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La Source des Femmes – film de Radu Mihaileanu

3 novembre 2011
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La Source Des Femmes - film de Radu Mihaileanu

Pour ces femmes d’un petit village que l’on suppose situé quelque part au Moyen-Orient, et dont le nom importe peu, la route de la source est constellée de cadavres. Ceux d’enfants morts-nés, à cause du manque d’hygiène, des maladies, de la rudesse des conditions de vie, qui sont le quotidien de ces femmes traditionnellement contraintes d’aller chercher l’eau en cheminant dans les sentiers escarpés de la montagne. Jusqu’au jour où Leila, l’épouse bien aimée de l’instituteur, leur suggère un moyen de résistance : jusqu’à temps que les hommes ramènent l’eau au village, les femmes feront « la grève de l’amour ».

Face au rempart des traditions, à ce refus obstiné des hommes qui n’ont jamais eu à requérir le consentement des femmes, le désir le plus frustré est en réalité le désir de liberté. Leïla le criera à son mari : elle veut « exister ». Pourtant elle bénéficie d’un atout considérable par rapport aux autres femmes du village, celles dont elle mène la révolte : elle est réellement aimée de son mari, qui œuvre à l’école pour donner une valeur émancipatrice à l’éducation, et milite chez lui pour un Islam éclairé.

Cependant, à l’écran, tout ce beau discours pour la tolérance et la liberté a un effet paradoxal. Très tendre dans sa façon d’esquisser les personnages, le film s’avère néanmoins lénifiant à force de manichéisme et de dichotomie simpliste. Bloc réactionnaire des hommes d’un côté, martyre assemblée des femmes de l’autre. Bien que certains jeunes hommes du village semblent tout prêts à soutenir leurs femmes, sœurs, mères, filles, l’impression dérangeante d’une lutte genrée persiste et nuit au propos de Radu Mihaileanu, qu’on a connu plus subtil (notamment dans le très beau Va, vis et deviens, 2005).

Et puis il y a cet horripilant cliché typiquement (et sans doute trop) occidental : comme par hasard, c’est une « étrangère » qui va proclamer la révolution dans ce petit village prisonnier de ses traditions, où plane la menace du fanatisme. Le monde ayant vu au printemps dernier des populations se soulever spontanément pour renverser des pouvoirs abusifs, il parait réellement agaçant de voir un film – qui plus est, basé sur un fait d’actualité – perpétuer ce bon vieux lieu commun du libérateur (fût-il pour une fois unE libératrice) venu-e d’ailleurs pour éduquer les peuples à la démocratie. C’est d’autant plus rageant qu’il ne fait aucun doute que Radu Mihaileanu ne pèche que par excès de bon sentiment.

Le scénario était pourtant riche de possibilités. Portraitiste hors-pair, le réalisateur aurait par exemple pu y trouver matière à une savoureuse comédie de mœurs. Incroyablement cocasse, le personnage du Vieux Fusil s’y prêtait, et il est regrettable que ce potentiel comique ne soit pas davantage exploité. A ce titre, la prestation de Biyouna doit être saluée. C’est bien elle la plus généreuse de ces héroïnes assoiffées de liberté, la plus imposante des actrices qui portent le film comme l’eau de la fameuse Source, à bouts de bras. Le regard de Leila Bekhti, qui magnétise la caméra, est l’autre indéniable atout de Mihaileanu. Ce dont on ne peut alors pas douter, c’est que le cinéaste roumain aime les femmes, les filme admirablement, et croit en elles. Mais hélas, la fascination est mauvaise conseillère concernant un sujet aussi délicat, qui aurait nécessité davantage de recul, et surtout un traitement beaucoup plus nuancé.

Raphaëlle Chargois

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Globes de cristal 2012

  • 1 nomination : Meilleure actrice


Festival de Cannes 2011

  • 6 nominations : Palme d’Or, Grand Prix, Prix du Jury, Prix de la Mise en scène, Prix du Jury Oecuménique et Prix de la Jeunesse

 

 

La Source des Femmes

De Radu Mihaileanu

Avec Leila Bekhti, Hafsia Herzi, Biyouna, Sabrina Ouazani, Saleh Bakri et Hiam Abbass

Sortie le 2 novembre 2011

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