Se souvenir de la mer – domaine départemental du château d’Avignon
Lieu des songes et des utopies innombrables, à la fois symbole d’infini et de toute-puissance, la mer inspire depuis toujours à l’homme des sentiments contradictoires et démesurés. De l’angoisse des profondeurs et de l’immensité au rêve de voyages et de merveilleux, cette étendue au mouvement perpétuel n’a cessé d’être une source de fascination, un sujet d’inspiration pour les créateurs auxquels elle semble insuffler un sentiment de liberté inégalé tout en faisant éprouver la fragilité de l’existence humaine.
A partir de la position géographique du château d’Avignon — entre mer et terre —, de sa gestion technique des eaux douces et salées qui se mêlent en Camargue, de ce qu’il témoigne sur l’histoire de la villégiature à la fin du XIXème siècle, le domaine du château d’Avignon propose pour l’été 2012 un parcours où oeuvres contemporaines composent avec le monument et son environnement.
L’exposition fait dialoguer les pratiques et les générations artistiques, soulignant la diversité des inspirations, sollicitant l’esprit des lieux dans sa relation historique à l’eau. De la houle et des merveilles de la mer à la métaphysique du regard face à son étendue, de la culture de plage aux dépôts marins, le parcours évoque une poétique de la mémoire où se croisent monde sensible et points de vue de l’imaginaire.
Dans cet ensemble, une attention particulière est portée à la photographie et la vidéo dont l’instantanéité et la mouvance des images en font des médiums privilégiés pour exprimer la mobilité inlassable de l’élément marin et son rapport au et à la mémoire.
Le rez-de-chaussée du château ouvre à une promenade onirique au milieu des créatures sous marines et de la faune des grandes profondeurs. L’imaginaire qui s’y déploie révèle un étonnant bestiaire, à la fois fascinant et inquiétant, où se côtoient étoiles de mer et méduses en verre (Yves Chaudouët), coquillages fossiles (Philippe Droguet), monstres marins en faïence (Laurie Karp). Les coquillages récoltés au bord de l’eau composent des fééries marines (Paul Amar) tandis qu’entre humour et dérision, de bien étranges crustacés nous interrogent sur la nature même de l’oeuvre d’art (Woodrow, Marcel Broodthaers).
Les créations de Véronique Boudier, Olivier Babin, Judith Bartolani et Claude Caillol, Céline Duval, Olivier Millagou, Gérard Deschamps, Antoine Dorotte et Boris Chouvellon se rattachent à une autre vision, commune et populaire, celle des vacances au bord de la mer où depuis le XIXe siècle on va se fortifier au contact de l’air iodé, caresser la vague, jouer sur le sable ou le modeler avec ses doigts pour bâtir des châteaux. Gonflables multicolores et pataugeoires, planches de surf et poissons souriants, maillots de bain chatoyants et photos souvenirs forment la matière d’oeuvres ludiques qui jouent avec les archétypes de notre société de consommation et les usages de notre temps. Elles agissent tout autant comme vecteurs de mélancolie, en souvenirs des jours heureux.
Plus loin, la mer dans son identité physique et son caractère imprévisible, dicte sa loi et conserve ses capacités d’emportement. Insaisissable et en mouvement permanent, elle invite à toutes les approches physiques et corporelles, pour tenter de l’explorer, la maîtriser ou la comprendre (Masbedo, Francis Alÿs, Marcel Dinahet, François-Xavier Courrèges).
Sensuelle, elle modèle les formes, éveille les sens et suscite les fantasmes (Lucien Clergue, Anne Pesce). Menacée, elle incarne le risque écologique et cristallise la mémoire et l’histoire (Yang Yi, Sigalit Landau).
Depuis la fin du XVIIIe siècle, la mer, ses rivages et ses paysages sont devenus un lieu privilégié de la contemplation, du pittoresque, et une source essentielle d’inspiration pour la création artistique. Les œuvres de Fischli et Weiss, Sarkis, Olivier Grossetête, Véronique Ellena et Sophie Braganti rappellent, avec des moyens contemporains, la permanence de cet émerveillement. La fascination de la mer, de ses miroitements et de ses espaces infinis nous renvoie à notre modeste condition humaine mais aussi inlassablement au travail de l’artiste et à ses questionnements.
Se souvenir de la mer
Œuvres de Francis Alÿs, Paul Amar, Olivier Babin, Judith Bartolani, Véronique Boudier, Sophie Braganti, Marcel Broodthaers, Claude Caillol, Yves Chaudouët, Boris Chouvellon, Lucien Clergue, François-Xavier Courrèges, Gérard Deschamps, Marcel Dinahet, Antoine Dorotte, Philippe Droguet, Céline Duval, Véronique Ellena, Peter Fischli, Olivier Grossetête, Laurie Karp, Sigalit Landau, MASBEDO, Ollivier Millagou, Anne Pesce, Alexandre Ponomarev, Sarkis, David Weiss, Bill Woodrow et Yang Yi
Du 23 juin au 31 octobre 2012
Tous les jours (sauf le mardi) de 9h45 à 17h30
Visite du château : 4€ // tarif réduit : 2€
Gratuité pour les moins de 18 ans
Domaine départemental du château d’Avignon
Route départementale 570
13460 Les Saintes-Maries-de-la-Mer
Articles liés
“Tant pis c’est moi” à La Scala
Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...
“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...