KissKissBankBank : un écosystème au service de la création indépendante ou les réseaux sociaux au service, entre autres, des artistes
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Depuis quelques temps, des comédiens, metteurs en scène… me racontent qu’ils ont pu monter leur spectacle grâce à KissKissBankBank. Kesako ? Me suis-je demandé (en faisant celle qui savait parfaitement de quoi il s’agissait !). Cette rencontre avec Vincent Ricordeau, l’un des créateurs de KissKissBankBank m’a tout appris !
Vincent Ricordeau se définit comme un serial entrepreneur autodidacte et fort de multiples expériences dans les médias et le marketing sportif. Son dernier bébé, KissKissBankBank, il l’a monté avec sa femme, Ombline Le Lasseur, qui vient de l’univers de la musique et le cousin de cette dernière, Adrien Aumont, qui a fait ses classes dans le monde du cinéma et de la communication. Dans cette interview, Vincent Ricordeau a accepté de prendre principalement des exemples ayant un rapport avec le monde du spectacle. Vincent Ricordeau, comment est née l’aventure KissKissBankBank ? Je me suis très tôt intéressé aux réseaux sociaux. J’ai vu leur explosion et entrevu les immenses possibilités qui allaient en découler. En 2006, Ombline m’a parlé du fonctionnement de Sellaband, le premier site de crowdfunding à avoir été créé dans le monde. Le crowdfunding ? Littéralement « financement par la foule », c’est une forme de financement collectif également appelée « financement participatif ». La dernière campagne d’Obama a d’ailleurs profité de ce système. Pourtant, si tout le monde pense que l’idée est née aux USA, Sellaband est un site allemand ! Aujourd’hui, en France, il y a quelque 60 plates-formes de crowdfunding, certaines très spécialisées dans un domaine, d’autres de prêt, d’achat d’actions… KissKissBankBank est de très loin leader sur le marché. Revenons à la création de KissKissBankBank… Après avoir étudié Sellaband, nous avons tout de suite foncé en élaborant avec soin nos propres critères. Ainsi, KissKissBankBank est basé sur l’échange entre donateurs et créateurs pluridisciplinaires : mode, sport, éducation, édition, journalisme… et spectacle vivant. Comme nous avions tous les trois un travail, il nous a fallu deux ans pour aboutir. Pourtant, nous sommes parmi les cinq pionniers mondiaux en la matière. Aujourd’hui, nos projets viennent de 38 pays dans le monde ! Que propose concrètement KissKissBankBank ? La possibilité, pour des créateurs, de monter tout ou partie d’un projet avec l’aide pécuniaire de donateurs désintéressés. Par exemple, le metteur en scène et comédien Arnaud Denis a eu besoin d’argent pour financer le décor de son Dom Juan. KissKissBankBank lui a servi de vecteur pour recevoir ce dont il avait besoin. Qu’obtient le donateur en échange de son don ? Nous axons tout sur l’empathie. Pour créer un tel lien, il faut obligatoirement une contrepartie. Elle peut être symbolique : un remerciement, une rencontre avec l’équipe, des affiches ou photos dédicacées… ou plus conséquente : une place pour la pièce, un verre, un repas… voire une représentation privée du spectacle. En fait, tout dépend de la hauteur du don. Nous n’intervenons pas à ce niveau, sauf pour pousser les créateurs à rivaliser d’ingéniosité en vue de séduire, l’échange étant la base de notre système. Comment vous êtes-vous fait connaître ? Par un travail de fond, lent, régulier et fastidieux : des centaines et des centaines de rendez-vous. Nous sommes par exemple allés présenter KissKissBankBank aux institutions comme le CNT (Centre National du Théâtre), Avignon Off… et à des productions.Et nous nous sommes immergés dans le domaine culturel : chaque jour une expo, une pièce… Le bouche à oreille et les réseaux sociaux ont fait le reste. Comment sélectionnez-vous les projets ? Tout ce qui n’est pas créatif ou innovant est rejeté, comme ce qui ne nous paraît pas crédible ou qui est mal présenté, preuve d’immaturité du projet. Cela représente 2 dossiers sur 3. Le troisième tiers se compose d’offres mises en ligne telles quelles et d’autres auxquelles nous apportons notre savoir-faire pour les ficeler avant leur intégration sur la plate-forme. Quelle est la part du théâtre ? Le spectacle vivant occupe la 3ème place, pratiquement à égalité avec les deux premiers (musique et films/vidéos). Nous ne différencions pas danse, musicals, théâtre… pour autant, nous sommes certains que le théâtre représente la très grande majorité. Quelle est la motivation des donateurs ? L’empathie! Dans la majorité des cas, les donateurs font partie du premier cercle du réseau d’un créateur. Ce sont des amis ou des amis d’amis ou encore des personnes qui suivent sa carrière. Reste 15 à 20% des donateurs ayant entendu parler du projet par quelqu’un… ou venant expressément sur le site par envie de donner naissance à un ou des projets. Dans le vocabulaire KissKissBankBank, il y a aussi les mentors. Qui sont-ils ? Des institutions ou des entreprises qui aident pendant la collecte ou après, sans toujours amener des fonds. Par exemple, le magazine Glamour fait voter sur son site pour des projets qui peuvent, aussi, être dans le domaine du spectacle. Le gagnant bénéficie d’une double page dans Glamour, un super coup de pouce pour sa collecte ! Mais ce peut être le logo du CNT comme d’Avignon Off qui crédibilisent un projet et permettent de récolter des fonds plus facilement. Si tout le monde y trouve son compte, la créativité est libérée. Tel est notre objectif ! Y a-t-il risque de fraude ? C’est la communauté qui valide un projet. Si quelqu’un monte une arnaque, le réseau ne fonctionne pas, personne ne va l’aider ! Malgré tout, si, par hasard, des personnes trop crédules participent à sa collecte, il n’atteindra pas le montant demandé… et dans ce cas, il ne touchera rien du tout, l’argent étant restitué aux donateurs par nos soins. Donc, même pour un projet sain, il ne faut pas être trop gourmand ? Effectivement, d’autant que, si la collecte dépasse la demande du créateur, la totalité des sommes recueillies lui est acquise, (hors 3% de frais de transactions bancaires sécurisées et 5% de commission de KissKissBankBank, soit 8%TTC au total) ! Mais le plus important, c’est de parfaitement préparer son dossier ! En résumé, KissKissBankBank fait un pied-de-nez à ceux qui qualifient notre monde d’individualiste, non ? C’est l’organisation de la société qui nous pousse à l’individualisme. Une plate-forme de crowdfunding, c’est d’abord une histoire de lien social et de communauté. Et voir réussir des projets, c’est un vrai remède à la morosité ambiante C’est positif et ultra viral. Aussi, cette très puissante traînée de poudre positive aura, je le pense, un impact sur l’Humanité ! Caroline Fabre |
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