Orlando de Haendel – Théâtre des Champs-Elysées
Lille, Paris, Dijon. Cette nouvelle production d’Orlando de Haendel parcourt les routes de France à un rythme de croisière ; faisant une halte de quatre jours au Théâtre des Champs-Elysées. Le public parisien a ainsi pu découvrir la mise en scène de David McVicar, égal à lui-même, et qui pour l’occasion s’est de nouveau associé avec le chef d’orchestre Emmanuelle Haïm.
Leur Orlando est-il une nouvelle réussite ? Comme pour le Sémélé de McVicar créé en 2004 et repris en juin 2009 sur la même scène, il y a « à prendre et à laisser ». Mais le résultat s’avère plaisant. Considéré comme l’un des ouvrages les plus beaux et les plus originaux de Haendel, Orlando fait partie de ces œuvres « magiques » à mettre au côté de Ariodante et Alcina.
Qui est Orlando ?
Orlando est ce preux guerrier taraudé entre son désir de combats et l’amour qu’il porte pour Angelica, elle-même éprise du jeune Medoro. Ce mélodrame paraîrait basique si la présence d’une servante esseulée, Dorinda, et du mage Zoroastro n’était pas là pour rendre ce récit mystérieux et énigmatique. Et quel plus beau sentiment que celui de l’Amour pour venir bouleverser chacun des protagonistes jusqu’à conduire Orlando à la folie ?
Le style McVicar
Outre les protagonistes principaux, McVicar aime donner la place à des personnages tiers et muets tout aussi importants au fil de l’action : des valets automates conçus par le docteur Zoroastro, des majordomes écoutant aux portes et spectateurs le temps d’une vraie-fausse représentation, une prostituée sortant tout d’un droit d’une maison close, un jeune homme imberbe au torse dénudé et une princesse Isabella bâillonnée par un foulard rouge, couleur emblématique de l’amour.
Tout ce beau monde se retrouve dans un moment de grâce si mcvicarien lors de l’air de Zoroastro Sorge infausta una procella bénéficiant d’une sublime chorégraphie toujours signée Andrew George. Autres moments envoûtants : l’univers nocturne et orgiaque au premier acte lors de l’air de Zoroastro Mira, e prendi l’esempio, ou encore la symphonie du troisième acte pendant lequel McVicar rappelle intelligemment qu’Orlando peut être vu comme un opéra séria et buffa. Les récitatifs eux-mêmes semblent par ailleurs déjà faire écho à ceux du librettiste de Mozart, Lorenzo Da Ponte
Plus décevant, le deuxième acte manque de souffle et ne convainc pas avec ses laqués vêtus de têtes d’animaux rappelant les Fables de La Fontaine de Bob Wilson, se déhanchant et hurlant sur scène. Heureusement, la sublime lumière de Davy Cunningham est là pour baigner le tout dans une atmosphère très XVIIIème siècle.
Distribution décevante, direction exemplaire
Sofia Prina et Stephen Wallace n’ont pas réussi à emporter l’audience, même si leurs applaudissements furent mérités.
Quant à Zoroastro, son importance est telle qu’il s’agit du plus beau rôle d’opéra que Haendel n’ait jamais confié à une basse. Le timbre grave de Nathan Berg ne parvient pourtant pas à s’imposer comme il se doit même s’il incarne son personnage avec ce mélange d’angoisse et d’esprit démoniaque. C’est d’ailleurs ce que l’on peut reprocher à l’ensemble de la distribution : cette énergie sans faille qui les anime sur scène mais qui ne va pas de paire avec ce mélange de voix peu percutantes et aux variations trop appuyées.
Est-ce une volonté d’en vouloir faire trop ? On pouvait en tout cas sentir pour chacun d’entre eux un manque de confiance au premier acte qui s’est dissipé au fil du temps pour arriver à un troisième acte d’avantage maîtrisé. C’est surtout le cas de la soprano Lucy Crowe qui se donne tout le long à fond et paraît même essoufflée à la fin de son air Amore é qual vento. Bizarrement, ce qui apparaît le plus maîtrisé concerne les ensembles, à l’image de ce trio à la fin du premier acte Consolati, o bella, du duo du deuxième acte Unisca amor in noi et de l’ensemble final du troisième acte Trionfa oggi ‘l moi cor.
La direction d’Emmanuelle Haïm est quant à elle exemplaire : ni trop nerveuse, ni trop appuyée, elle excelle dans le genre haendélien en restant tout à la fois fidèle à la partition en laissant convenablement les chanteurs s’exprimer.
On ne badine pas avec l’amour. Tel devrait être le surtitre de cet opéra qui en fin de compte traite de son temps : l’Amour volage, l’Amour libertin, l’Amour transit, l’Amour toujours. Et pourtant, l’Amour pour une fois ne triomphera pas et finira comme il se doit sur une table d’opération. Que l’expérience commence.
Edouard Brane
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Orlando de Haendel
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Le 3 novembre 2010 au Théâtre des Champs-Elysées
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