Gilbert1 : « Mon maître mot c’est l’expérimentation »
Gilbert1 : « Mon maître mot c’est l’expérimentation » Exposition à la Galerie Artistik Rezo Oeuvres de Gilbert1 Du 31 mai au 6 juillet 2017 Vernissage le mercredi 31 mai de 18h à 21h Entrée Libre Galerie Artistik Rezo |
Des lignes, des courbes, nuances de gris ou chromatiques, en dessin ou en volume, l’univers artistique de Gilbert1 est aussi hétéroclite que cohérent. Un style bien personnel mais en perpétuel renouvellement que l’artiste plasticien nous fait découvrir en vue de sa prochaine exposition.
Tes créations sont très diverses, du dessin noir et blanc à l’installation monumentale en matières et en couleurs. Comment travailles-tu ? J’ai la chance de travailler dans un très grand atelier, un site industriel désaffecté de 800m2. Ça permet de voir les choses en grand. A l’origine, j’ai travaillé in situ dans ce genre d’espaces à réinvestir. Mes créations sont très libres, en accord avec leur environnement. C’est cette liberté que j’essaye de retranscrire dans mes œuvres. Je peux passer du dessin ou de la peinture sur toile ou des matériaux de récup à des réalisations monumentales de 60-70kg in situ. Il y a donc une réflexion sur l’ensemble du projet et sur les contraintes techniques. C’est vrai qu’il y a un travail énorme, notamment sur ces installations en trois dimensions ou sur les mobiles. Ce n’est pas trop compliqué de les transporter, de les conserver ? A mesure que mon travail a évolué vers l’installation et des œuvres beaucoup plus imposantes, j’ai dû réfléchir à cet aspect pratique qui fait désormais partie du processus. L’encadrement fait pleinement partie du travail, et vient s’intégrer aux réalisations. Mais ça ne me dérange pas, au contraire, c’est une nouvelle manière de travailler la matière et de concevoir le volume dans l’espace. Raconte-moi un peu ton parcours artistique. Ça s’est fait un peu par hasard, au gré de rencontres. J’ai principalement découvert les arts plastiques par moi même une fois adulte, et je n’ai suivi aucun cursus dans ce domaine, je suis totalement autodidacte. C’est à travers le tag, le graffiti que j’ai découvert le monde de l’art et surtout que je me suis découvert un goût pour la peinture. Le graffiti m’a ouvert les yeux, c’est là que j’ai compris ce que je voulais faire et ce qui me correspondait vraiment. L’art me catalyse totalement, il m’apaise et me comble. La recherche d’une écriture, de typographies, de lettrages, m’a mené à construire mon propre graphisme, mon identité personnelle et mon style, ce qui me plaisait, ce que j’avais envie de réaliser. Ça fait 12 ans que je m’y consacre pleinement et le chemin a été très dur, je commence à en vivre depuis 3 ans puisque j’ai arrêté de faire de petits boulots en parallèle, et ça me rend vraiment heureux. Et cette identité artistique justement, aujourd’hui bien établie, comment l’as-tu forgée ? Mon maître mot, c’est l’expérimentation. Toujours tenter de nouvelles choses, évoluer, utiliser d’autres couleurs, d’autres techniques, d’autres matières. Je ne reste pas figé, je suis en renouvellement constant, avec de nouveaux supports, formats à appréhender. Et je veux continuer, toujours, à expérimenter de nouvelles choses. J’ai l’impression de repartir à zéro à chaque œuvre. J’ai envie d’aller plus loin, de montrer autre chose, de me surpasser. Sinon on s’ennuie non ? Il ne s’agit pas forcément de changer l’intégralité des matériaux mais de les utiliser différemment. Les matériaux justement. J’ai l’impression que tu utilises surtout des matériaux bruts, sans trop les transformer, les dénaturer. Oui tout à fait. Le but est de garder des marques visibles. De laisser voir leur histoire, et de leur donner une nouvelle vie, pour que les spectateurs s’interrogent sur leur passé. Une renaissance, en quelque sorte. J’utilise des matériaux industriels essentiellement et pas du tout de plastique par exemple. C’est trop synthétique. Je préfère le brut, le basique : le bois, le carton… Il n’y a pas de transformation fondamentale de la matière, mon travail porte plutôt sur la forme, sur les couleurs. J’utilise tout un tas de matériaux que je trouve autour de moi : dans la rue, des restes d’anciennes productions… J’essaye de leur redonner vie à partir de graphismes que j’ai en tête. D’ailleurs, je donne aux œuvres le nom du matériau principal utilisé. C’est un travail totalement libre d’interprétation, je ne veux pas me mettre entre les spectateurs et les réalisations. Je ne veux pas m’interpréter moi-même et je ne cherche pas absolument à représenter. Tu ne cherches pas à représenter, mais tes œuvres parlent du monde qui t’entoure non ? L’idée d’effondrement est omniprésente dans mes installations, avec le renfort de l’équilibre et de la suspension dans mon travail sur les mobiles par exemple. C’est un peu une métaphore de la société actuelle : une société qui s’écroule, qui va mal, mais l’espoir qui persiste. La possibilité de renaître de ses cendres, de récupérer ce qui reste, de conserver une trace de l’histoire passée, et redonner un souffle de vie. Moi ça me permet de garder espoir. Mon travail me permet de surpasser le monde dans lequel on vit. Le graff m’a canalisé quand j’en avais besoin et aujourd’hui l’art me permet de tenir le coup. C’est une libération, c’est ma bulle personnelle, c’est ce dépassement que je décris dans mon travail. Dépasser le tragique et trouver l’espoir dans le fond. Un travail sur les matériaux brut puis une recherche poétique pour les installations et dans la réalisation. Les couleurs ont une place importante dans ton travail, mais pas n’importe lesquelles. Tu as une palette bien définie. Qu’est-ce qu’elle signifie pour toi ? J’ai commencé par utiliser les couleurs primaires : bleu, jaune, rouge. Elles sont fortes et suffisantes. J’aimais le jeu sur ces trois couleurs et toutes leurs possibilités. Et c’est cette palette qui a évolué (par un travail sur différentes teintes de bleu, le passage du rouge au orange…) C’est une sorte de réponse au trio gris-noir-blanc de la matière brute. Je travaille avec une palette réduite pour sa simplicité et son efficacité. Du dessin à la sculpture en relief, on retrouve les mêmes motifs, les mêmes inspirations. Est-ce que tu travailles d’abord des dessins avant de passer aux installations ? Non du tout, ce sont deux manières de travailler totalement distinctes ! Le dessin, le travail sur papier est très spontané. L’assemblage aussi, il n’est pas vraiment préparé. C’est le moment et l’environnement qui fait l’œuvre. Selon le contexte, ce qui m’entoure, où je me trouve, ça prend forme dans ma tête. Donc il n’y a pas de préparation ou de dessin initial. Le volume est venu naturellement. Je pensais à des graphismes, et puis en tombant sur des matériaux j’ai essayé de les assembler. C’est un travail déstructuré, pas une recherche lignée. Ce qui fait que mes dessins ne se retrouvent jamais en volumes. Que peux-tu nous dire de ta prochaine exposition à la Galerie Artistik Rezo [ du 31/05 au 01/07] ? En ce moment, je travaille beaucoup l’art optique et l’art cinétique. J’ai envie pour cette exposition de montrer des œuvres à la frontière des deux. Je vais aussi exposer quelques dessins, des sérigraphies. L’idée c’est de présenter un maximum de supports variés sur lesquels je peux travailler : des volumes, des peintures ou des assemblages. Il y aura différentes sculptures, des mobiles dans des caisses à munitions récupérés d’une ancienne caserne militaire, des assemblages sur carton, des sérigraphies uniques. Cela tournera autour de la désillusion, et de l’illusion optique. Anna Maréchal [Crédits : Photo 1 © Gilbert1 / Photo 2 Orlinda Lavergne Gallery – Lux Art Fair © Gilbert1 / Photo 3 assemblage sur porte © Gilbert1 / Photo 4 Le MUR Mulhouse en collaboration avec l’artiste Etnik © Gilbert1 / Photo 5 dessin noir et blanc © Gilbert1] |
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