L’Ultimatum des trois mercenaires – thriller de Robert Aldrich
Magistral thriller et pamphlet politique, ce film offre à une brochette de comédiens des rôles en or. Presque deux heures et demi d’un spectacle particulièrement abouti qui mérite sa place dans les meilleurs opus du cinéaste, entre Les Douze Salopards et Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?
En 1977, quand il tourne ce qui sera son dernier grand film, Robert Aldrich est un cinéaste abimé. Auteur de Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? qui oppose au sommet Bette Davis et Joan Crawford, Les Douze Salopards, monument du film de guerre, Vera Cruz, classique du western ou encore En quatrième vitesse, modèle du polar, il a aussi collectionné quelques échecs et essuyé quelques affronts nés entre autres d’un engagement humaniste qui met à mal l’establishment politique américain. Avec son acteur fétiche Burt Lancaster, il met en chantier L’Ultimatum des trois mercenaires. L’histoire d’un groupe d’évadés qui s’infiltrent dans une base militaire du Montana pour y prendre le contrôle de missiles nucléaires.
Dépassant largement le cadre du thriller, orchestré d’une main de maître par le cinéaste qui possède un sens du rythme hors du commun, ce film, sorti à une époque où s’effrite inexorablement la crédibilité du pouvoir américain aux yeux du peuple (le Watergate est encore très présent dans les esprits), s’avère aussi un passionnant pamphlet politique. Il confronte en effet les mercenaires désireux que la lumière soit publiquement faite sur l’intervention américaine au Vietnam aux états-majors et au locataire de la Maison Blanche, présenté comme un pleutre de première.
A sa sortie, le film sera amputé d’une heure sur les 144 minutes du director’s cut. Toute la charge politique disparaît. C’est donc plus qu’une simple ressortie qui est proposée. C’est une version restaurée et intégrale d’un de ces nombreux films maudits, peut-être trop avant-gardistes. Ils n’en sont que plus actuels. Ce chef d’œuvre d’Aldrich, qui manie l’imbroglio politique et l’action multiplie par ailleurs les audaces, à commencer par une utilisation virtuose du split screen. Ce procédé, qui dédouble l’écran, prend ici une dimension esthétique et narrative qu’on ne trouve guère que chez De Palma ou Richard Fleischer. Les comédiens font le reste et le plaisir de revoir sur un grand écran Burt Lancaster, Richard Widmark (Panique dans la rue de Kazan), Melvyn Douglas (Ninotchka de Lubitsch), Joseph Cotten (L’Ombre d’un doute d’Hitchcock) ne se refuse pas.
Franck Bortelle
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L’Ultimatum des trois mercenaires
De Robert Aldrich
Avec Burt Lancaster, Richard Widmark, Charles Durning et Joseph Cotton
Durée : 144 min.
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