Michaël Borremans – As sweet as it gets – Bozar
Michaël Borremans – As sweet as it gets Commissaire : Jeffrey Grove, Ph.D. Du 22 février au 3 août 2014 Bozar |
Du 22 février au 3 août 2014
« Un état intermédiaire, un interstice pouvant tenir lieu d’interface entre le physique et la métaphysique, voilà ce qui m’intéresse… » Les espaces disparates imaginés et concrétisés par Michaël Borremans (né en 1963) dans sa peinture, ses dessins et ses films sont unifiés par un sens ineffable du bouleversement, ils présentent des sujets et des scénarios saisis dans des états fascinants de l’intermédiaire et de l’indéterminé. Cet artiste belge fuit les connexions logiques et déjoue toute interprétation. Ces travaux explorent des états psychologiques complexes tout en contrariant la logique normative. Dans tout son œuvre, Borremans, qui aspire à « créer une atmosphère en dehors du temps, un espace d’où le temps a été effacé », déploie intentionnellement des signifiants qui entrent en collision dans des lieux ambigus. Borremans commença à réaliser ses premiers dessins et peintures à la fin des années quatre-vingt-dix et, depuis, il a créé un corpus d’une maturité incroyable, qui a retenu l’attention d’un public international. L’exposition « Michaël Borremans. As sweet as it gets », organisée en coopération par le Dallas Museum of Art et le Palais des Beaux-Arts (BOZAR) à Bruxelles, réunira près d’une centaine d’œuvres produites sur une période de quatorze ans, afin d’étudier et d’élucider l’univers pictural mystérieux et hallucinatoire de ce créateur singulier. Borremans, que ses études devaient conduire au métier de graveur, a enseigné l’eau-forte et la photographie jusque dans la trentaine bien avancée. Dessinateur dans l’âme, ce n’est pas avant la fin des années quatre-vingt-dix qu’il a commencé à se consacrer au dessin et à l’envisager comme une discipline à part entière. Ces dessins complexes, évocateurs de symboles, d’auras et de signifiants hallucinatoires, s’inscrivent dans un riche héritage artistique, mais sont ancrés fermement dans le présent. Dans les dessins, en particulier, les sujets sont parfois frappés de silence ou aveuglés et leur individualité niée. Si ces images sont à l’occasion cruelles, souvent elles circonviennent une association facile avec la violence, par la simple beauté de leur exécution. Ainsi, un dessin tel Glass and Blood (2001) semble décoratif, en partie grâce aux expressions bienveillantes du sujet. Rendues avec l’excès et ce goût des fioritures dont Boucher et Fragonard marquèrent leurs descriptions coquettes des bourgeoises légères du XVIIIème, ces figures désincarnées n’ont pas de réalité intérieure. Ces dernières années, et cela avec une facilité toujours plus manifeste, Borremans a fait de la peinture sa scène la plus imaginative. Canalisant de manière suggestive des précurseurs allant d’Édouard Manet et Gustave Courbet à Diego Vélasquez et à Francisco José de Goya y Lucientes, Borremans s’est sciemment et adroitement confronté à ces analogues visuels pour embrasser une peinture tant historique que matérielle. Dans The Devil’s Dress, 2011, par exemple, la référence au Torero mort de Manet (1864) est absolument inévitable. Or, là, comme souvent sur les tableaux de Borremans, le personnage central semble être impliqué dans un scénario troublant. La composition audacieuse, la narration curieuse et l’espace psychologique suggestif relient Borremans à la riche histoire du surréalisme qui se manifeste dans les œuvres de ses compatriotes René Magritte et Paul Delvaux, entre autres. Borremans, qui renverse intentionnellement l’incapacité supposée de la peinture à faire le portrait du mouvement, s’est forgé un style qui exploite non seulement le potentiel transcendant de la peinture, mais aussi ses qualités déterministes et illusoires. Il dilue ses huiles dans une recherche de transparence, consciente que ce processus les libère de leur état présent dans le temps et de leur matérialité, physique et métaphorique. Selon Borremans, l’application des couleurs ralentit plutôt qu’elle ne dissout le temps. Son intérêt pour la photographie et le film inspire sans aucun doute cet aspect de sa technique et le film – à la fois source d’inspiration et structure de composition – a exercé une influence de plus en plus forte sur sa pratique. Si ses premières peintures se fondaient souvent sur des photographies trouvées et des photos de film, Borremans, avec la maturité, s’est fait cinéaste et a créé des images mouvantes d’une beauté toute picturale. Certains films, en effet, et notamment The Storm (2006) (lui-même influencé par la réalisation d’un autre film du même auteur, The Feeding (2006)), ne ressemblent à rien de plus qu’à un film censé fonctionner comme une peinture. La réalisation de films ayant affiné et concentré sa pratique, les propriétés de l’espace et de la lumière et l’intemporalité immuable qui ont toujours baigné les tableaux de Borremans ont acquis des qualités plus filmiques. Une caractéristique qui relie encore plus sûrement les films foisonnants de Borremans à sa peinture, c’est leur silence, un silence terrible en relation avec l’immobilité de ses peintures. L’exposition « Michaël Borremans. As sweet as it gets », qui réunit pour la première fois une sélection sans précédent de films, de tableaux et de dessins, révèlera les réciprocités de ces disciplines dans l’art de Borremans, ainsi que son aptitude étrange à exploiter la perception de la réalité du spectateur et à la transformer par le biais de son imagination. Exposition itinérante : – BOZAR, du 22 février au 3 août 2014 |
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