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Noëmi Haire-Sievers : “Nous laissons beaucoup de liberté d’expression à nos artistes”

© Noëmi Haire-Sievers

Retour sur 90 ans de célébration avec Noëmi Haire-Sievers, responsable de la programmation culturelle de la Fondation des États-Unis.

Bonjour Noëmi, la Fondation des États-Unis fête ses 90 ans cette année. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce centre culturel et ses résidences ?

La Fondation des États-Unis (FEU), inaugurée le 28 avril 1930, est située à la Cité internationale universitaire de Paris (CiuP) dans le 14ème arrondissement de Paris. Elle a été construite par l’architecte Pierre Leprince-Ringuet grâce à un couple d’Américains francophiles, Homer et Mabel Gage, qui ont investi une partie de leur fortune et levé des fonds pour permettre la construction de cette résidence et de son magnifique Grand Salon art déco où ont lieu la plupart de nos événements. Il y a 270 chambres, incluant un étage d’ateliers d’artistes et de studios de musique, ces derniers toujours dans le style et avec l’insonorisation 1930.

© Noëmi Haire-Sievers

La FEU a pour double mission de participer au développement de la vie étudiante et de promouvoir les échanges culturels franco-américains, comme le souhaitait le couple Gage. Chaque année la FEU attribue environ cinq bourses à des étudiants américains en art et musique et à un interne français, suisse ou américain en psychiatrie. C’est une amie des fondateurs, Harriet Hale Woolley, qui a légué une partie de sa fortune à la FEU afin de permettre à de jeunes américains de poursuivre un projet d’études en France. Tous les artistes en résidence sont sélectionnés sur dossier et participent activement au programme culturel.

Vous avez de nombreux musiciens et danseurs en résidence, quel impact le confinement a-t-il sur leur production artistique ?

C’est en effet un moment compliqué pour eux. Comme pour tous les étudiants, la fermeture de leur école crée beaucoup d’incertitudes sur la validation de leur année scolaire, souvent liée à un récital ou à une exposition. A la FEU, ils ont la chance de pouvoir continuer à pratiquer dans leurs studios sur des créneaux horaires un peu plus restreints que d’habitude.
Je suis pleine d’admiration pour eux parce qu’ils se réinventent en créant du contenu pour les réseaux sociaux, en participant à divers projets avec nous ou leurs écoles, ou simplement en utilisant ce temps pour perfectionner des œuvres de musique ou créer, dans tous les sens du terme.

© Juli Estrada

Comment gérez-vous le contact avec les résidents et le public en cette période particulière ?

Normalement chaque musicien se produit lors d’un récital Printempo, la série de concerts de fin d’année. Nous essayons de garder le lien avec le public en proposant le Lunchtime Live les jeudis à 12h30 et un replay un dimanche sur deux à 17h, l’heure du Rendez-vous Musical. Ils me disent que ces projets les motivent dans cette période où ils voient tous leurs concerts annulés.
C’est pareil pour les artistes qui devaient participer à des expositions, notamment en lien avec les 90 ans, mais nous les proposons autrement. Par exemple, cette semaine il y aura une visite virtuelle des studios en 2D et 3D, un projet de Maximilien Grémaud, un de nos artistes en résidence et deux de ses amis.

Avec la crise sanitaire liée au covid-19, la Fondation s’est adaptée et propose de nombreux évènements en ligne. Comment gérez-vous l’organisation de ces évènements à distance ?

Comme le lien avec les artistes et musiciens en résidence est établi depuis le début de l’année académique, et dans certains cas depuis plusieurs années, nous arrivons à nous organiser en jonglant tous les canaux de communication !
Le contact humain me manque, mais ces projets me donnent le sentiment d’être connectée et en connexion autant avec le lieu qu’avec l’équipe et les résidents. Et comme j’aime voir les côtés positifs dans chaque situation, celle-ci nous pousse à être créatifs, à innover, à nous questionner, à être patients et à garder le calme et le sourire.

© Juli Estrada

La Fondation des États-Unis s’est associée à d’autres maisons universitaires pour organiser le parcours Art-Hop-Polis, pourriez-vous nous expliquer ce projet ?

En temps normal, Art-Hop-Polis est un afterwork artistique qui a lieu le premier mercredi de chaque mois. Les visiteurs passent d’une maison et d’un vernissage à l’autre, en prenant un petit verre et en discutant avec les artistes. L’idée vient du First Friday à Philadelphie, où Anne Crémieux, l’une des directrices de la FEU a vécu et profité de ce moment pour faire le tour des galeries d’art.
C’est un projet que je coordonne au niveau du campus tous les mois et pendant le confinement, avec mon collègue Jacques Heilman de la Maison des étudiants suédois, nous avons lancé l’idée d’un art hopping virtuel tous les mercredis à 19h sur les réseaux sociaux. Nous sommes entre quatre et six maisons à participer chaque semaine, le parcours débute sur la page Art-Hop-Polis.

Pourriez-vous nous parler plus de vous ? Quel a été votre parcours pour devenir responsable de la programmation culturelle ? En quoi consiste votre rôle au sein de la Fondation ?

Je suis irlandaise-allemande, cela surprend souvent. J’ai une longue histoire d’amour avec la CiuP parce que j’y ai vécu lors de mon année Erasmus. Je n’aurais jamais pensé que j’y retournerais dix ans plus tard dans le cadre de ma vie professionnelle.
J’ai fait des études de langues et cultures et mon Master en Créativité, littérature et film m’a mené à un début de carrière dans l’industrie du cinéma, toujours dans des fonctions incluant un côté atelier/formation et événementiel.
J’ai intégré l’équipe de la FEU en 2015. J’y ai la double fonction de Responsable de la programmation culturelle et des relations internationales. Je m’occupe donc en plus du centre culturel de la communication et des partenariats study abroad. Aucune journée ne se ressemble jamais, c’est très riche comme expérience.

Comment procédez-vous pour organiser des évènements à la Fondation ? Quels sont vos choix de programmation ?

Notre programmation est largement centrée autour des artistes et musiciens en résidence, ainsi que nos alumni. Marqués par leur temps en tant que résidents, ils sont de plus en plus nombreux à nous contacter avec de beaux projets et l’envie de revenir. Nous leur laissons beaucoup de liberté d’expression, même s’il y a bien sûr un certain cadre.
Il y a également trois compagnies en résidence artistique : Love Labo (ateliers DbD, performance art), l’Ensemble Calliopée (concerts, masterclass) et Althea Dance Company (atelier et spectacle de danse contemporaine, résidence d’été).

© Juli Estrada

Nous accueillons par ailleurs régulièrement des conférences et lectures autour de la culture et de la civilisation américaine en partenariat avec des écoles et universités et organisons un cycle Medical Cultures en lien avec nos boursiers en psychiatrie.

Et enfin, un dernier mot pour que nos lecteurs et nos lectrices puissent célébrer avec vous l’anniversaire de la Fondation ?

 Je vous invite à nous suivre sur les réseaux sociaux pour découvrir toutes les publications depuis le mardi 28 avril. Nous avons dévoilé notre nouveau logo, publié un album d’images des studios d’artiste de 1930 à aujourd’hui, un poème écrit par Hope Curran pour la FEU, un film d’animation créé par Libéral Martin et Suejin Jung et 90 Words For FEU, un projet photo qui rassemble 90 images de mots.
Comme je disais plus tôt, il y aura le Open Studios virtuel le mercredi 6 mai à partir de 19h et le mardi 5 mai, un Live from the US avec Sarah Ghandour, ancienne résidente, avec laquelle je collabore sur un concert pour les 90 ans qui mettra à l’honneur plusieurs générations de compositeurs et musiciens alumni. Nous serions très heureuses de vous accueillir en vrai pour ce concert à la rentrée.

Toutes les informations sont à retrouver sur le site de la Fondation des États-Unis.

Propos recueillis par Marie Le Balc’h

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