littérale ou facile des œuvres mais je suis plutôt partisante de quelque chose de plus complexe.
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Propos recueillis par Ludivine Losfelt
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