“The Reader” de Stephen Daldry
« Derrière le mystère se cache une vérité qui vous fera remettre en cause toutes vos certitudes » : Il est important d’aborder ce film en en sachant le moins possible. Résumons-le ainsi : dans les années 1950 en Allemagne, un jeune garçon de 15 ans rencontre par hasard une femme d’âge mûr dont il va subitement tomber amoureux. Une relation va alors s’instaurer entre eux, mais un mystère au lourd passé risquera de leur porter préjudice…
Lourd destin que le projet de cette adaptation. Alors que les droits avaient été achetés par Anthony Minghella et qu’il s’agissait de l’un de ses nombreux projets, c’est finalement le réalisateur anglais de Billy Elliott qui s’est emparé du projet. Produit par le réalisateur du Patient Anglais et par l’acteur- metteur en scène Sidney Pollack, le hasard a voulu que ces deux personnalités majeures du cinéma d’Outre-Atlantique disparaissent tragiquement peu avant le début du tournage. C’est pour cette raison que le film leur est légitimement dédié.
Le scénario de The Reader est divisé en deux parties représentant deux époques différentes. On pourra être surpris au début du film par ces allées et venues entre ces deux périodes distinctes. La première se déroule peu après la seconde guerre mondiale où l’on suit l’éducation sexuelle et intellectuelle du jeune garçon tandis que la deuxième se passe en 1995, 6 ans après la chute du mur de Berlin dans une Allemagne nouvelle. Ce procédé permet au film de trouver un rythme prenant et instaure intelligemment un certain suspense.
La révélation du film est sans conteste l’Allemand David Kross qui, avec sa beauté juvénile et sa jeune innocence, n’a pas peur d’être impudique et de montrer ses vrais sentiments. Face à lui, Kate Winslet nous impressionne toujours autant et nous sommes à nouveau très loin de sa performance dans Titanic. Après Les Noces Rebelles de Sam Mendes, elle nous dévoile une fois de plus une autre facette dramatique et émouvante de son talent, bien que la nature de son personnage pourra gêner certains spectateurs.
Doit-on pardonner à une personne qui a commis le mal malgré les sentiments que l’on ressent pour elle ? Le droit moral doit-il être alors remis en cause ? Toute vérité est-elle bonne à dire ? Le souci majeur de ce film est qu’il aborde un sujet, non pas tabou, mais délicat puisqu’il évoque la seconde génération de ceux qui sont nés après la guerre et qui cherchent à comprendre ce qui s’est passé (nommé sous le terme de vergangenheitsbewaltigung : la lutte pour essayer de se confronter au passé).
Avoir choisis l’anglais comme langue originale porte beaucoup à confusion et nous écarte du récit au lieu de nous en rapprocher lors de la deuxième partie. Avec un faux accent anglo-allemand, les personnages tendent à se caricaturer eux-mêmes, ce qui rappelle au spectateur la part de fiction de l’histoire : une légère déception quand on sait que le roman était en partie autobiographique. Cependant et à côté de cela, on ne peut que compatir pour le personnage principal (joué par Ralph Fiennes) qui nous prend à témoin et nous livre son terrible secret.
Malgré une première partie très réussie, Stephen Daldry tombe dans l’excès de sentiments en ayant recours à une musique trop présente, rappelant à bien des égards son précédent film The Hours . On sera à la fin tout de même touché par cette histoire d’amour tragique qui aborde un sujet que l’on avait rarement vu au cinéma.
Sortie le 15 Juillet 2009
Réalisé par Stephen Daldry
Avec Kate Winslet, Ralph Fiennes, David Kross
Durée : 2h 03 min
Edouard Brane – http://www.cinedouard.com
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