Festival Pause Guitare 2013 – Iggy & The Stooges
Une première partie qui surprend : BB Brunes… Et Pete Doherty pour faire le pont. Le crooner destroy donne un concert folk à la grâce inattendue. Accompagnée d’une violoniste, ce Carl Barât avec archet amène un contrepoint intéressant. Pete chante des balades signées The Libertines, et alterne avec ses compo solo. Flanquée des deux danseuses en tutus lamés or qui tournoient autour de lui, le chanteur fredonne un What Katie did avec douceur et talent. Pete Doherty n’est pas un junkie, c’est d’abord un musicien made in England, qui prend la lumière de la scène comme peu en sont capables. Bercé, le public attend le clou de la soirée avec une certaine appréhension. Aussi doué soit-il, Pete ne nous a pas préparés à ce qui nous attend.
No crescendo
Des balances, réglages de micro pour l’iguane, tout ça semble durer une heure. Il s’avance, torse nu, cheveu droit, rictus malicieux et inquiétant, Iggy. Ça commence fort, pas de répit, ni de crescendo, le groupe balance un Raw Power d’entrée de jeu. Première claque. L’énergie destructrice est toujours là. Difficile d’écrire sur un moment qui ne semble plus tout a fait réel après l’avoir vécu. On avait tout entendu avant d’y aller « Ah ! Tu crois qu’il viendra avec sa canne ? » « Ce bon vieux Iggy, il a quoi maintenant ? 80 ans ?? ». Foutaises, le no future du punk s’incarne en lui, point. On se tient à un mètre de la scène, et on voudrait lui dire merci d’être resté en vie pour cette génération qui désespère d’écouter des morts, avec la nostalgie d’une époque qu’elle n’a jamais vécue. Raw Power donc, mais aussi Gimme danger, I’m sick of you, Search and destroy, I wanna be your dog, No fun…Hystérie et exultation collective, inédite.
Ces 5’000 personnes pourraient mourir là, juste après ce set d’anthologie. La voix grave, caverneuse et jouissive d’Iggy envoûte la fosse affamée de son. Il danse, saute, déploie sa gestuelle désarticulée, et derrière, ni déambulateur ni canne non plus : des fous, des punks. Une pensée pour Pacadis, critique punk, qui après son premier concert des Stooges signait religieusement « Alain Gimme Danger Pacadis ». On comprend mieux. L’ambiance Woodstock du début du festival s’amplifie. Le groupe joue d’un son rude, parfait.
Drogué de la scène
Il fait 50 degrés, et tout le monde s’en fout, ne peut s’arrêter de bouger frénétiquement la tête d’avant en arrière, avant, arrière. Mais d’un coup, le groupe salue et quitte la scène. Cauchemar. Ils ne peuvent pas nous laisser comme ça, baigner dans notre sueur générée par et pour eux. Impossible. On crie, on hurle, puis, quelques voix se lancent… « Iggy ! Iggy ! Iggy ! ». Bientôt, c’est toute la foule qui se transforme en groupie prépubère et braille en cœur le nom de l’idole. Charmé, il revient. Il fait des coucous, sourit et grimace à la fois, heureux de se voir ainsi aimé. S’il est drogué, c’est surtout à ça. Il fait mine d’attraper nos cris, et s’en habille. Il fait le con, il aime trop ça. Il offre « The passenger », la donne en pâture aux chiens aboyant. Le rappel dure, dure encore. Deuxième départ, toujours aussi intolérable. « Les Larbins » reviennent, et cette fois, embrayent sur une chanson du dernier album, Sex and Money. Relancé, Iggy nous parle : « This is a song I wrote before I was Iggy. I was very unhappy and I wanted to die…So it’s called Open up and bleeeeeeed ». Même s’il ne s’ouvre plus les veines sur scène comme en 68′, l’interprétation reste intense. L’intensité même du concert est à son apogée, et fini. Le concert du siècle ? On est en 2013, alors oui, sans hésiter.
Nathalie Troquereau
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