Mark Daovannary : “Je manie l’animisme propre à l’enfance”
Mark Daovannary est un artiste plasticien aux influences multiculturelles. À travers ses œuvres, il anime les différentes matières qu’il utilise en nous invitant à renouer avec notre “moi” enfant.
Pourriez-vous vous présenter et expliquer votre parcours ?
Plasticien basé à Paris, j’ai commencé mes études supérieures en design d’espace et j’ai poursuivi ma formation aux Arts Décoratifs de Paris dans le secteur Art Espace dédié à la sculpture et l’installation. Un parcours mêlant art et design où les rencontres ont nourrie ma démarche artistique. J’ai découvert des matériaux innovants avec des ingénieurs, l’artisanat du bambou en Inde, les discussions méditatives auprès d’un sculpteur japonais, et j’ai réalisé mon échange à la School of Visual Arts de New York.
Vos sculptures se caractérisent, entre autres, par une originalité des formes, des matières. Poésie et mythes se mélangent et séduisent les spectateurs.
Est-ce qu’il y a un fil rouge entre vos œuvres ? Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Je m’interroge sur la substance du vivant en explorant deux notions complices : la nature et la culture. J’appréhende l’énergie et la conscience de cette dualité, je joue avec leur perception.Un objet inerte et une montagne endormie ont une histoire à raconter. Une identité. Entre alchimie, science et anthropologie, je leur donne corps, vie, mouvement, les métamorphose et les personnifie. Je manie l’animisme propre à l’enfance.
Je trouve l’inspiration dans les contes, la poésie, l’histoire, les films, quand j’écoute mon voisin. Ces découvertes résonnent en moi comme les premiers émerveillements de l’enfance.
Vous avez grandi au sein d’une famille multiculturelle : comment ça a influencé votre travail ?
Avant de transmettre en tant qu’artiste, j’avais besoin de faire un travail introspectif, j’étais attaché à la citation “Connais-toi toi-même”. Comment cerner ses origines et son histoire sans pour autant y avoir complètement accès ? J’ai travaillé sur le lien entre l’héritage de mes ancêtres asiatiques et mes racines en banlieue parisienne.
J’ai par ailleurs compris qu’il n’y avait pas qu’une seule manière de transmettre. On peut aller au-delà du langage. Par exemple, mon père disait souvent “cocori cocoboy” quand j’étais enfant : je ne comprenais pas ce que ça voulait dire mais à travers son intonation, je savais que c’était positif et ça me faisait rire. Même sans comprendre les mots, on peut ressentir des émotions. J’essaie de retrouver cette dimension instinctive dans mes œuvres.
Est-ce qu’il y a un message que vous essayez de transmettre avec votre travail ou alors vous envisagez l’art comme une occasion de quête de soi-même, comme une recherche intime et individuelle ?
Qui n’a pas voulu animer des objets quand il était enfant ? Cette capacité à imaginer a tendance à se perdre en grandissant. J’ai l’impression qu’on accorde plus de place au “comment” et à la rationalité quand on est adulte. J’essaie de renouer avec l’âme de l’enfance et je recherche la dimension magique des matériaux qui passe par des “choses” simples.
Quel rôle a l’art pendant la période de crise inédite comme celle qu’on vit maintenant ? Quel est votre quotidien en tant qu’artiste confiné ?
L’art fédère, il a le pouvoir de provoquer des émotions et de transcender le langage. Peu importe les différences sociales et culturelles, il égaie le quotidien, le rend plus sensible et plus coloré pour tout le monde.
Pendant le confinement, j’ai lu sur internet une citation qui résume bien le rôle de l’art : “If you think artists are useless, try to spend your quarantine without music, books, poems, movies, paintings and porn.” De mon côté j’en ai profité pour lire des livres d’artistes que j’adore : Irving Penn, Malick Sidibé… et pour cuisiner devant des émissions culinaires.
Vous vous concentrez uniquement sur la sculpture ou vous explorez aussi d’autres médiums ?
J’explore différents médiums et supports, avec la crainte de ne pas réussir dans mes expérimentations. C’est là que je trouve toute ma motivation, l’envie, l’enjeu, un éventail d’émotions qui implique des bonnes et… des mauvaises journées.
Vous avez récemment gagné le prix du public lors de la 12e édition du Prix Icart Artistik Rezo. Quels sont vos projets pour le futur ?
Je viens de rejoindre des amis dans un nouvel atelier. Je prends le temps de m’installer et de préparer la prochaine expo en juillet, si le contexte sanitaire le permet.
Plus d’informations sur Mark Daovannary sur sa page Internet
Propos recueillis par Violagemma Migliorini
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