Jérémie Graine à l’étroit dans sa tête – Petit théâtre du Kibélé
Jérémie Graine à l’étroit dans sa tête Texte et mise en scène : Jérémie Graine Collaboration artistique : Aurélie Bouquet Graphisme : Clément Deneux // Photos : Eve Dufaud Jusqu’au 28 janvier Durée : 1h10 Petit théâtre du Kibélé |
Jusqu’au 28 janvier 2014
Un redoutable comédien, du texte, de l’humour parfois noir et beaucoup d’autodérision font de cet OVNI scénique une excellente surprise. Un jeune talent à suivre et à soutenir. Rares sont les spectacles qui méritent qu’on s’en injecte une piqure de rappel afin qu’ils poursuivent en nous leur délicieuse contamination. Lorsque la subtilité s’invite au détour de chaque réplique, lorsque la référence aussi discrète qu’efficace vous laisse perplexe, dubitatif ou interrogateur, lorsque le foisonnement d’idées se heurte à l’entendement parce que l’habitude de la scène vous a confortablement installés dans du cognitivement supportable, du politiquement correct et de l’irrémédiablement déjà vu et entendu… Se laisser happer par un comédien, par son univers, par son jeu, son phrasé à nul autre pareils, c’est rare… Très rare. Jérémie Graine est précisément quelqu’un de rare. Une trentaine d’années à peine et l’ahurissante capacité scénique de ceux qui pourraient être ses pères. Un jeu d’une précision métronomique, polymorphe et entier. La scène le métamorphose, le transcende. Là où d’aucuns se contenteraient de savoir jouer, il va beaucoup plus loin, maniant avec une stupéfiante facilité l’art difficile du mime. Capable de chorégraphier trois fois rien, il démarre son désopilant spectacle par un exercice visuel confondant, virtuose et qui capte le spectateur en quelques secondes. Sans oublier ce talent, il poursuit en nous décrivant les affres d’un personnage étrange et familier à la fois. Un comédien qui s’interroge entre un lapin posé à une directrice de casting et un rôle dans un film de Spielberg. Le propos donne lieu à de joyeuses digressions sur la conscience, la morale que son « tyran intérieur » active au gré de ses tergiversations. Les pires horreurs proférées sur l’autel de la rigolade prennent une saveur délicatement irrévérencieuse, qu’il s’agisse d’évoquer les milieux de la finance, les rapports entre Dieu et son célèbre rejeton, les affres de la célébrité où encore son patronyme. Le tout est mâtiné d’un zest d’absurde et d’un soupçon de surréalisme. Et d’une graine de folie, assurément… Ce garçon a en lui les germes d’un futur grand. C’est maintenant qu’il faut le soutenir… Franck Bortelle |
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