Dans Les Plis du Paysage : Patrick Bock et Bruno Fontana à la Galerie Exit Art Contemporain
Pour ce mois de la photo, la galerie Exit Art Contemporain nous propose une exposition sur le thème du paysage. Cette galerie boulonnaise, créée en 2006 par Maria Giovanna-Gilotta et Florence Provost, fait le lien entre l’actualité parisienne et la vie artistique périphérique à la capitale.
Si le paysage est le thème autour duquel l’exposition s’articule, c’est en réalité le point de départ d’une réflexion sur l’esthétique de la photographie elle-même, qui se joue autour de cette collaboration.
Deux artistes et un dialogue autour de la photographie
Patrick Bock, artiste de la Galerie Exit Art Contemporain depuis près de trois ans, présente un travail très abouti. On peut donc admirer de magnifiques photographies prises en chambre photographique de 4 x 5 pouces, avec temps de pause, du bout du Cap Corse, en période hivernale. Pour exprimer l’essence des sujets, il capte la fusion du ciel et de la mer, sans que rien ne vienne perturber celle-ci. D’une simplicité essentielle, plongeant l’image dans une abstraction quasi totale, il combine l’art minimaliste et conceptuel, ne conservant que l’air et l’eau. Si les couleurs peuvent sembler surréalistes par moment, il n’effectue pourtant aucune retouche sur ses clichés.
Patrick Bock aime brouiller les pistes. Semblable à une peinture de Rothko, il se dégage parfois de ses clichés une impression de pastel. Pourtant, il s’agit bien de photographie. En effet, ses photos aux couleurs oniriques ne sont pas le résultat de ce que l’œil perçoit, mais ce que l’appareil capte pendant le long temps de pause. Nous sommes ici face à l’impression pure, à une manifestation du sensible, tel que l’homme ne peut le percevoir physiquement. Seule une contemplation permet cela. Le photographe supprime donc toute distraction dans l’image et la réduit à la pure forme, laissant alors place aux nuances et aux lumières.
La photographie comme espace pictural à part entière
À l’antithèse de cette technique classique, Bruno Fontana est à l’origine d’un travail plus conceptuel. Photographe plasticien, il cherche constamment la réappropriation de la photographie. En autodidacte, qui explore les sujets, les supports et les techniques, il propose ici des récits contemporains, dans lesquels il manipule le paysage. En multipliant les médiums, il donne naissance à des œuvres singulières.
Bruno Fontana parle des gens sans nécessairement les montrer, que ce soit en retirant toute construction humaine dans le paysage – ne laissant qu’un résidu blanc et faisant ainsi ressortir la main de l’homme sur son environnement – ou encore en créant une fenêtre ouverte sur une mer imprimée sur tissus. Il s’en dégage une certaine poésie, un enchantement.
On ne peut pas nier que le dialogue s’installe entre ces deux artistes dont l’exposition se déroule sur deux étages. Il existe entre eux une sensibilité réciproque. Si l’un se place d’avantage dans le contemplatif d’après une technique plus classique et l’autre dans un contexte plus conceptuel à travers une pluralité de médium, tous deux questionnent la photographie comme un espace pictural à part entière qui offre toute une palette de possibilités. Leurs démarches, bien que différentes, sont toutes deux très abouties. Que ce soit à travers la recherche ou la constance, ces deux artistes vont au bout des choses, et cela fonctionne parfaitement.
Tifenn Chaminand
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