L’incroyable histoire de Gianni Schicchi
Le metteur en scène Jean-Michel Fournerau propose judicieusement un prologue sur des airs de la chanson française que les adultes reconnaissent immédiatement : Brel, Barbara, accompagnés à l’accordéon… Un moment d’inquiétude ! Ne devions-nous pas entendre des voix lyriques ? Justement si, mais elles surviennent plus tard, lors de l’opéra en un acte de Puccini ! Ainsi chacun peut entendre la différence vocale très impressionnante. Et pour ce jeune public de 9 ans, c’est très parlant, très formateur. L’assistance est surprise dès le premier tableau par le décor et par les marionnettes étranges et impressionnantes.
Autour d’un lit central où repose le mort, une gigantesque marionnette, à la tête démesurée pleure faussement la famille, dans l’attente du testament.
Les marionnettes d’Antonin Lebrun surprennent par leur caractère macabre : ce sont de véritables oiseaux de proie, des rapaces décharnés, parfois squelettiques, au masque neutre et blafard, pour la famille du mort à laquelle s’oppose la tête de filou bien colorée de Gianni Schicchi. Il y a tout un jeu de taille et de “gueules” à la fois de marionnettes mais aussi des chanteurs. Le docteur inquiète, véritable dinosaure squelettique de bande dessinée. Tout est langage. Le casting est formidable. Par exemple, une immense femme corpulente, un peu inquiétante par sa voix, et ses regards manipule à vue une toute petite marionnette qui régit la maison.
La force du spectacle réside dans la double histoire contée par les marionnettes et celle des chanteurs qui parfois s’en distancient pour mener leur propre vie. Tout un jeu subtil s’installe avec et sans la marionnette. La mise en scène joue de cette double lecture avec le spectateur. Quand les deux jeunes premiers s’embrassent, on attend le baiser qui ne vient pas des chanteurs et qui feignent de ne pas comprendre.
L’opéra de Puccini est très dense. Suspens, allégresse, fausse commisération, scène d’amour ou d’hystérie. Le ton change très rapidement. L’air de la supplique de la jeune Lauretta, interprété par Sabine Devieilhe, est bouleversant. Leur duo fait rêver : les marionnettes ailées s’envolent, attirées l’une vers l’autre et aussitôt surgit poétiquement l’univers des tableaux de Chagall.
Une heure quinze de qualité qui initie le jeune public à l’opéra.
Marie Torrès
L’incroyable histoire de Gianni Schicchi
Par la compagnie Orphée Théâtre
À partir de 9 ans
Opéra de Giacomo Puccini
En langue italienne, sous-titré
Vendredi 15 octobre – 20h
Samedi 16 octobre – 15h et 20h
Informations / réservations : 01 72 29 35 35
Tarifs : 16 €, moins de 13 ans : 5 €
Amphithéâtre Bastille
Place de la Bastille
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