My 70’s Show au ciné 13 théâtre
L’une des figures emblématiques de cette époque est bien évidemment Andy Warhol, personnage sulfureux et controversé. Artiste commercial ou véritable génie, il se place au cœur des polémiques et inspire la fascination. Celui qui disait toujours que chacun d’entre nous avait le droit à Son quart d’heure de gloire est le point de départ de toute une réflexion sur le phénomène de starification. Un questionnement sur l’attrait magnétique que peuvent générer les projecteurs de la célébrité et du show biz, l’envie assumée ou non de faire partie de ce monde de froufrous et paillettes.
La pièce s’articule autour de deux narrations parallèles. D’une part le récit de Suzanne, jeune provinciale naïve et paumée qui quitte son Kansas natal avec le désir ardent de fouler le bitume new-yorkais. La tête pleine de rêves, ou plutôt d’illusions, cette jeune cruche au passé chaotique est prête à tout -en l’occurrence au pire – pour jouir de son fameux quart d’heure de gloire.
Elle interpelle le public, le prend pour confident et lui livre son parcours. Son enfance malheureuse, les liens troubles qu’elle entretient avec sa famille, son passage en hôpital psychiatrique mais surtout sa déchéance, sa détresse. Sans réel talent, Suzanne écume les soirées branchées pour dealer quelques pilules colorées et autres poudres blanches. Le quotidien sordide de la jeune femme est un bien lourd tribut à payer pour celle qui n’aspire qu’à un petit moment dans la lumière.
D’autre part, le spectateur assiste à une interview d’Andy Warhol – campé par un Pieryk Vanneuville surprenant – réalisée par une jeune étudiante en journalisme transie d’admiration face à ce mythe vivant qui daigne répondre à ses questions. Cet entretien s’inspire de différentes interviews réalisées par l’artiste et habilement réécrites par l’auteur ( Laura Domenge). Au fur et à mesure de l’entrevue, l’étudiante se rend compte de l’absurdité du personnage, un homme extravaguant, suffisant et surtout profondément creux.
Le texte est drôle, cinglant, cynique, le rythme est cadencé et la prestation de Cécile Martin remarquable. Le ton est juste et le pathos brillamment détourné au service d’une réflexion on ne peut plus contemporaine.
L’interaction entre ces deux narrations est assurée par un choix de mise en scène sobre et dépouillé où transparait un réel souci du détail pour coller au plus prés à la réalité de cette époque.
My 70’s Show prend des risques et fait preuve d’audace avec l’intervention régulière de projections vidéos à la patine 70’s. Réalisés par Xavier Bazoge, les clips vidéos font à la fois office de décor mais aussi de personnage à part entière, ils permettent aux spectateurs de capter l’atmosphère des célèbres soirées de la Factory et participent entièrement à l’esthétique symbolique d’une époque mythique et tumultueuse.
My 70’s show balaie d’un revers toutes les étiquettes, les prénotions et autres normes de l’exercice. Cette pièce pousse le théâtre dans ses retranchements et lui insuffle un caractère ouvert et interactif où le son, l’image et l’interprétation des comédiens interagissent avec subtilité et justesse.
Louisa Ould
My 70’s Show
Ecrit et mis en scène par Laura Domenge
Avec Cécile Martin, Pieryk Vanneuville et Laura Domenge
Produit par la compagnie “Drôle de rêve”
Représentations:
Vendredi 4 juin à 19h
Mardi 8 juin à 22h
Vendredi 11 juin à 20h30
Ciné 13 théâtre
1 av. Junot 75018 Paris
Contact: 01 47 27 98 85
Métro: Lamarck-Caulincourt/ L12.
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