Hannibal Renberg : “Ce n’est pas parce qu’on à l’appareil le plus sophistiqué de la terre que l’on va faire des photos dont on est heureux”
Basé principalement à Paris et à Marseille, Hannibal Renberg parcourt les rues des villes à la recherche d’un instant de vie à photographier.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Alors, je ne me suis jamais vraiment considéré comme un photographe professionnel, dans la mesure où je n’en ai jamais vraiment fait mon métier. Ça a toujours été un plaisir pour moi, depuis que je suis tout jeune. De plus, je suis de la génération argentique, donc j’en ai beaucoup fait dans ma jeunesse. Je faisais les tirages, et je dois dire que ça me prenait beaucoup de temps, j’ai surtout pu le faire quand j’étais étudiant. Par la suite j’ai un peu arrêté les tirages, et je suis passé au numérique. Je n’ai d’ailleurs jamais vraiment appris, ça m’est venu comme ça, ce que je sais a été acquis avec l’expérience. Ensuite, j’ai du arrêter la photo pendant un petit moment pour travailler et gagner ma vie car vivre uniquement grâce à la photographie, ce n’est pas toujours facile. Je m’y suis remis de façon plus intense et plus quotidienne au début d’Instagram, lorsque ce n’était encore qu’un réseau uniquement dédié à la photographie. Et aujourd’hui, ça fait 7 ans que je ne travaille plus qu’avec mon portable.
Pourquoi être passé au portable pour faire de la photographie, quels en sont les avantages ou inconvenants ?
J’ai toujours aimé la photo de rue, ce qu’on appelle la street photo et toute cette mouvance de photographes de rue avec par exemple Doisneau. J’aime marcher, la rue, et les photos volées. Les avantages c’est qu’on l’a toujours sur soi. Au départ je le faisais vraiment juste comme ça, sans savoir comment ça pouvait rendre au niveau du tirage puisque ce ne sont pas non plus des appareils photo très sophistiqués. Et très vite on m’a proposé de faire une première exposition. J’ai alors commencé à faire quelques tirages à ce moment-là. Ce que j’ai aimé aussi avec le portable c’est de revenir à quelque chose de très simple, où la technique finalement n’a pas grande importance. De plus, je n’aime pas particulièrement travailler avec de grands objectifs ou zooms. J’aime être particulièrement près des sujets que je prends en photo. Et encore une fois je ne suis pas un grand technicien de la photo, donc ça me convenait plutôt bien. Et puis avec les progrès de ces petits appareils finalement, on se rend compte qu’on peut faire des choses vraiment intéressantes, enfin en tout cas dans ce que je fais. J’ai toujours pensé que le support n’était pas très important, ce n’est pas parce qu’on à l’appareil le plus sophistiqué de la terre que l’on va faire des photos dont on est heureux !
Qu’est-ce qui vous plaît dans le quotidien des gens que vous photographiez ?
Je vis principalement à Paris et à Marseille. Mais ce qui me plaît, je dirais que c’est tout ce qui ce passe dans la rue, je suis plutôt un citadin, j’aime les villes ! Après je n’ai pas particulièrement de favoris, j’aime Paris parce que c’est une belle ville et que je la connais un peu, et quand on connait bien on à parfois un regard plus aiguisé. J’aime les lieux où il y a de la vie, où il y a des gens. Et surtout j’aime marcher, aller me promener et je pense que c’est important lorsqu’on fait de la photo de rue.
Pouvez-vous nous décrire votre processus créatif, comment cela ce passe une fois dans la rue ?
Alors il y a deux choses, d’abord il y a des balades que je m’organise pour allez faire uniquement de la photographie, je me mets dans un mode un peu reporteur de rue. Après c’est vrai que l’avantage du téléphone portable c’est qu’on l’a toujours sur soi, donc si quelque chose se présente, on est prêt. Je peux donc être amené à faire des photos sans vraiment l’avoir décidé à l’avance. Et je pense que ça dépend aussi de l’inspiration, d’un état d’esprit et certaines fois ce ne sera pas le bon jour et c’est comme ça. Mais je n’ai pas de règles précises, enfin j’ai quand même besoin d’être seul, ça me permet d’être constamment en alerte par rapport à ce qui m’entoure.
Lorsque vous vous baladez dans la rue, les personnes que vous photographiez se laissent-elles facilement prendre en photo ?
Et bien je suis un voleur d’images, donc c’est évident que les personnes que je photographie ne s’en rendent pas compte ou alors que très rarement. Et puis maintenant je dois avoir acquis un peu de dextérité et de rapidité à force de le faire, et c’est ce que demande la photo de rue, on n’a pas forcément le temps de faire plusieurs clichés.
Est-ce que vous considérez votre photographie comme un témoignage d’une époque ?
Personnellement, je n’intellectualise pas trop les choses, puisque d’un côté la photo est quelque chose de complexe, c’est à la fois une vérité et un mensonge. Mais c’est aussi bien sûr un témoignage d’un moment, d’une époque de par la publicité et où les téléphones portables sont des éléments très présents dans mes photos. De plus ont ne s’habille pas non plus de la même façon aujourd’hui qu’il y a vingt ans. Mais c’est aussi plus qu’un témoignage je pense, puisque la poésie de la rue, de la vie, des gens est en quelque sorte intemporelle. Et je pense que c’est un peu pour cette raison que je travaille beaucoup en noir et blanc. Je trouve que le noir et blanc apporte un petit côté intemporel qui me plaît beaucoup.
Une ville que vous aimeriez aller photographier ?
Il y a beaucoup de villes que j’aimerai photographier, et visiter. Je pense par exemple à celles de l’Afrique du Nord, des villes très colorées où je pourrais m’exercer à la photographie en couleur. Et la nouveauté aussi est intéressante parce que ça aiguise un œil en permettant de découvrir une nouvelle lumière et de nouvelles couleurs. Mais au final je pense que toutes les grandes villes m’attireraient, comme New York par exemple. Après certaines m’attirent plus que d’autres, principalement des villes où les gens se déplacent beaucoup à pied. Et pour terminer je dirais que ce qui est bien aussi avec la photo de rue c’est que c’est toujours nouveau, on a jamais la sensation d’avoir fait le tour.
Selon vous, quelle est la finalité de la photographie, s’il y en a une ?
Et bien personnellement j’ai besoin de faire de la photographie, ça m’est essentiel. C’est donc pour moi un besoin un peu égoïste, puisque je l’associe à la balade, l’observation, la prise de vue. Après, le résultat qu’il en sort, si ce sont des photos dont vous êtes heureux, c’est quelque chose de merveilleux. Avec la photo de rue je pense qu’il y a une finalité de témoignage. Et puis ce que j’aime aussi, c’est le côté émotion, lorsqu’une photo raconte une histoire et qu’elle ouvre des perspectives, ce n’est pas seulement montrer une photo et dire “voilà”. Il faut provoquer de l’émotion, faire rire, faire pleurer.
Pour un photographe de rue, comment s’est passé le confinement ?
Alors c’était un peu frustrant. Mais du coup ça m’a permis de repasser sur ce que j’ai déjà fait, d’anciennes photos et d’être plus dans le regard de ce que j’ai fait avant. Mais c’est vrai que cela a été un petit peu dur pour moi, ça m’a beaucoup manqué.
Avez-vous de futurs projets ?
J’ai la chance de faire régulièrement des expositions. J’en ai refait une au mois de novembre, et c’est intéressant car cela permet d’échanger, de montrer son travail. Mais ce qui me plairait beaucoup, je pense, serait de faire un livre car j’aime beaucoup ce support pour la photo.
Un mot pour la fin ?
C’est toujours difficile de parler de son travail, mais pour moi la photo est d’abord un plaisir que j’ai toujours eu en moi. Après, vient évidement le partage. Je pense qu’il faut aussi garder cette sensation de plaisir qui est parfois difficile à conserver, surtout aujourd’hui avec les réseaux sociaux, avec le regard un peu omniprésent des autres. Il faut essayer de ne pas perdre son âme, de rester soi-même, de rester qui l’on est. Et puis je pense qu’il ne faut pas se retenir de faire ce que l’on aime car la barrière entre photographe pro et amateur est flou. Et aussi, parfois, essayer de faire des tirages, de ne pas toujours rester sur des supports informatiques.
Retrouvez Hannibal Renberg sur son site internet et sur son Instagram.
Interview réalisée par Lou Vendé
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