Ivanov au théâtre Sylvia Monfort
Ivanov, c’est un Russe de trente-cinq ans, propriétaire terrien criblé de dettes, toujours insatisfait, plaintif, époux d’une femme aimante qu’il délaisse cruellement jusque dans la maladie. Que ses amis tentent de le comprendre ou qu’ils lui portent de franches accusations, Ivanov demeure enfermé dans son dégoût, faisant du mal autour de lui en répandant une culpabilité dont on se demande s’il ne s’y vautre pas.
C’est une réussite de parvenir à proposer une redécouverte de cette pièce. On plonge aisément dans cette atmosphère tchekhovienne que la mélancolie domine avec ses assauts de violence. Mais Jean-Pierre Baro nous fait également descendre au tréfonds des corps pour comprendre cet univers d’êtres pitoyables et touchants. Adaptateur et metteur en scène, il inclut de beaux moments de chorégraphie où les comédiens-danseurs révèlent par le mouvement leur profondeur, leur sensualité, leur désespoir, leur beauté.
Le texte revu se trouve également empreint d’un humour déjà présent chez Tchekhov mais qui s’accentue grâce à un ancrage très moderne. Ainsi, une référence à Schopenhauer ou une mélodie d’Alain Souchon trouvent leur place avec fluidité et soulignent la subtilité des personnages, dotés d’une clairvoyance aigüe sur leurs contemporains. Ces incises permettent de toucher pleinement la dérision qui plane et permettent aux spectateurs de rire de cette tragi-comédie sans les apparats affectés du genre.
Les comédiens maîtrisent avec talent la tonalité générale. Ils savent tous s’y mouvoir en respectant l’homogénéité mais en sachant aussi déborder par le corps et la voix, capables soudain d’un jeu inattendu, permettant une confrontation crue, triviale et magnifiquement désespérée avec le coeur de la musique tchekhovienne.
Cassandre Bournat
© Marina Damestoy, Magali Murbach, Jean-Baptiste Pasquier
Ivanov
D’après Ivanov d’Anton Tchekhov
Mise en scène de Jean-Pierre Baro
Extime Cie
Avec Simon Bellouard, Florence Coudurier, Cécile Coustillac, Franck Gazal, Elios Noël, Philippe Noël, Tonin Palazzotto, Ruth Vega-Fernandez
[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=oU1ahvDIJW8[/embedyt]
Du 25 janvier au 13 février 2011
Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16h
Informations et réservations : 01 56 08 33 88 ou sur le site du théâtre.
Tarifs : 24 € ; réduit 16 € (- 26 ans, + 65 ans, chômeurs, intermittents, personnes handicapées, groupes à partir de 8 personnes)
Théâtre Sylvia Monfort
106, rue Brancion
75015 Paris
Métro Porte de Vanves (ligne 13), bus 58, 6289, 95, 191, tramway 3
Articles liés
“Tant pis c’est moi” à La Scala
Une vie dessinée par un secret de famille Écrire un récit théâtral relatant l’histoire d’un homme, ce n’est pas seulement organiser les faits et anecdotes qu’il vous transmet en une dramaturgie efficace, c’est aussi faire remonter à la surface...
“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...