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Evita au Poche-Montparnasse, fascinante

11 décembre 2019
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Épouse du président argentin Juan Perón, Evita fut à la fois adulée et honnie de son vivant puis elle devint une icône dès 1952, date de sa mort alors qu’elle a 33 ans. Le comédien et danseur Sebastian Galeota la ressuscite avec tout son mystère sur une partition scintillante.

Pour faire exister Eva surnommée Evita, il fallait parvenir à faire briller ses nombreuses facettes, allant de l’expérience de la pauvreté à une ambition sans limites. Grâce au texte de Stéphan Druet et à l’interprétation de Sebastian Galeota, la gageure d’une ambiguïté enjôleuse est relevée. La personnalité multiple de cette femme hors du commun est tout au long du spectacle subtilement présente, entrelaçant son sens du calcul à son authentique soif de justice, son goût du luxe à sa véritable révolte face à la misère et son amour du pouvoir tout autant que son pouvoir de se faire aimer. La prestation de Sebastian Galeota, lui-même argentin, est une formidable réussite. Homme jouant une femme, le jeu du comédien est si teinté de puissance et de séduction que l’on est conquis, absorbé par cette figure légendaire qui a marqué l’histoire de l’Argentine.

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Quasi immobile durant tout le spectacle, Sebastian Galeota est vêtu d’une robe blanche tellement opulente qu’elle est presque un monument de mousselines et de voiles dont le bustier est rehaussé d’un collier de strass. La gestuelle de ses bras évolue dans une stylisation sensuelle, sa coiffure impeccable à la blondeur lisse et son visage sophistiqué ont l’élégance de celle qui voulait à tout prix bâtir sa réussite sans état d’âme quant à l’usage de ses atouts physiques. La voix est riche en intonations chaudes, les modulations sont variées, l’accent envoûte et le rythme est musical, nourri d’ailleurs de chansons. Le metteur en scène qui est l’auteur lui-même, Stéphan Druet, restitue l’univers troublant de cette véritable magicienne du pouvoir, qui parvint à atteindre une popularité de son vivant que beaucoup d’hommes politiques pourraient lui envier et qui est aujourd’hui présente sur les billets de banque en Argentine.

Dans un tempo alerte ponctué d’humour et d’esprit, le spectacle retrace avec justesse la vie d’Evita qui fut actrice avant de devenir la femme du Président Perón, élu en 1946. On y découvre les étapes de son ascension et on suit avec précision son rôle et son influence directe sur l’évolution de son pays. Aucun des événements clés n’est laissé de côté et l’on sent même la toile de fond des cartes géopolitiques mondiales d’alors. La méthode de  projection des documents d’époque est une simple et belle trouvaille. Le charisme ambigu d’Evita est rendu avec brio, en maintenant avec talent une vivacité et un flamboiement de l’urgence, comme si la brièveté de ce destin d’exception couvait sous la gloire.

Emilie Darlier-Bournat

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