Philippe Cognée et Clay Ketter – galerie Daniel Templon
Philippe Cognée fait partie de ces artistes qui jouent avec la distance du regard et les modes perceptifs du visiteur. Ses tableaux proposent une double expérience : vues de près, ses toiles sont essentiellement abstraites et matiéristes, vue de loin, l’image figurative se révèle esquissant des espaces urbains déserts et flous. De fait, l’artiste retient en priorité la lumière qui se dégage des volumes afin de privilégier leur impact sensible. Philippe Cognée travaille à partir de photographies prises avec un téléphone portable et dont la qualité, on s’en doute, est plus que limitée. C’est ainsi qu’il commence à déplacer son regard, à décomposer l’image. Le résultat, très énergique, a quelque chose d’inquiétant. Les sujets traités sont quotidiens, les différents espaces de la ville (supermarchés, passerelles d’aéroports, halls d’immeubles et couloirs d’hôtels), mais l’absence totale de présence humaine, de sujet vivant, rend ces espaces étrangement silencieux. Ce silence est troublant, apaisant, attirant puis, soudain, glaçant. Ainsi, comme les deux temps du regard que la forme semi abstraite, semi figurative génère, ces tensions contradictoires installent plusieurs temps dans l’impact sensible, émotionnel et affectif des tableaux.
Exposé dans le deuxième espace de la galerie (l’impasse Beaubourg, de l’autre côté de la rue), l’Américain Clay Ketter joue avec les techniques mixtes. L’artiste photographie en vue aérienne parfaitement parallèle au sol ce qu’il reste après un ouragan de la force de Katrina à la Nouvelle Orléans. Ce qu’il reste, en l’occurrence, ressemble certes à des débris, mais révèle de façon plus troublante et plastiquement intéressante, les plans des maisons arrachées. Nous voilà donc devant des plans urbains schématiques mais dont les derniers matériaux meurtris encore accrochés au sol (lames de plancher, carrelage, poutre…) rappellent l’histoire dramatique vécue par ses habitants. Rebondissant sur ces effets de matière, Clay Ketter recompose avec différents matériaux ses propres photos soit en les mêlant à ses compositions mixtes, soit en créant un « double » d’une photo, sa réplique donc qui combine peinture, bois, stuc, plâtre ; des matériaux empruntés aux deux champs distincts des arts plastiques et des chantiers de construction. Très matiéristes, ces tableaux réinterprètent donc les paysages dévastés des prises de vues initiales. Nous pouvons néanmoins nous interroger sur la valeur de cette démarche car, si le résultat est bon, les travaux initiaux purement photographiques ont une force, une efficacité et une simplicité plastiquement bien plus convaincante. Nous ne pouvons donc nous empêcher de penser qu’elles pouvaient largement suffire au projet de l’artiste qui semble dès lors en faire trop. Mais nous retiendrons néanmoins l’intérêt de la valeur expérimentale d’une telle approche même si elle génère des inégalités.
Bien que clairement distinguée par les deux espaces de la galerie Daniel Templon, l’association des artistes Philippe Cognée et Clay Ketter tombe sous le sens. Leurs travaux figuratifs ont ainsi pour point commun d’interroger leur potentiel d’abstraction, d’émancipation vers une énergie pure et un épuisement de l’image familière.
Lorraine Alexandre
Passages de Philippe Cognée et New Paintings de Clay Ketter à la galerie Daniel Templon
Jusqu’au 31 décembre 2009
Du mardi au samedi de 10h à 19h
Galerie Daniel Templon
30, rue Beaubourg et Impasse Beaubourg
75003 Paris
M° Rambuteau
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