0 Shares 2366 Views

Alfred Manessier

12 juillet 2012
2366 Vues
Alfred Manessier


À Paris de 1931 à 1935, il étudie l’architecture à l’École nationale des beaux-arts par obéissance à son père ; parallèlement, sa passion pour la peinture l’attire au Louvre pour copier Rembrandt, Tintoret, Rubens, Renoir. Le soir, il fréquente certaines Académies libres de Montparnasse avec son ami Jean Le Moal puis, fin 1934, l’Académie Ranson où Bissière a ouvert un cours de fresque. Ses œuvres de jeunesse sont influencées par le Cubisme, puis par le Surréalisme. 

Un service militaire prolongé, les conséquences du décès de son père en 1936 l’obligeant à devenir négociant en vins à Amiens pendant deux ans, puis le début de la guerre (mobilisation) l’éloignent momentanément de toute activité artistique. 

En janvier 1938, il s’installe à Paris pour risquer une vie pleinement vouée à la peinture que son mariage, le 15 octobre, avec Thérèse Simonnet, viendra durablement conforter. De leur union naissent : Jean‐Baptiste au moment de l’Exode en 1940 à Cahors et Christine en 1945 à Paris. Difficile reprise de la peinture en 1942, un an après l’exposition « Jeunes Peintres de Tradition française », où Manessier était présent par trois toiles surréalistes d’avant-guerre, dont son manifeste contre Hitler, Le dernier Cheval (1938), aux côtés de Bazaine, Bertholle, Lapicque, Le Moal, Pignon, Singier et les artistes qui déclenchèrent courageusement pendant l’Occupation nazie, un mouvement de peinture d’avant‐garde porteuse d’espoir. 

Touché par la foi à la Grande-Trappe de Soligny en septembre 1943, Manessier parlera d’intériorisation et non pas d’abstraction quant à l’évolution de sa peinture. À la Libération, il participe au premier Salon de Mai dont il est un des membres fondateurs : son tableau Salve Regina (1945), vivement remarqué, lui ouvre « sa voie » sur la scène artistique. 

Sa renommée deviendra vite internationale : 1er Prix de peinture à la Biennale de São Paulo en 1952 ; Grand Prix de peinture de l’Institut Carnegie de Pittsburgh en 1955 ; Grand Prix de peinture de la XXXIe Biennale de Venise en 1962, à l’instar du sculpteur Alberto Giacometti. 

L’artiste est fortement sensible aux éléments, au cycle des saisons, à l’alternance du jour et de la nuit, aux variations de la lumière : celle du Nord (Picardie, Flandres, Hollande, Canada, Suède…), celle du Sud (Provence, Espagne, Algérie…) et bien d’autres encore (Beauce, Ile‐de-France, Banlieue parisienne, Perche, Bretagne, Jura…). 

En 1956, il achète une ancienne ferme à Émancé (Yvelines). La grange est transformée en un vaste atelier. Ses transpositions picturales des paysages l’ayant ému en profondeur sont autant d’odes à la beauté de la nature, offertes à notre propre émotion.

Par ailleurs, Manessier n’a jamais eu peur d’exprimer dans sa peinture, non seulement sa foi, mais surtout sa révolte face à la souffrance, à l’injustice, aux droits de l’homme bafoués, fidèle en cela jusqu’au bout, aux aspirations humanistes de sa jeunesse. Témoin de nombreux drames de son temps, il a peint entre autres : Requiem pour Novembre 1956 – Hommage à Martin Luther King, 1968 – Le Procès de Burgos, 1970‐1971 – Vietnam‐Vietnam, 1972 – Le Onze septembre 1973 (Hommage à Allende) – L’Otage, 1987. 

Premier créateur de vitraux destinés à une église ancienne, sans recours à la représentation, Manessier a posé indéniablement – dès 1948 aux Bréseux dans le Doubs – les fondements du renouveau esthétique de l’Art sacré d’après‐guerre. D’innombrables travaux (vitraux, tapisseries, vêtements liturgiques, costumes de théâtre par exemple pour La Vie de Galilée de Brecht au T.N.P. en 1963, mosaïques, émaux, estampes, lithographies, livres illustrés, dont l’Élégie pour Martin Luther King de Senghor en 1978…) complètent abondamment son œuvre peint et dessiné. 

Six mois après sa Rétrospective au Grand Palais à Paris fin 1992, deux mois après l’inauguration de l’ensemble des vitraux de l’église du Saint‐Sépulcre d’Abbeville, il meurt le dimanche 1er août 1993 des suites d’un accident de voiture, à l’hôpital d’Orléans‐La Source. 

Alfred Manessier repose dans le cimetière de son village natal, Saint‐Ouen, en terre picarde.

A découvrir sur Artistik Rezo : 
L’exposition d’œuvres d’Alfred Manessier à l’Abbaye de Saint-Riquier (été 2012)
 

[Visuel : Le peintre français Alfred Manessier en 1971. Date : septembre 1971. Travail personnel de Michel-Georges Bernard. Licence Creative Commons Paternité – Partage des conditions initiales à l’identique 3.0 Unported, 2.5 Générique, 2.0 Générique et 1.0 Générique]

Articles liés

“Tant pis c’est moi” à La Scala
Agenda
53 vues

“Tant pis c’est moi” à La Scala

Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...

“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
Agenda
81 vues

“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête

C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...

“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Agenda
100 vues

“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée

Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...