The Bloody Beetroots – Hide
Je retrouve donc l’homme qui se cache derrière le projet Bloody Beetroots au bar d’un grand hôtel parisien, visiblement détendu et peu stressé par la journée promo qui l’attend. Le souvenir d’avoir croisé sa route quelques années en arrière me revient, mais impossible à l’époque de savoir qui se cachait derrière le masque. La quantité d’alcool absorbée de part et d’autre ce soir-là ne m’avait même pas aidé à soutirer une quelconque information sur l’identité de Cornelius Rifo. Aujourd’hui, les choses se font sans artifices, mais à une seule condition et non des moindres : pas de photo.
Visiblement très à l’aise, Sir Bob (je ne m’aventurerai pas à lui demander d’où lui vient cette particule) m’explique qu’il apprécie de pouvoir se poser entre deux avions, même si il est en mouvement perpétuel entre deux capitales européennes et qu’il ne peut rester sans rien faire : « Je déteste l’idée d’être statique, c’est quelque chose qui ne s’intègre pas à ma façon de vivre. J’ai besoin d’une manière ou d’une autre de créer. La musique est un des nombreux aspects de Bloody Beetroots ». Ce besoin de créativité est visiblement pour lui une manière de se sentir en vie et d’apporter de nouvelles pistes à l’univers musical qui l’entoure. Mais résumer son travail sur un seul point serait purement et simplement réducteur. Car le travail de Rifo ne se limite pas au live ou au dj set qu’il donne depuis quelques années déjà à travers le monde.
Bloody Beetroots Dj Set et Bloody Beetroots Death Crew 77 ne sont que la partie « mainstream » de l’œuvre de son créateur. Pour lui chaque jour est différent et c’est ainsi que s’exprime le mieux sa créativité débordante. A tel point qu’on a l’impression qu’au fil des ans Bloody Beetroots s’est transformé en une créature protéiforme. « Bloody Beetroots est vraiment la pierre angulaire de mon travail, celle qui permet aux gens de découvrir tout ce qui gravite autour de ce projet. C’est une manière pour moi de construire des ponts entre la musique, la photo et le cinéma. Résumer mon travail à seulement une poignée d’albums, de lives et de dj set serait une grossière erreur. »
Pas mal de gens ont compris la démarche de Cornelius Rifo, à commencer par les Français qui l’ont toujours soutenue. On comprend que des artistes aussi talentueux qu’Etienne de Crecy ou encore Alex Gopher furent parmi les premiers à croire en son génie créatif. « Ces rencontres ont été très importantes pour moi, au même titre que celle avec Steve Aoki » explique avec beaucoup de simplicité Sir Cornelius. A moins d’avoir vécu les dernières années dans un abri atomique coupé du monde, vous n’avez pu passer à côté du tube planétaire que fut Warp qui plaça définitivement Bloody Beetroots sur orbite et permit par la même occasion au dj Américain de s’imposer comme une des figure incontournable de la scène électro Mondiale. « Ce qui est génial avec Aoki c’est qu’il a permis à ce que The Bloody Beetroots soit accessible au plus grand nombre. Ceux qui connaissaient mal mon travail m’ont découvert grâce à ce morceau. Du coup, les gens ont eu envie de savoir qui j’étais, ce que je faisais en dehors de la musique ; et Internet à fait le reste. »
Ce succès fulgurant n’est pas suffisant et l’adage qui veut qu’il ne faut pas s’endormir sur ses lauriers colle parfaitement à la philosophie de vie et artistique de Rifo. Entre deux prestations, il retourne en studio ou se penche sur de nouvelles idées pour peut-être à sa manière éduquer les gens et pourquoi pas changer le monde. L’étiquette électro punk qu’on colle parfois trop rapidement au projet Bloody Beetroots, n’est pourtant pas très éloignée des inspirations parfois un peu naïve d’une scène qui à grandit au milieu des années 70 et dont les Sex Pistols furent la référence absolue. L’envie de Sir Bob Cornelius Rifo est de reprendre là où ses ainés se sont arrêtés, tout en apportant une nouvelle dimension à la musique « punk » trop souvent cataloguée comme le porte-drapeau d’une génération sans avenir et sans ambition.
Rifo a compris tous les codes de cet univers et c’est maintenant lui qui tire à sa guise les ficelles. Preuve en est une fois encore avec ce nouvel album « Hide » sur lequel il réunit des artistes aussi différents que Tommy Lee, Theophilius London ou encore excusez du peu Sir Paul Mc McCartney. Il prouve une fois encore qu’il est possible de dresser des ponts entre les genres, mais surtout de dépasser les frontières que trop souvent bon nombre d’artistes n’osent franchir de peur de perdre en crédibilité. Deux jeunes quidams débarquent près de nous pour reprendre la suite de la promo, visiblement excités à l’idée de rencontrer celui qui a dû d’une certaine manière éveiller leur curiosité musicale. Espérons qu’il saura leur donner envie de découvrir la galaxie Bloody Beetroots et leur faire prendre conscience qu’en 2013 la musique sait prendre différents chemins. A la manière d’un « savant fou », Sir Bob Cornelius Rifo expérimente encore et encore et ce n’est visiblement pas près de s’arrêter.
Arno Byhet
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The Bloody Beetroots – Hide
Jive / Epic
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