Le monopole des couleurs
Comment Anish Kapoor, Yves Klein et d’autres artistes ont-ils pu obtenir les droits exclusifs sur l’utilisation d’une couleur spécifique ?
Lorsque l’on parle de bataille sur les monopoles de couleurs, viennent très vite les noms d’Anish Kapoor et Stuart Semple. Anish Kapoor est le seul artiste autorisé à utiliser la couleur Vantablack, une couleur développée par une société britannique spécialisée en satellites qui ne reflète presque aucune lumière. En réponse à ce monopole, Stuart Semple a lui inventé une nouvelle couleur : le rose le plus rose du monde. Il a interdit à Kapoor d’acquérir son pigment et a obligé les acheteurs à signer une déclaration légale attestant qu’ils n’étaient pas affiliés Kapoor, de quelque manière que ce soit. La bataille était alors engagée.
Comment un artiste peut-il détenir les droits exclusifs d’utiliser une couleur ? Comment peut-il y avoir un monopole sur une couleur ?
Dans de nombreux pays, une couleur peut être enregistrée en tant qu’un signe de marque, tout comme un logo. C’est le cas du rouge de Coca Cola, du bleu de Tiffany & Co, du marron d’UPS et du rouge de Ferrari, pour n’en citer que quelques-uns. La couleur acquiert alors une signification secondaire, le grand public identifie la marque par sa couleur, qui devient un signe distinctif .
Ce monopole de la couleur par les marques est en revanche limitée à des fins et à des utilisations commerciales très spécifiques qui sont définies dans la loi. Mais qu’en est-il des artistes ? Peuvent-ils interdire l’utilisation d’une couleur ? La réponse à cette question réside dans le droit des brevets ; différent du droit des marques, un brevet ne protège pas nécessairement la propriété de la couleur elle-même. Un brevet accorde plutôt au propriétaire des droits de propriété exclusif sur l’invention, sur le processus de la création de la couleur ou sur la composition qui crée la couleur finale. Par conséquent, la société qui a inventé la couleur Vantablack a les droits exclusifs sur les matériaux, sur la formule pour créer cette couleur. Ils détiennent aussi le droit d’exclure quiconque de l’utiliser.
C’est exactement ce qu’Yves Klein avait fait dans les années 1960 pour sa fameuse couleur “International Klein Blue”. Yves Klein avait alors obtenu le brevet pour le processus de création de cette couleur avec le fournisseur d’art Edouard Adam à Paris. Aujourd’hui encore, pour pouvoir utiliser la couleur International Klein Blue on doit passer par le magasin d’Edouard Adam qui se situe à Montmartre.
Baran Cengiz
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