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Lita Cabellut – Coco – Opera Gallery Paris

15 novembre 2011
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Avant d’inaugurer sa treizième galerie à Pékin à la fin de l’année, Opera Gallery présente, jusqu’au 19 novembre, 35 portraits monumentaux de Coco Chanel par Lita Cabellut, une artiste d’origine gitane à la vie tourmentée, à la « success story » étonnante (elle a reçu le prix de la culture gitane à Madrid en 2011, vit et travaille à Amsterdam). Dans ses œuvres, elle décrypte les côtés sombres et lumineux de la couturière, établissant une correspondance avec le noir et le blanc qui furent ses couleurs fétiches.

Depuis le début de l’exposition, jeudi dernier 14 octobre, les collectionneurs ont défilé dans la galerie et vingt-quatre des immenses portraits de Coco Chanel sont déjà vendus à ce jour. Un succès similaire avait couronné l’exposition d’Opera Gallery, à Londres l’an dernier, réunissant des portraits de Frida Kahlo réalisés par la même artiste.

La vie de Lita Cabellut est rocambolesque : Née tzigane dans les rues de Barcelone en 1961, de père inconnu, de mère prostituée qui l’abandonne à l’âge de trois mois, élevée par une grand-mère gitane qui lui interdit l’accès à l’école, confiée à huit ans à un orphelinat, la jeune femme franchit toutes les étapes par sa ténacité jusqu’à l’école des Beaux-Arts d’Amsterdam, l’une des plus réputées.

Anecdotique, pathétique ? Pas si on regarde ses toiles, impressionnantes de beauté et de maîtrise. Travaillant ses grandes toiles avec de la peinture à l’huile, du plâtre sur du lin, une technique à la brosse et une préparation de la surface qui provoquent des craquelures, le procédé de Lita Cabellut est maitrisé et amplifie la force visuelle de l’œuvre. Ses sujets de prédilection : prostituées, clowns, travestis, saltimbanques, mais aussi les femmes artistes fortes et conquérantes : par exemple Frida Kahlo, ou ici Coco Chanel. Lita Cabellut souhaite s’intéresser bientôt au champ des maladies mentales.

Comment vous définissez-vous en tant qu’artiste tzigane, face au monde de l’art, aux codes prédéfinies et peu extensibles ?

Je dois me rendre à une conférence bientôt pour parler des tziganes et de l’ignorance qu’ont beaucoup de personnes sur leur culture. Les gens pensent toujours à la guitare et aux castagnettes, mais nous sommes partout, dans la recherche scientifique, la finance,  l’art… Elvis Presley avait des origines tziganes, Charlie Chaplin aussi…

Combien de temps passez-vous sur chaque toile monumentale ?

Comme dis toujours : trente-cinq ans, parce qu’il s’agit de trente-cinq ans d’expérience picturale ! Ainsi, on ne peut pas demander à un compositeur combien de temps il consacre à chaque musique, car c’est le temps de sa création qui compte, sa détermination, les facteurs innombrables qui jouent, etc. Parfois vous créez vite, parfois lentement.

La plupart des toiles sont monumentales, mais certaines montrent des détails, dont un œil.

C’est quelque chose que j’ai fait spécialement pour Coco Chanel ; cet œil, je l’ai retrouvé dans toutes mes recherches que j’ai faites sur elle.

Et il n’y a pas de titre…

Non, chaque toile raconte sa propre histoire, une partie de la vie de Coco, dans les années 1920, puis 1940.


Comment vous êtes-vous documentée sur l’histoire de Coco Chanel ?

J’ai lu toutes ses biographies, j’ai composé les toiles, puis j’ai regardé les films qui parlaient d’elle. Mais uniquement après avoir peint. Je ne voulais pas être influencée.

Comment avez-vous rencontré la galeriste ?

francia-espana-arte-lita-cabellut-lleva-al-lienzo-el-alma-gitana-de-coco-chanel599x0C’est elle qui m’a trouvée ! Elle m’a appelée après avoir vue mon travail dans un catalogue, pour me dire combien elle aimait mon travail, qu’elle voulait m’exposer. Et à partir de cet instant, elle est devenue ma plus grande avocate. Je la remercie de m’avoir à ramener Coco Chanel dans le quartier, par le biais de mes toiles.

Vous êtes aussi vidéaste, l’exposition comporte une vidéo de 6 minutes réalisée par vos soins.

Oui, chaque exposition comporte une de mes vidéos, que je considère comme un poème, dédié cette fois à Coco Chanel.

Si on parle technique...

J’utilise la peinture à l’huile, du plâtre sur du lin, la brosse et une préparation de la surface qui provoquent des craquelures pour exprimer la peau, le corps.


C’est étrange, car vous représentez Coco Chanel scarifiée, et pourtant dans l’imaginaire, elle a inventé un style de femme parfaite !

Oui, elle se place dans la continuité de mon travail : c’est la peau qui m’intéresse à chaque fois. C’est étrange que les gens la considèrent comme parfaite, car si vous l’êtes, vous ne pouvez être créative. Je pense qu’elle était très loin de la perfection, tant elle était créative !

Quelle sera le thème de vos prochaines créations ?

Les trente femmes qui ont changé l’humanité.

Propos recueillis par Mathilde de Beaune

Lita Cabellut – Coco, The testimony of black and white

Du 14 octobre au 19 novembre 2011

Tel (33-1) 42 96 39 00

Opéra Gallery Paris
356, rue Saint-Honoré
75001 Paris
M° Concorde ou Tuileries
www.operagallery.com
www.litacabellut.com/cabellut

[Visuels : en haut, coco 10, Technique Mixte sur toile 260 x 200 cm 102.4 x 78.7 In. © DR Lita Cabellut. En bas, l’artiste devant une de ses oeuvres]

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