Regard sur la 66ème Mostra de Venise : l’engagement politique et cinéphilique.
Une sélection politiquement engagée.
Cette année, la Mostra de Venise nous montre dans sa sélection une certaine forme d’audace à travers le regard critique de réalisateurs venus d’Iran, d’Israël et des Etats-Unis, sur les événements politiques qui ont traversé leur pays.
Shirin Neshat nous éclaire sur la condition féminine en Iran, avec Women without Men, qui traite de la vie de cinq femmes, venant de classes sociales différentes, qui, en 1953, souffrent chacune de leurs situations respectives.
Le réalisateur israëlien Samuel Maoz revient quant à lui, dans la veine de Valse avec Bachir, sur l’enrôlement militaire de la jeunesse israëlienne en 1982, au moment du conflit armé avec le Liban. Les Etats-Unis ne seront pas en reste avec le nouveau pamphlet très attendu de Michael Moore, Capitalism: A love story, critique féroce de la crise financière, “la plus grande escroquerie de l’histoire américaine” . Enfin, Todd Solondz, star montante du cinéma indépendant américain, revient après Palindromes enrichir sa galerie de monstres ordinaires avec Life during Wartime, décrit comme la suite d’Happiness, critique acerbe des travers de la société américaine middle class.
Comme un écho à cette sélection officielle, la direction de la Mostra a décidé de projeter in extremis le nouveau film de la jeune Iranienne Hana Makhmalbaf, Green Days, qui alterne séquences documentaires du début des manifestations qui ont secoué l’Iran et séquences de fiction sur la condition des femmes dans le pays.
Les deux nations reines : l’Italie et les Etats-Unis.
Avec respectivement 24 et 17 sélections, toutes sections confondues, l’Italie et les Etats-Unis font figure de poids-lourds dans cette 66ème édition. Dans la sélection officielle, l’Italie donne davantage le change à la tension dramatique avec trois de ses films en compétition : La Doppia Ora de Giuseppe Capotondi, Il Grande sogno de Michele Placido (auteur de Romanzo Criminale) et le film de la fille du cinéaste Luigi Comencini, Francesca, avec Lo spazio bianco qui raconte l’histoire d’une mère qui attend à travers le hublot de la couveuse que sa petite fille, né prématurée, naisse une seconde fois.
On retrouve les Etats-Unis dans des films plus genrés et le premier long-métrage du couturier Tom Ford, A single man.
La France quant à elle sera notamment représentée par Patrice Chéreau qui dévoilera son dernier opus Persécution avec Romain Duris et Charlotte Gainsbourg. Claire Denis viendra présenter White Material, l’histoire de Maria (Isabelle Huppert), une femme blanche farouche et brave, qui refuse de renoncer à sa récolte de café, alors que la province africaine dans laquelle elle vit est en proie à la rébellion. Enfin, Jacques Rivette, auteur symptomatique de la Nouvelle Vague, dévoilera à 81 ans sa comédie 36 vues du Pic Saint Loup avec Jane Birkin.
Le cinéma de genre mis à l’honneur : SF, fantastique, horreur & film noir.
Le cinéma de genre aura toute sa place cette année à la Mostra, témoignant d’un parti-pris cinéphilique de la direction de donner à voir tous les courants, y compris le cinéma d’horreur, souvent mis à la marge.
En compétition officielle, Mr. Nobody de Jaco van Dormael renoue avec le fantastique avec l’histoire de Nemo Nobody, 120 ans, doyen et dernier mortel d’un monde heureux peuplés d’immortels.
Werner Herzog prône quant à lui avec Bad Lieutenant : Port of Call New Orleans, une nouvelle forme de film noir à travers la descente aux enfers d’un flic pourri et drogué, accumulant les dettes.
La SF sera l’un des genres les mieux représentés avec l’adaptation très attendue du roman-culte de Cormac McCarthy, The Road. Dans une atmosphère post-apocalyptique, le film réalisé par John Hillcoat raconte l’histoire d’un père (Viggo Mortensen) qui, suite à une explosion nucléaire, veut mettre son fils à l’abri. Mais les batailles font rage dans la ville entre les survivants et les cannibales… Dans la même veine, les couleurs du Japon seront défendues par Shinya Tsukamoto qui nous offre avec Tetsuo the Bullet le dernier volet de la trilogie Tetsuo après Tetsuo The Iron Man et Tetsuo Body Hammer.
Enfin, l’horreur sera mis à l’honneur avec l’un des maîtres du genre, spécialiste es-zombies : George Romero qui, avec Survival of the dead, continue sa saga entamée en 1968 avec La nuit des morts vivants.
Cette année le jury sera présidé par Ang Lee déjà couronné deux fois à Venise en 2005 pour Le Secret de Brokeback Mountain et en 2007 pour Lust, caution. Parmi les jurés, on retrouve l’actrice Sandrine Bonnaire, la réalisatrice italienne Liliana Cavani et le réalisateur américain Joe Dante. Place au cinéma !
Sophie Gasol.
Articles liés
“Un siècle, vie et mort de Galia Libertad” à découvrir au Théâtre de la Tempête
C’est Galia Libertad – leur amie, leur mère, leur grand-mère, leur amante – qui les a réunis pour leur faire ses adieux. Ce petit groupe d’amis et de proches, trois générations traversées par un siècle de notre histoire, se retrouvent...
“Chaque vie est une histoire” : une double exposition événement au Palais de la Porte Dorée
Depuis le 8 novembre, le Palais de la Porte Dorée accueille une double exposition inédite, “Chaque vie est une histoire”, qui investit pour la première fois l’ensemble du Palais, de ses espaces historiques au Musée national de l’histoire de...
“Les Imitatueurs” à retrouver au Théâtre des Deux Ânes
Tout le monde en prend pour son grade, à commencer par le couple Macron dans un sketch désormais culte, sans oublier Mélenchon, Le Pen, les médias (Laurent Ruquier & Léa Salamé, CNews…), le cinéma, la chanson française (Goldman, Sanson,...