Brûlez-là : une performance exceptionnelle autour de Zelda Fitzgerald
Brûlez-là ! De Christian Siméon Mise en scène de Michel Fau Avec Claude Perron et Bertrand Schol Du mardi au samedi à 18h30 Tarifs: de 12 à 31 euros Réservation en ligne ou par téléphone au 01 44 95 98 21 Durée : 1h10 Théâtre du Rond-Point |
Jusqu’au 19 juin 2016
Creusant le mythe de Zelda, l’épouse du grand écrivain américain Scott Fitzgerald, l’auteur et sculpteur Christian Siméon offre un monologue brûlant, sidérant de liberté et de provocation à la comédienne Claude Perrron qui s’en empare comme d’une torche, avec incandescence. Au Théâtre du Rond-Point, le metteur en scène Michel Fau souffle sur ces flammes. Incarnation d’un mythe Rien de plus fascinant pour un écrivain que le parcours de personnages mythiques. Icône des années 1920, jeune femme émancipée et audacieuse, provocante, brillamment intelligente, Zelda Fitzgerald incarna tout le contraire de ce qu’on attendait d’une jeune fille de bonne famille en Amérique. Son magnétisme et son goût du scandale, de la séduction et des hommes, en firent l’égérie, la muse et l’épouse de l’écrivain Scott Fitzgerald, qui lui emprunta somme toute une bonne partie de son talent. Auteur de nouvelles, la jeune femme mena avec son auteur de mari une existence baignée par le luxe, les mondanités et l’alcool qui coulait à flots, en développant rapidement un sentiment de frustration concernant sa propre créativité. Obsessionnelle de la danse, atteinte de troubles psychiatriques et soignée aux électrochocs et à l’insuline à forte dose, elle finira par périr à 47 ans dans les flammes d’un incendie dans l’hôpital psychiatrique où elle était enfermée depuis 1936. Une performance d’actrice Le corps gainé dans un long tutu de danseuse classique, une paire d’ailes suspendues à ses omoplates, des pointes au bout de ses pieds, Claude Perron nous parle, regard clair au maquillage cerné de noir, derrière le petit monticule rose qui figure l’institution psychiatrique qui n’arrange pas sa folie. Est-elle folle ? Schizophrène ou sauvage ? Ou ange, tout simplement, vibrante d’énergie et de vitalité débordante, imaginaire convulsif et humour ravageur. Ce qu’elle accomplit face public, dans cet espace onirique et surréaliste, en nous racontant des épisodes de sa vie qui oscillent entre le ridicule et la tragédie, est tout simplement époustouflant. Le sentiment d’étouffement, de rage, la façon qu’elle a de se moquer et de mimer son entourage, le corps en mouvement, les grimaces de clown, la jalousie envers Ernest Hemingway, ami intime de Scott et son grand rival, qu’elle ridiculise au tennis dans un match mémorable accompli en direct sur la scène, Claude Perron les exprime du plus profond de son énergie physique et de son humour caustique. Femme sacrifiée et sorcière Femme sacrifiée, sorcière, la Zelda de Christian Siméon est tout cela, et plus encore l’incarnation mythique des muses, inventives et sauvages, bridées par la société et le machisme des hommes, et qui se sont abimées en y laissant trop de plumes. La force de ce monologue réside dans le fait de dépasser le simple récit anecdotique et people d’une héroïne des années folles en multipliant les pistes et les digressions jusqu’à nous la rendre très actuelle et très drôle. Claude Perron joue Zelda mais c’est Zelda qui, ici, devient sur scène Claude Perron, petit ange blanc dans un décor tout rose, sucré comme un candy, ravagé par les mégots de cigarettes consumées. Les phrases rythmées du monologue s’enroulent dans sa respiration, les mots se lovent dans ses rires, les invectives crissent comme des pneus d’une limousine. L’auteur a trouvé sa muse, grâce au remarquable travail de Michel Fau à la mise en scène. Chapeau les artistes. Hélène Kuttner [ Crédit Photos : © Thi Debadier] |
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