Cannes 2014 : compte rendu du jour 6
Cannes : compte rendu du jour 6 Le 19 mai 2014 |
Cannes, jour 6 : États-Unis, Corée du Sud, Japon, les déceptions et les découvertes s’entremêlent et le festival avance vite, beaucoup trop vite.
On est lundi et ça sent la fin de la semaine. C’est dans l’air, c’est comme ça. De toute façon, ici, le temps n’a aucune prise. On ne reconnait plus les journées et celles-ci sont rythmées par les projections et les rendez-vous. Les repères habituels et physiologiques (repas, sommeil) sont bouleversés. Au jour 6, la fatigue s’installe. Il ne me reste plus que deux jours de festival. Comme l’année précédente, celui-ci va continuer sans moi. C’est un deuil à faire, mais à ce stade, c’est le déni qui prime. Il ne peut rien y avoir d’autre ailleurs, la vie est ici. Et partir, c’est mourir un peu. Cette journée commence avec Foxcatcher, le nouveau film de Bennett Miller (Le stratège, Truman Capote). Si l’on attend beaucoup de ce cinéaste virtuose, le résultat n’est pas à la hauteur des attentes. Steve Carell y est grimé de façon incompréhensible, son personnage en devient ridicule et surtout inexpressif. Dans la première partie du film, je me suis demandé si Channing Tatum n’incarnait pas une réactualisation de Forrest Gump. Le film est taiseux, lent et triste. Et si l’histoire en est elle-même est malsaine à souhait, elle rappelle sur plusieurs aspects Ma vie avec Liberace, présenté l’année dernière. La sélection en compétition officielle est justifiée mais elle manque d’éclat, ni Bennett Miller ni son casting ne brillent et c’est une honte quand on connait le potentiel de cette équipe. À 11h, je file voir Dohee-ya, A girl at my door, (Un Certain Regard), un film coréen avec la star internationale Doona Bae. Le film est audacieux dans le sens où il traite plusieurs problématiques sociales, l’alcoolisme ou encore l’homosexualité féminine, assez peu traitées en Corée. Dans une certaine mesure, on peut même en dire qu’il s’agit d’un film de femmes. C’est l’extérieur à ce village perdu sur la côte coréenne et les hommes, le danger. J’applaudis l’audace et l’interprétation de deux comédiennes mais je reste sur le carreau. Quelque chose, je ne sais pas quoi, m’a empêché de me laisser submerger totalement. Il pleut sur la Croisette. Les vendeurs de parapluie font des affaires pendant que je me faufile en direction de l’hôtel Marriott. C’est là que, en compagnie d’une poignée de chanceux, je vais rencontre le réalisateur David Cronenberg. LA RENCONTRE DU JOUR Au dernier étage, au beau milieu d’un club branché déserté le jour, toute l’équipe de Maps to the stars est installée sans chichis. John Cusack grignote, Evan Bird est au beau milieu d’une conversation qui semble passionnante, la splendide Julianne Moore passe en coup de vent mais non sans exprimer son enthousiasme à revoir David Cronenberg. Celui-ci est accessible. Il s’installe au milieux de nous sur une banquette beige et commence à répondre avec patience et érudition à nos questions. C’est un homme posé, bien loin de Cannes et du Hollywood qu’il dépeint dans son dernier film. Il est charmant et généreux. Les 30 minutes d’entretien passent comme un songe. (lire l’interview) J’ai raté pour aujourd’hui un des films que je voulais absolument voir pendant ce festival. Mais je suis en chemin pour le nouveau film de Naomi Kawase, Still the water, en compétition officielle. J’avais le souvenir d’une sieste mémorable pour son précédent film sélectionné mais je donne sa chance à celui que la réalisatrice elle-même nomme son chef d’oeuvre. Et je ne suis pas déçue. Still the water est une moment de poésie pure. On y retrouve les thèmes chers à Naomi Kawase, la nature, le corps, les sentiments amoureux. Mais il s’en dégage une forme de grâce qui ne peut laisser indifférent. Personnellement, j’ai trouvé que c’était par la musique (la fameuse danse du mois d’août) et les sons que celui-ci trouve son envol. C’est un film d’esprit, pas inaccessible et charmeur. Une belle surprise pour finir la journée. Lucile Bellan |
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