L’art en rue libre
Rue Libre ! 10e édition Du 15 au 29 octobre 2016 Les différentes étapes : Le 15 octobre à Bessines (Nouvelle Aquitaine – 87) Le 16 octobre à Luxey (Nouvelle Aquitaine – 40) Le 17 octobre à La Rochelle (Nouvelle Aquitaine – 17) Le 19 octobre à Lyon (Rhône-Alpes – 69) Le 21 octobre à Rennes (Bretagne – 35) Le 23 octobre à Baule (Centre Val de Loire – 45) Le 26 octobre à Sète (Occitanie – 34) Le 29 octobre à Paris (Île-de-France – 75) |
Pour sa 10e édition, Rue Libre ! se tiendra du 15 au 29 octobre 2016. Un parcours d’événements dédiés à la liberté d’expression dans l’espace public. Rencontre avec Lucile Rimbert, présidente de la Fédération nationale des arts de la rue, organisatrice de la mobilisation. Qu’est-ce que Rue libre ? Rue Libre ! invite tout au long du mois d’octobre à une réappropriation citoyenne et collective des rues et des places pour construire ensemble une société ouverte, humaniste et fraternelle. Une Marianne géante donnera rendez-vous à chaque étape pour des déambulations festives ou des banquets citoyens. Au programme des actions spontanées et [mani]festives : spectacles, performances, démonstrations de savoir-faire, rencontres, prises de paroles… Une pluralité de formats, à l’image de la richesse des arts de la rue. Marianne, tout un symbole ! Construite collectivement par les artistes de rue de toute la France, symbole de L’Art Est Public !, cette Marianne va parcourir plusieurs villes. Cette métaphore de la République au visage pluriel va prendre vie, s’animer et semer des gestes artistiques sur son passage. Emancipée des représentations actuelles qui lui collent à la peau, elle va entrer en résistance contre l’actuel climat anxiogène et sécuritaire. Un slogan mobilisateur, des actions [mani]festives, un symbole fort… Au-delà d’une fête nationale, Rue libre ! est un temps fort de revendications ? En effet, la fédération nationale travaille à une meilleure [re]connaissance des arts de la rue. La plus populaire, après le cinéma, cette pratique culturelle s’adresse à tous, participant de cette façon de la mixité des publics et à la rencontre. Les arts de la rue se caractérisent par la pluridisciplinarité (cirque, théâtre, danse, musique, chant, installations plastiques, sonores et visuelles, performances, déambulations…). Soit 3 000 spectacles disponibles en diffusion chaque année. Et notre fédération rassemble plus de 550 adhérents individuels et structures au sein de 12 fédérations régionales. Parmi nos derniers combats menés et gagnés : la mention de « dispositifs adaptés » pour mettre en valeur les œuvres dans l’espace public (Loi LCAP – 2016). Rue Libre ! est ainsi l’occasion de réaffirmer les libertés d’expression, de création et de circulation dans l’espace public car, sans cela, ce sont nos métiers, nos pratiques et l’offre culturelle qui sont menacés. Ainsi, nos démarches artistiques soulèvent des problématiques sociales et politiques qui concernent l’ensemble des citoyens. Rue libre ! fête ses 10 ans. Quel bilan depuis le lancement de cette opération ? Au départ, cette démarche collective des professionnels des arts de la rue a été menée dans 21 régions de France pour un temps fort sur 25 heures qui correspondait au passage à l’heure d’hiver. Histoire de remettre les pendules artistiques à l’heure ! En 2015, des « préalables » ont permis d’élargir les débats. Cette année, Rue libre ! s’étend du 15 au 29 octobre, avec un parcours d’événements sur tout le territoire. Depuis la première édition parrainée par Jacques Higelin, nous avons impliqué des élus, mais nous nous sommes aussi ouverts à l’international (Canada, Burkina Faso, Grèce, etc.). Et concernant l’expression artistique dans l’espace public ? L’état d’urgence contraint les manifestations dans l’espace public à des décisions sécuritaires allant à l’encontre des formes artistiques libres que nous prônons. Travaillant au juste équilibre entre l’artistique, l’habitant et la sécurité, les professionnels des arts de la rue sont aujourd’hui reconnus comme spécialistes de l’intervention dans l’espace public. Or, les spectacles de rue sont malmenés, déplacés, redimensionnés, voire annulés. Concrètement, quelles en sont les conséquences pour les professionnels ? Ces mesures sécuritaires induisent un surcoût qui fragilise encore plus nos professions, dans un contexte global de réduction des subventions. C’est l’artistique ou l’emploi, au sein de nos compagnies, qui en pâtissent. Le Ministère de la Culture a bien mis en place un fonds d’urgence, au lendemain des attentats de novembre 2015. Mais au Festival d’Aurillac, par exemple, les 300.000 € de budget consacrés à la sécurité sont toujours en attente d’une prise en charge. « Construire ensemble une société ouverte, humaniste et fraternelle. » Quelles alternatives proposez-vous pour préserver la libre expression dans l’espace public ? Les arts de la rue ne gênent pas le fonctionnement « normal » d’une ville. Au contraire, nous participons à l’attractivité touristique, au dynamisme commercial, et nous renforçons la convivialité en recréant du lien dans l’espace public. De la même façon, nous attendons de travailler en meilleure concertation avec les pouvoirs publics pour continuer à exercer nos activités « normalement ». Faire jouer dans un stade une compagnie présentant à la base une déambulation dans la rue, pose problème. Imposer des barrières, avec multiples fouilles, pour un concert dans un quartier piétonnier semble inadapté et disproportionné. Cela soulève aussi de multiples questions liées au respect des libertés constitutionnelles. Comment faire entendre vos voix ? Rue libre ! est l’occasion de mieux faire connaître ces enjeux. Ensuite, au sein de groupes de travail, nous réfléchissons ensemble sur la maîtrise des risques. Un préfet « hors sol » nommé par le Ministère de la Culture et celui des Affaires Etrangères réfléchit actuellement à ces questions. Il est important de suivre ses préconisations pour éviter une réglementation trop contraignante et liberticide. Enfin, chaque cas est particulier. Nous souhaitons effectivement une meilleure prise en compte de chaque contexte. La responsabilité est « partagée » entre les services de l’Etat, les maires, les professionnels des arts de la rue et les spectateurs. Ainsi, des pistes se dégagent comme une décharge de responsabilité signée par chaque spectateur. Mais nous insistons sur nos compétences et expériences afin de trouver les solutions les mieux adaptées. Entretenez-vous des liens avec le Street Art ? À ce jour, la Fédération nationale des arts de la rue et les artistes de Street Art ne travaillent pas directement ensemble, mais nous sommes pour le décloisonnement. De plus, nous avons une convergence de luttes. En effet, nous avons en commun de travailler dans des lieux non dédiés spécifiquement à l’art. Nous exploitons et valorisons le patrimoine public. Et nous œuvrons à ré-enchanter le monde ! Cette célébration des 10 ans coïncide avec des enjeux importants, à quelques mois de l’élection présidentielle ! Un Manifeste réaffirmant les droits culturels fondamentaux sera remis aux citoyens et aux politiques. Une façon de les interpeller à la veille de ces enjeux politiques. Quel avenir est souhaitable pour les arts de la rue et le « vivre ensemble » dans l’espace public ? Un libre accès aux espaces publics. Être libre de se promener. Libre d’inventer. Libre d’assumer l’inquiétude et de lui opposer la confiance. Une ville ouverte à la création artistique, à la liberté d’expression et au partage. Fraterniser dans le plaisir et par l’intelligence. Partager nos différences dans l’égale émotion et l’égal émerveillement que procure l’art. Au niveau du gouvernement, un engagement fort. Ainsi, en Italie, en guise de réponse à la barbarie, le Premier ministre Matteo Renzi investit un euro dans la culture, pour chaque euro consacré à la sécurité. Bref, davantage de courage politique ! Oui, mais la politique nous concerne tous. Pas seulement les élus ! Encore une fois, notre responsabilité est partagée pour continuer de pouvoir exister ensemble. Sarah Meneghello [Photo à la une :© Who Nose / Photo 1 : © Jean-Michel Coubart / Photo 2 : La Marianne géante © Fédération nationale des arts de la rue / Photo 3 : Affiche © Fédération nationale des arts de la rue / Photo 4 : © Jean-Luc Prévost / Photo 5 : Pôle Nord © Droits réservés] |
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