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Harold Pinter

18 juin 2013
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Harold Pinter

Fils unique d’une famille juive, Harold Pinter voit le jour en 1930, dans une banlieue populaire de Londres. Son père, tailleur, touche un modeste salaire. Cette précarité de vie, ainsi que le contexte sombre et tourmenté de l’avant guerre, la montée du fascisme, l’horreur de la seconde guerre mondiale et ses génocides, marquent profondément l’artiste en herbe.

Sa famille fuit, en 1940, la capitale britannique, pilonnée par les bombardiers allemands. En 1948, le jeune homme refuse catégoriquement d’effectuer son service militaire. « J’étais conscient des souffrances et des horreurs de la guerre et je n’allais, sous aucun prétexte, contribuer à son entretien. J’ai dit non. Et je dirai encore non.», affirme-t-il. Son œuvre traduira sa haine profonde envers toutes formes d’oppression et assujettissement.

C’est sous le pseudonyme de David Baron que l’artiste fait ses premiers pas sur les planches. Le comédien se concentre bientôt sur l’écriture; il signe des poèmes suivis d’un roman semi-autobiographique, Les Nains (1952-1956), puis de deux pièces de théâtre en un acte, La Chambre (1957) et Les Monte-plats (1957). Ces premières représentations rencontrent un faible écho. Les pièces radiophoniques de Pinter, telle Une petite douleur, sont mieux accueillies par le public. C’est Le Gardien, en 1960, une pièce en trois actes, qui ouvre au dramaturge la voie du succès; dans un débarras où s’entassent des objets divers, deux frères et leur hôte, un clochard, individus à l’identité trouble, s’observent, se narguent, se tendent des pièges, cherchent tour à tour à prendre le pouvoir. La Collection (1961), L’Amant (1962), Tea party (1964) et Le Retour (1964) voient ensuite le jour. Claude Régy s’empare de cette dernière œuvre en 1966, dont la mise en scène triomphe à Paris.

Les pièces du dramaturge, baptisées « comédies de menace », présentent un style caractéristique. Son théâtre cultive une ambiguïté, suscite à la fois rire et angoisse, se prête à différentes interprétations. Il se situe au carrefour du théâtre de l’Absurde et d’un genre spécifiquement britannique, le néo-naturalisme propre à d’une génération d’auteurs anglais contemporains, les « Angry Young Men ». Ceux-ci dépeignent crument sur scène, en dépit de la bienséance, la violence sous ses diverses formes. Les personnages qui tentent de communiquer, demeurent victimes d’une solitude indépassable et voués à des rapports de force qui les dépassent.

Pinter se lance bientôt dans l’aventure du grand écran et collabore avec le réalisateur Joseph Losey. Il signe le scénario du film The Servant en 1962, adapte L’Accident (1967) et Le Messager (1969). En 1973, il réalise un long métrage tiré de la pièce de Simon Gray, Butley. Polyvalent, il est ainsi présent sur tous les fronts, théâtre, cinéma, radio et télévision. En 1971, il monte C’était hier ?, adapte au cinéma À la recherche du temps perdu (1972), et La Femme du lieutenant français (1980). Prolifique, il multiplie les pièces de théâtre, No Man’s Land (1975), Trahisons (1978), The Hot House (1980), Un pour la route (1984), Le Nouvel ordre du Monde (1991), La Lune se couche (1993), Ashes to Ashes (1996) ou encore Celebration (2000). L’auteur s’illustre également en tant que comédien dans ses propres pièces.

L’artiste s’engage politiquement et affiche, en 2003, son opposition à la guerre en Irak. En 2005, son œuvre est couronné par le Prix Nobel de littérature. Joué et rejoué à travers le monde entier, avec un succès qui ne se dément jamais, Harold Pinter, décédé d’un cancer en 2008, entre dans l’histoire du théâtre contemporain.

Jeanne Rolland

Bibliographie

Théâtre

  • 1957 : The Room (La Chambre)
  • 1957 : The Dumb Waiter (Le Monte-plats) 
  • 1958 : The Birthday Party (L’Anniversaire)
  • 1958 : A Slight Ache (Une petite douleur) 
  • 1958 : The Hothouse (Hot House)
  • 1959 : The Caretaker (Le Gardien) 
  • 1959 : Ébauches
  • The Black and White
  • Trouble in the Works
  • Last to Go
  • Request Stop
  • Special Offer
  • That’s Your Trouble
  • That’s All
  • Interview
  • Applicant
  • Dialogue Three
  • 1959 : A Night Out 
  • 1960 : Night School
  • 1960 : The Dwarfs 
  • 1961 : The Collection (La Collection) 
  • 1962 : The Lover (L’Amant) 
  • 1964 : Tea Party
  • 1964 : The Homecoming (Le Retour) 
  • 1966 : The Basement 
  • 1967 : Landscape 
  • 1968 : Silence 
  • 1969 : Ébauche : Night 
  • 1970 : Old Times (C’était hier) 
  • 1972 : Monologue
  • 1974 : No Man’s Land 
  • 1978 : Betrayal (Trahisons)
  • 1980 : Family Voices
  • 1982 : Victoria Station
  • 1982 : A Kind of Alaska
  • 1983 : Ébauche : Precisely 
  • 1984 : One For the Road 
  • 1988: Mountain Language 
  • 1991 : The New World Order 
  • 1991 : Party Time
  • 1993 : Moonlight
  • 1996 : Ashes to Ashes
  • 1999 : Celebration (Célébration)
  • 2002 : Ébauche : Press Conference

Poésie
 

  • Un verre à minuit

Autres

  • 1949 : Kullus
  • 1952-56 : The Dwarfs
  • 1953 : Latest Reports from the Stock Exchange
  • 1954-55 : The Black and White
  • 1955 : The Examination 
  • 1963 : Tea Party 
  • 1975 : The Coast
  • 1976 : Problem 
  • 1977 : Lola 
  • 1995 : Short Story 
  • 1995 : Girls
  • 1997 : God’s District
  • 1999 : Sorry About This
  • 2000 : Tess
  • 2001 : Voices in the Tunnel
  • 2003 : War

Récompenses et distinctions

  • Commandeur de l’ordre de l’Empire britannique, 1966
  • Membre de l’Ordre des compagnons d’honneur, 2002
  • Prix Nobel de littérature, 2005
  • Prix Europe pour le théâtre, 2006
  • Chevalier de la Légion d’honneur, 2007
  • Docteur honoris causa de l’université de Londres-Est

Citations

  • « C’est une ambiguïté que nous partageons tous. Je préférerais qu’elle n’existe pas, mais elle est au cœur de notre vie. » interview Lawrence Kitchin, B.B.C., 1963

  • « Au lieu d’une incapacité quelconque à communiquer, il y a en chacun de nous un mouvement intérieur qui cherche délibérément à esquiver la communication. »

  • « Je ne cherche certainement pas l’universalité. J’ai assez à faire pour écrire une foutue pièce ! »

  • « Quand on se sent incapable d’écrire, on se sent exilé de soi-même. »

[Visuel : Dessin de Reginald Gray. Graphite. Published in Pinter’s obituary in the New Statesman, 12 January 2009. Domaine public]

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