Ma vie avec Liberace – drame avec Michael Douglas et Matt Damon
Liberace. Pour les profanes du continent européen, où le personnage ne fut jamais très connu, le nom évoquerait plus volontiers quelque révolutionnaire cubain. Et pourtant, ce fut en réalité celui d’un pianiste de cabaret américain, popstar qui scintillait d’autant plus à l’horizon des Seventies que « toute l’industrie du strass autrichien » lui fournissait de quoi orner ses costumes.
C’est de cette personnalité aux goûts grandiloquents que Steven Soderbergh a choisi de faire le bopic, dans Ma Vie Avec Liberace (Behind The Candelabra, en version originale). A moins qu’il ne s’agisse en fait de l’éducation sentimentale d’un jeune ingénu, qui tente de s’épanouir dans ce que la star lui laisse de projecteur ; on ne sait pas trop et c’est tant mieux.
Ce qu’on sait, en revanche, c’est que c’est Michael Douglas qui se glisse dans la peau de Liberace. Et on ne peut qu’être reconnaissant au réalisateur d’avoir fait ce choix audacieux, car on ne tarde pas à s’apercevoir que Michael Douglas y est absolument incroyable. Mégalomane, manipulateur, possessif, Liberace est loin de libérer « son blond Adonis », comme il aime à le surnommer. Il l’oppresse, le défigure (littéralement). C’est un tyran affectif, qui n’aime que lui-même. Mais Liberace est aussi un personnage drôle et attachant, rocambolesque, extravagant, parfois terriblement prosaïque, humain après tout. Michael Douglas, à la fois sucre et fiel, écrasant et fragile, fait ressentir au spectateur la fascination qu’il exerce sur le jeune et impressionnable Scott Thorson.
Thorson est d’ailleurs tout aussi ambigu que son modèle. Semble-t-il d’abord aspirant gigolo, puis amoureux transi, il est constamment ébloui par le rayonnement de Liberace, qu’il sait toutefois être factice. Matt Damon cultive pour ce rôle un air niais qui, certes, doit beaucoup à la coupe de cheveux improbable, mais qui lui permet aussi de se révéler meilleur acteur que dans plus des trois quarts des productions où on a pu le voir cabotiner dernièrement.
La caméra de Soderbergh, quant à elle, a l’intelligence de filmer cet univers kitsch à l’extrême sans jamais se laisser entacher par lui. Ainsi, la démesure qui fait la vie de Liberace n’envahit pas l’œil du spectateur. C’est la vie-même de Liberace, qui s’offre au regard, à l’instar de ses shows de Vegas, toujours dans le clinquant, toujours dans l’excès. Et c’est l’occasion pour Soderbergh de dénoncer la mauvaise foi de l’Amérique de cette époque, qui refuse de voir au-delà des paillettes ; se laisse duper en toute conscience de cause pour que le spectacle continue ; fait mine d’ignorer l’homosexualité de son idole parce qu’elle est dérangeante et qu’il est beaucoup plus facile de ne pas chercher à gratter sous le vernis. Jusqu’à temps que le mythe déchoie de son piédestal et qu’il soit l’heure de venir salir la mémoire de ce qu’on a tellement encensé en allant jusqu’à en profaner le cadavre.
C’est d’ailleurs dans ses toutes dernières scènes que Michael Douglas s’avère le plus bouleversant ; quand, le visage décomposé, tout petit au milieu de son Xanadu édulcoré, il supplie pour qu’on préserve le mensonge érigé en héros, l’image de marque pour laquelle il a vécu. Ce Michael Douglas là, aucun réalisateur ne nous l’avait plus montré depuis longtemps. Ne serait-ce que pour cela, on doit à Steven Soderbergh une fière chandelle. Impossible de ne pas se dire, à l’issue de la séance, qu’on aimerait finalement bien en apprendre davantage sur ce Liberace incarné avec tant de brio, derrière le candélabre posé sur le piano.
Raphaëlle Chargois
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BAFTA Awards 2014 (16 février)
- 5 nominations : Meilleur acteur dans un second rôle, Meilleur scénario adapté, Meilleurs décors, Meilleurs costumes et Meilleurs maquillages
Directors Guild of America Awards 2014 (25 janvier)
- Nomination : Meilleur réalisateur de mini-série ou de téléfilm
Producers Guild of America Awards 2014 (19 janvier)
- 1 prix : Meilleur mini-série ou téléfilm
Screen Actors Guild Awards 2014 (18 janvier)
- 1 prix : Meilleur acteur dans une mini-série ou un téléfilm
Golden Globes 2014 (12 janvier)
- 2 prix : Meilleur acteur dans une mini-série ou un téléfilm et Meilleure mini-série ou téléfilm
- Nomimations : Meilleur acteur dans une mini-série ou un téléfilm et Meilleur acteur dans un second rôle pour une Série, une Mini-Série ou un Téléfilm
Emmy Awards 2013 (22 septembre)
- 3 prix : Emmy Award de la Meilleure Mini-Série ou Téléfilm, Emmy Award du Meilleur Acteur dans une Mini-Série ou Téléfilm et Emmy Award de la Meilleure réalisation pour une mini-série ou un téléfilm
- Nominations : Emmy Award du Meilleur Acteur dans une Mini-Série ou Téléfilm, Nommé Emmy Award du Meilleur Acteur de second rôle dans une Mini-Série ou Téléfilm et Emmy Award du Meilleur scénario pour une mini-série ou un téléfilm
Festival du Cinéma Américain de Deauville 2013 (du 30 aout au 8 septembre)
- Premières – Hors compétition
Festival de Cannes 2013 (du 15 au 26 mai)
- Sélection officielle
Ma vie avec Liberace
De Steven Soderbergh
Avec Michael Douglas, Matt Damon, Dan Aykroyd, Scott Bakula, Rob Lowe, Tom Papa, Paul Reiser et Debbie Reynolds
Durée : 118 min.
A découvrir sur Artistik Rezo :
– les films à voir en 2013
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