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Manon Pretto : “Demain est synonyme de potentialité”

Elise Arnaud 24 février 2021
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Manon Pretto

©Johanna Medyk ©Malak Yahfoufi

Rencontre avec Manon Pretto, candidate pour le Prix ICART Artistik Rezo 2021. La jeune artiste utilise tout particulièrement les images et le numérique pour déconstruire et interroger les questions d’identités inhérentes à notre société actuelle.

Peux-tu te présenter ?

J’ai commencé par un BTS Communication Visuelle – Édition publicité puis j’ai passé 5 ans à l’École Supérieure d’Art de Clermont-Ferrand. J’ai principalement développé une pratique autour du numérique et des images mais j’utilise aussi des médiums plus spécifiques comme la gravure laser, l’impression 3D ou la broderie numérique.

Peux-tu nous parler de ta pratique artistique ?

Ma pratique est tournée vers l’univers de la science-fiction, elle est pensée pour un environnement à prédominance urbaine et contient un aspect politique fort. J’explore les frontières entre le corps et l’image et je m’intéresse beaucoup aux facteurs sociaux de communication et d’identité. J’ai beaucoup travaillé sur l’errance et la façon dont nous nous adaptons à un environnement de plus en plus surveillé et contrôlé. Pour cela j’ai créé des objets protéiques aux allures futuristes permettant de se soustraire et de résister à un monde en constante évolution. 

Vue d’exposition

Vue d’exposition, 2020 © Manon Pretto

 Que souhaites-tu que le public retienne de tes œuvres ?

L’ensemble de mes projets ont un fort aspect politique qui joue avec les formes ambiguës d’oppression et de résistance, cependant je ne cherche pas à affirmer mais à poser des questions. Je crois que si le visiteur rentre chez lui mais cherche à prendre conscience des images qui l’entoure je suis ravie. Je veux avant tout ouvrir des espaces de dialogues et faire réfléchir le public sur son rapport et sa perception du monde qui l’entoure.

 L’œuvre ou série dont tu es la plus fière ?

Certainement Beyond qui est un travail en cours en collaboration avec l’artiste Niloufar Basiri. Il s’agit d’un laboratoire de réflexion sur les privilèges identitaires et leurs rapports de domination. Mon passeport français me permet de me rendre partout dans le monde en particulier à New York, là où le passeport iranien de Niloufar Basiri l’en empêche et fait d’elle une persona non grata. Je suis donc partie en résidence à New York et à la manière d’un cheval de Troie j’ai emmené son patrimoine génétique, ses réflexions et ses questions de façon à lui faire passer cette frontière en déjouant le système. Beyond est une installation évolutive sur ces questions liées aux disparités sociales et à l’identité.

« Beyond », Installation, 2020 © Manon Pretto

Quelles sont tes références ?

Pour tout ce qui concerne les questions liées à l’identité numérique mais aussi aux frontières entre le public et le privé, le duo d’artiste Émilie Brout & Maxime Marion. Je dirais également Anne Imhof cette fois-ci pour sa capacité à jouer avec les dispositifs de surveillance et d’oppression en intégrant performeurs et visiteurs. J’aime tout particulièrement l’esthétique et l’univers créé autour de ses performeurs qui « habitent » et deviennent captif de l’espace au même titre que le public. Enfin, Sondra Perry pour son travail autour de la corporalité des machines, Alexandre Bavard pour son travail du motif qui est très important dans ma pratique. Et bien sûr de nombreuses références filmiques comme Ghost In The Shell ou Mad Max.

Sur quoi travailles-tu en ce moment ?

Sur le corps augmenté, le corps numérique ou le corps image. J’ai beaucoup exploré les codes et la matérialité du numérique mais, cette fois, j’ai envie de donner une vie autonome aux images, une vraie « corporalité ». Je veux pousser à l’extrême ce qui se passe aujourd’hui pour anticiper un futur probable et faire réfléchir sur toutes les potentialités de demain.

La crise sanitaire m’a également conduite à affirmer mes questionnements sur les mécanismes de discriminations sociales, car nous avons bien vu que le virus frappait avec plus de violence les personnes dans la précarité. J’ai donc envie de penser des projets qui s’intègrent véritablement au sein de cette société, et du territoire, pour m’approcher au plus près d’un espace commun de pensée.

Target - Manon Pretto

« Target », Vue d’installation, 2020 © Manon Pretto

Avec quel(s) artistes aimerais-tu exposer un jour ?

 Il y en a beaucoup, mais je n’ai pas un nom précis à donner. Je crois que cela dépend plus du projet d’exposition ou de l’engagement du curateur. Il est très important pour moi d’intégrer des projets qui me parlent et s’articulent autour de mes problématiques. J’attache aussi une grande importance aux lieux dans lesquelles je peux exposer, car chaque œuvre a un contexte qui lui est propre et dans lequel elle peut s’intégrer ou non.

 Qu’est-ce que “Demain(s)” t’inspire ?

J’utilise les codes de la dystopie et de la science-fiction dans mes projets. Je veux expérimenter et fonctionnaliser ce terrain de jeu. Demain est pour moi synonyme de potentialité, parce que je vais pouvoir le déconstruire et l’explorer.

Propos recueillis par Elise Arnaud


Découvrir le travail de Manon Pretto sur son site Internet et sur Instagram Suivre sa participation au Prix ICART Artistik Rezo

Exposition collective en ligne du 5 au 7 mars

Remise des Prix dimanche 7 mars à 15h30

Modalités d’accueil du public susceptibles d’évoluer en fonction des contraintes gouvernementales (précisions et mises à jour en ligne)

Un événement organisé par des étudiants de l’ICART, l’école du management de la culture et du marché de l’art

 

À découvrir sur Artistik Rezo :

Prix ICART Artistik Rezo 2021, de Vanessa Humphries

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