Ce que j’appelle oubli – Angelin Preljocaj – Théâtre de la Ville
Ce drame a inspiré à l’écrivain Laurent Mauvignier un monologue intérieur plein d’empathie, écrit d’un trait, dans l’urgence et sans relâche, où le souffle de l’écriture crée un Free Jazz littéraire d’une poésie foudroyante: « Ce que j’appelle oubli ».
Ecrit en une seule phrase qui bouscule le lecteur de la première page à la soixantième (et dernière), ce roman a alerté la conscience du plus averti des chorégraphes français. Angelin Preljocaj s’est laissé inspirer à son tour par l’histoire, par sa force symbolique par le rythme de l’écriture. Le chef de file de la danse française n‘est jamais là où on l’attend, jamais en panne de bouleversements. Il a donc rencontré l’auteur et s’est saisi des mots pour créer un spectacle saisissant.
Sur scène, l’acteur Laurent Cazanave se glisse dans la musique des mots, et parfois dans la peau de la victime. Tel un coryphée, il reste sur le devant de la scène. Face à lui, six danseurs explorent un glissement permanent entre absence et présence, entre le royaume des ombres, l’émotion intérieure et la dure réalité. Les corps et les gestes des danseurs traduisent le suspense, l’insupportable et la violence.
Mais justement, l’engagement physique se situe entièrement dans la métaphore. C’est justement le non avènement de l’acte qui nous saisit au plus intime. C’est au summum de la finesse que le chaud-froid entre le comédien et les danseurs reflète cette barbarie qui commence par l’humiliation: Un homme, entouré de quatre autres, apparemment prêts à l’anéantir.
Mais nous ne sommes ni au cinéma ni au théâtre. La danse n’est pas un art de la représentation des actes, qu’ils soient érotiques ou violents. La danse est l’art de la suggestion, de l’instant d’avant l’acte. C’est pour ça qu’elle est l’âme-sœur de la poésie, et c’est ce qui lui permet de rebondir, naturellement, sur l’écriture de Mauvignier.
Après le meurtre, les vigils tournent autour de leur victime, tels des vautours, comme dans un rituel. Le suspense, la tension ne connaissent aucun répit. Angelin Preljocaj s’attaque à un sujet sensible, grave et déterminant pour l’avenir de nos sociétés, à savoir le passage d’une violence sociale à une violence physique.
Il s’est laissé imprégner par l’énergie du texte et sa respiration, pour mettre en corps, en chair et en gestes les mouvements d’âmes des vigils et de leur victime. Cette intériorité le guide sur des chemins de grande clarté, sur les sentiers de la subtilité.
Thomas Hahn
Ce que j’appelle oubli
De Laurent Mauvignier (Editions de Minuit)
Chorégraphie & mise en scène : Angelin Preljocaj
Musique : 79D
Scénographie & costumes : Angelin Preljocaj
Le samedi 23 février 2013 – 20h30
Le dimanche 24 février 2013 – 16h00
Le dimanche 24 février 2013 – 20h30
Le lundi 25 février 2013 – 20h30
Le mardi 26 février 2013 – 20h30
Le mercredi 27 février 2013 – 20h30
Le vendredi 1 mars 2013 – 20h30
Le samedi 2 mars 2013 – 20h30
Le dimanche 3 mars 2013 – 16h00
Le dimanche 3 mars 2013 – 20h30
Le lundi 4 mars 2013 – 20h30
Le mardi 5 mars 2013 – 20h30
Plein tarif : 30 € (1ère catégorie) & 25 € (2ème catégorie)
Tarif jeune : 17€
Durée 1h30
Théâtre de la Ville
2, place du Châtelet
75004 Paris
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