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Les mystères d’Osiris dévoilés à l’IMA

5 octobre 2015
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Osiris, mystères engloutis d’Égypte

Du 8 septembre 2015 au 31 janvier 2016
Tous les jours sauf lundi, de 10h à 19h

Le vendredi de 10h à 21h30


Samedi et dimanche de 10h à 20h

Tarifs : de 10,50 à 15,50 €

Réservation en ligne

Institut du Monde Arabe
1, rue des Fossés Saint-Bernard
Place Mohammed-V
75005 Paris

M° Jussieu
(lignes 7 et 10)

www.imarabe.org

Du 8 septembre 2015 au 31 janvier 2016

Cette exposition en fascinera plus d’un ! Ceux pour qui le nom d’Osiris renvoie aux souvenirs d’une civilisation passionnante, mais aussi ceux que l’idée de la découverte d’une ville entière engloutie fait fantasmer. Et cette ville, Thônis-Héracléion, nous dévoile des témoignages inédits sur une cérémonie secrète appelée les Mystères d’Osiris, qui se déroulait sous les descendants d’Alexandre le Grand. L’Institut du Monde Arabe nous propose rien de moins qu’une véritable immersion.  

Nous sommes au nord de l’Égypte, en baie d’Aboukir. Là, à 7 kilomètres de la côte actuelle et sous environ 6 mètres d’eau, gît une ville baptisée Thônis par les Égyptiens et Héracléion par les Grecs. Elle a disparu des radars de l’histoire au VIIIe siècle de notre ère suite à un tremblement de terre ou un raz-de-marée fulgurant qui a emporté également sa voisine, Canope, sise à 3,5 kilomètres. Et ce n’est qu’en 2001 que les plongeurs de l’équipe de l’Institut européen d’archéologie sous-marine (IEASM) lui ont redonné sa place dans l’histoire.

Au temps de sa splendeur, Thônis était un port important, la seule porte d’entrée des navires de l’Égypte, c’est-à-dire un poste douanier taxant tous les produits entrant et sortant du pays des pharaons. La glorieuse Alexandrie – fondée par Alexandre le Grand en 331-332 avant notre ère – lui ravira ce rayonnement, ville située un peu plus à l’ouest dans le delta mais sur un sol plus stable.

 
Osiris est aussi le dieu de la renaissance
Les fouilles sous-marines sont venues confirmer la richesse et la puissance de Thônis, mais ce n’est pas tout. L’archéologue Franck Goddio nous raconte : “Les fouilles de différents sanctuaires comme ceux d’Amon Gereb, de Khonsou l’enfant, d’Osiris et de Khonsou-Thot ont dévoilé des informations précieuses sur les pratiques religieuses en ces lieux. Pendant toutes nos missions, nous avons été frappés par l’omniprésence du dieu Osiris sur cette contrée maintenant submergée. Effigies du dieu, monuments et instruments rituels liés à son culte, offrandes, dépôts votifs et vestiges de sacrifices innombrables au “Maître du silence” étaient régulièrement mis au jour. Cela nous a intrigué tout d’abord, puis, peu à peu nous en avons compris la raison.”

 OSI1845Tous ces objets sont les témoins des célébrations secrètes des Mystères d’Osiris qui se déroulaient au mois de Khoiak. Il s’agit du quatrième mois de l’inondation – qui correspond aux mois d’octobre-novembre –, juste avant que le fleuve nourricier ne se retire de la vallée, livrant aux paysans des terres fertilisées par le limon et l’argile qu’il aura charriés. Ce moment est crucial pour appeler la nature à renaître en invoquant celui qui symbolise le mieux le cycle de la végétation et des saisons, Osiris, celui qui a connu la vie, la mort et la renaissance.

Ces mystères étant jusque-là connus par des sources tardives – dont les écrits de Plutarque ou les reliefs des chapelles osiriennes de Dendérah rattachées à l’époque ptolémaïque –, les découvertes de Thônis-Héracléion sont fondamentales pour la connaissance de ces cérémonies que l’on approche au plus près, à travers des témoignages inédits qui ne sont pas évoqués dans les textes. Il était donc évident pour Franck Goddio d’axer l’exposition de l’Institut du Monde Arabe sur les Mystères d’Osiris au lieu de proposer un classique bilan global des fouilles.

 OSIHE09 227 CG OSIHE09 216 CGLa haine d’un frère jaloux, tout simplement

Osiris est ce que l’on peut appeler l’archétype du “bon roi”. Lorsqu’il règne sur le monde des vivants, il civilise l’Égypte et le monde entier, dans la paix et la non-violence. Il apporte aux hommes l’agriculture, abolit l’anthropophagie, bâtit les premiers temples, construit les villes et gouverne avec des lois justes. En cet âge d’or, il est à la tête d’un royaume prospère et aimé de ses sujets. Mais voilà, son frère Seth est terriblement jaloux. Lui aussi aimerait jouir du pouvoir et goûter à la gloire. Il n’en peut plus et fomente un complot. Au cours d’un banquet donné en l’honneur de ce roi “parfait”, il prétend offrir un coffre somptueux à celui qui entrera précisément à l’intérieur. Sans surprise, il est aux dimensions exactes du roi tant haï. Pris au piège, Osiris est jeté dans le fleuve où il meurt noyé. Isis, l’épouse éplorée, part à la recherche de la dépouille royale qu’elle retrouve à Byblos, sur les côtes de la Phénicie. Elle la rapporte et la cache dans les fourrés, mais le sort s’acharne : Seth, chassant un soir de pleine lune, reconnaît le défunt frère et, de rage, découpe le cadavre en 14 morceaux – 42 selon les versions – qu’il jette dans le Nil. Isis encore, armée de patience et de courage, sillonne l’Égypte et, dans chacune des villes où a échoué une partie du corps, fait construire un temple reliquaire. Elle les retrouve toutes sauf une, le sexe, dévoré par le poisson oxyrhynque. Mais Isis, grande magicienne, créera un substitut, ce qui lui permettra de s’accoupler pour enfanter Horus. Avec ce corps à nouveau complet – fondamental pour espérer revivre dans l’au-delà –, Anubis crée la première momie de l’histoire égyptienne. Isis lui insuffle la vie.

 OSIALX08 094 CGSi Seth a réussi son coup, il restera associé aux forces maléfiques, au désert et aux terres stériles. Osiris hérite du royaume des morts et de l’au-delà, tandis que son fils Horus lui succède sur le trône de pharaon. Bien que les Mystères d’Osiris rejouent ce mythe pour garantir l’équilibre de l’univers et la maîtrise des forces maléfiques, les textes ne mentionnent jamais explicitement la mort du roi : on utilise toujours des périphrases et des moyens détournés, de peur que les mots écrits n’activent par magie le sens, ne fasse advenir à nouveau ce drame. Osiris n’est cependant pas ici invoqué comme roi de l’au-delà, mais associé à la renaissance et au renouveau de la nature.

Les Mystères d’Osiris, mode d’emploi

Tout commence le 12 du mois de Khoiak. À la quatrième heure, les officiants préparent les ingrédients nécessaires à la fabrication de trois figurines : du blé et du sable pour le Khentymentiou (réplique d’Osiris intègre) et le “Lambeau divin” (image d’Osiris au corps démembré), et un mélange plus élaboré pour le Sokar (Osiris protecteur des morts), composé de terre, de pulpe de datte, de myrrhe, d’encens, d’aromates et de pierres précieuses pulvérisées. Les deux premières sont arrosées jusqu’à germination des graines – on les a qualifiés d’ailleurs d’Osiris végétants –, et les trois seront façonnés dans un moule en or momiforme. Dans les tombes se multiplient, aux époques tardives d’ailleurs, des statues de Sokar-Osiris ou de Ptah-Sokar-Osiris, témoins du syncrétisme de ces différentes formes divines.

 OSI2452bPendant dix-neuf jours, les prêtres devront s’affairer pour fabriquer les cercueils, tisser les linges funéraires, réunir les amulettes… car ils devront pratiquer les rites d’embaumement sur ces substituts d’Osiris. Ces nouvelles statues seront déposées dans une salle dédiée dans le temple et remplaceront celles façonnées l’année précédente. Il est temps de renouveler les forces et d’accompagner la régénération de la nature. Mais avant d’inhumer les anciennes statuettes, il y aura plusieurs processions – dont celle de l’ouverture du sanctuaire, une procession nautique sur le lac sacré du temple mettant en scène le cortège funéraire d’Osiris – ainsi que des hymnes psalmodiés par deux jeunes et belles officiantes, incarnant le rôle d’Isis et de Nephtys, les deux sœurs d’Osiris. Les lamentations divines appellent le roi des morts à venir incarner ces substituts afin que le rite soit efficient : “Puisses-tu venir à nous dans ton apparence antérieure […] Celui dont le corps était engourdi quand il fut emmailloté, / Viens en paix, veux-tu, notre maître, afin que nous te contemplions ! […]” La partie mobile de l’âme, le Ba, a cette capacité à circuler et incarner des statues ou autres effigies religieuses.

Les textes ne décrivent pas la mise en scène du meurtre d’Osiris par Seth, mais il n’est pas vain d’imaginer que ce moment est joué lors des processions entre le temple et la nécropole. C’est seulement lors de ces épisodes que la foule peut assister aux Mystères car le temple lui est interdit, elle peut seulement accéder à l’avant-cour. Le dernier jour du mois, le 30, les figurines de l’année précédente sont portées vers la nécropole et définitivement enterrées, jusqu’à ce que le rituel ne recommence l’année suivante.

Stéphanie Pioda

[Statuette d’Osiris en bronze et barque votive en plomb posées sur les fonds sous-marins de la baie d’Aboukir. Thônis-Héracléion, Égypte, VIe-IIs. av. J.-C. / Sculpture en gneiss représentant le réveil d’Osiris, XXVIe dynastie, Musée égyptien du Caire / Pectoral de la 22dynastie, trouvé à Tanis dans la tombe du pharaon Chechong II (env. 890 av. J.-C.), Musée égyptien du Caire / Statue en bronze d’un pharaon, Thônis-Héracléion, baie d’Aboukir, Égypte / Statue en bronze d’un pharaon avec plongeur, Thônis-Héracléion, baie d’Aboukir, Égypte / Tête de prêtre, époque ptolémaïque, Port oriental d’Alexandrie, Égypte (SCA 1398) / Simulacre végétal d’une momie d’Osiris, Musée égyptien du Caire. Pour toutes les photographies : Christoph Gerigk © Franck Goddio/Hilti Foundation]

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