Skio : “Comment intégrer l’homme dans l’espace urbain ? “
Skio, street artist polyvalent, s’interroge sur la place de l’homme dans le paysage urbain, souvent hostile et inconfortable.
Quel a été votre parcours ?
Mon nom d’artiste est Skio, j’ai commencé les graffiti à 16 ans environ et maintenant ça fait plus de vingt ans. J’ai débuté le graffiti sans savoir ce que c’était : juste pour dessiner dans la rue. On m’a expliqué ensuite que ce n’était pas bien, que c’était interdit.
À partir de là j’ai commencé à m’y intéresser, à en apprendre les codes ; j’ai trouvé un nom et des endroits où peindre dans les rues de Nice, ma ville d’origine. Petit à petit j’ai rencontré des gens qui faisaient ça aussi et en parallèle j’ai commencé des études de graphisme à Toulon où j’ai rencontré des passionnés de graffiti. C’est à travers eux que j’ai appris cette culture. J’ai commencé en les filmants, puis en peignant avec eux. En outre, dans ces-années-là, il n’y avait pas encore de festival, il y avait des “jams”, c’est-à-dire des rassemblements de graffeurs qui se déroulaient souvent dans des endroits désaffectés, comme des anciennes casses.
On se rassemblait là et, à un certain moment, pour changer un peu de métrage, j’ai voulu faire un dessin, un personnage. Mon travail a tellement plu que je me suis spécialisé un peu plus dans l’illustration, dans les fresques. Je travaillais ça à l’école et puis je le reproduisais sur les murs, ou l’inverse. C’est comme ça que j’ai appris l’art urbain.
J’ai intégré plusieurs collectifs, d’abord à Nice et ensuite à Paris, où je suis arrivé il y a douze ans, j’y ai créé des happenings urbains illégaux appelés Rue-stick. Je donnais un lieu et j’invitais des artistes qui venait avec leurs créations : à un moment donné on choisissait une rue et on affichait tous nos créations. Un peu comme une exposition mais dans les rues de Paris, complètement free. Cet évènement a eu une espèce de buzz.
Vous êtes également le créateur de Riofluo. Vous pouvez nous parler de ce collectif ?
Riofluo est un collectif, au début on travaillait dans le graphisme pour tout type de client. Le buzz qu’il y a eu lors des happenings dans la rue nous a permis d’attirer beaucoup de visibilité, au point qu’un jour on nous a proposé de travailler pour la fédération française de tennis. Il a été notre premier client avec Riofluo. On a créé un évènement dans Bercy entre chaque match de tennis pour que les gens voient des artistes en train de peindre, que le public s’essaye au graffiti, participe à du body-painting, à des expositions dans l’enceinte de Bercy.
Tout cela nous a emmené d’autres clients et on s’est rendu compte que Rue-Stick, un événement illégale avec des artistes passionnés, nous a propulsé aussi dans l’évènementiel, pour travailler avec des entreprises en utilisant l’art urbain comme outil de médiation.
En parallèle de tout ça, on a créé un service d’aide dédié aux artistes urbains pour capter tous les appels à projets et de les rediffuser aux artistes, ce service s’appelle EasyAap.
Dans vos dernières œuvres le corps est toujours présent mais jamais en entier, vous représentez que des détails. Quel est votre démarche artistique ?
Pour moi un artiste est quelqu’un qui fait de la recherche. Si on regarde mon travail depuis vingt ans, on voit qu’il y a beaucoup de styles qui se sont succédés. En effet, dans cette nouvelle série j’essaye de synthétiser dans des formes géométriques simples, l’environnement urbain qui nous entoure. Le fond qu’il y a sur ce nouveau style c’est un peu comme de l’architecture simplifiée.
Ensuite, je travaille sur l’intégration de l’homme dans l’espace urbain qui nous entoure, qui est souvent très froid, géométrique, carré. Je me suis donc demandé quelle était la place de l’humain à l’intérieur de ça.
C’est pour cela que les regards sont enlevés des corps qui sont partiellement représentés. Et c’est aussi pour inviter à perdre soi-même son regard dans l’œuvre et donc répondre sur ce questionnement individuellement.
Vous ne vous limitez pas aux murs. Comment vous choisissez vos spots ?
Je me suis plus recentré sur des projets organisés, où je suis invité par des collectivités.
Les volets par exemple, c’était à Bruxelles : les commerçants nous avaient demandé de repeindre tous leurs stores. Il y a aussi des murs légaux ou tolérés à Paris où on peut peindre.
Plus d’informations sur Skio sur son site internet.
Propos recueillis par Violagemma Migliorini
Articles liés
« Les Misérables », une nouvelle production brillante au Théâtre du Châtelet
Plus de quarante ans après la première création en français, l’opéra d’Alain Boublil et de Claude-Michel Schönberg revient au Théâtre du Châtelet dans une nouvelle version et une mise en scène de Ladislas Chollat. Quarante interprètes dont des enfants...
“Moins que rien” : l’histoire de Johann Christian Woyzeck adaptée au Théâtre 14
L’histoire est inspirée de l’affaire de Johann Christian Woyzeck (1780-1824) à Leipzig, ancien soldat, accusé d’avoir poignardé par jalousie sa maîtresse, Johanna Christiane Woost, le 21 juin 1821. Condamné à mort, il a été exécuté le 27 août 1824....
La Scala présente “Les Parallèles”
Un soir, dans une ville sans nom, Elle et Lui se croisent sur le pas d’une porte. Elle est piquante et sexy. Lui est hypersensible et timide. Il se pourrait bien que ce soit une rencontre… Mais rien n’est moins sûr, tant ces deux-là sont maladroits dans leurs...