Rencontre avec Ismaël Joffroy Chandoutis, lauréat du prix Icart Artistik Rezo 2019 !
C’est pour son film Ondes Noires réalisé en 2017 qu’il a obtenu le Prix du Jury Icart Artistik Rezo. Nous sommes donc allés rencontrer ce jeune artiste et lauréat du Prix Icart Artistik Rezo 2019 pour en savoir plus !
Dans son film, Ismaël Joffroy Chandoutis présente une société ultra connectée où les ondes ont envahi presque tous les espaces, appuyé par le témoignage de trois personnes intolérantes aux radiations électromagnétiques. Ce film avait d’ailleurs reçu de nombreuses récompenses en 2018.
Que représentait pour vous ce sujet et comment avez vous rencontré ces personnes aujourd’hui exclues de notre société ?
La première fois que j’ai entendu parler de ce symptôme, c’était dans un article du Monde datant de 2014, qui évoquait la création du premier refuge anti-onde en Europe à Zurich. J’avais lu beaucoup d’articles contradictoires sur la véracité de ce symptôme. Comme je suis de nature curieuse, j’ai un jour décidé, sans plus de raison, de rencontrer le fondateur du refuge, Christian Schifferle pour une interview. C’était en janvier 2016. Quand je l’ai rencontré, avec les autres habitants du lieu, je n’ai plus eu aucun doute. En écoutant leurs récits de détresse, Ça m’a tellement touché que j’ai eu l’idée de faire un film là-dessus.
Je crois savoir que les personnes interviewées étaient de nationalités diverses. Avez-vous ressenti un rapport et une présence des ondes différentes selon les pays ?
Non mais par exemple en suisse il n’y a plus de réseau terre pour téléphoner. On doit forcément passer par une connexion internet, ce qui implique une présence systématique d’ondes, là où un téléphone classique peut fonctionner même sans électricité.
Quels effets ont eu ces rencontres et ce travail sur votre usage d’objets connectés ?
Il m’est difficile de m’extraire complètement de tout appareil à ondes puisque c’est indispensable dans mon travail. Néanmoins, je fais toujours attention au DAS du téléphone que j’achète et je mets systématiquement mes écouteurs pour téléphoner. Chez moi, pas de micro ondes, pas de linky, ma box est éteinte la nuit tout comme mon téléphone. Et je n’ai pas d’autres appareils connectés dans ma maison. Avant, je ne faisais pas attention à tout ça.
Vous avez une manière très particulière de filmer et de représenter nos habitudes, ainsi que le monde face aux ondes, des ondes qui habituellement sont pour nous abstraites. Que cherchiez-vous à nous faire ressentir ?
C’est un film qui prend le temps. Les plans sont ralentis mais ont aussi des durées assez longues. Il y avait l’idée de scanner le réel, de saisir un peu mieux sa complexité. Dans les reportages, les plans ne durent jamais plus de deux secondes… Cette temporalité permet aussi de mieux focaliser sur la narration sonore, qui est au coeur du film.
Un des enjeux majeurs étaient de faire percevoir au spectateur le cauchemar que subissait ces personnes. Sauf qu’on ne ressent bien évidemment pas tous les ondes. Se pose alors la question de la représentation de l’invisible. J’ai tout de suite pensé à puiser dans l’imaginaire, les rêves… Quelque chose qui me semblait juste d’aborder avec l’animation pour contraster avec le régime d’image du réel. Mon intention plastique était tordre le réel progressivement, ou plutôt l’image et le son qui le représente. Je voulais que l’image et le son saignent par le biais de distortions, d’artefacts numérique, comme s’ils étaient attaqués et contaminés par les ondes..
Vous avez depuis « Ondes Noires » réalisé le film « Swatted », cette fois sur la menace du cyber harcèlement. Quels sont vos futurs projets ?
Des projets de courts et de longs, des films hybrides et de l’animation. Peut-être aussi une performance… Je suis en pleine expérimentation !
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